Lemerre reprocherait à Chamakh de n'avoir pas pu faire comme Karim Ziani Si l'Algérie a pris une sérieuse option sur la qualification au Mondial 2010, le Maroc a mis pour sa part un pied… dehors. Et pour cause, le bilan affiché par les protégés de Roger Lemerre après trois journées disputées dans cette poule A, est on ne peut plus catastrophique. Deux points bien maigres au bout de trois matches dont deux à domicile. Il faut reconnaître qu'un sélectionneur novice n'aurait pas fait pire lorsqu'on voit tous les noms qui composent l'équipe nationale du Maroc. Et pourtant Adebayor était absent ! La rencontre de samedi semblait pourtant largement à la portée des Lions de l'Atlas, surtout que de nombreux joueurs togolais étaient absents ce jour-là, à leur tête le buteur des Gunners d'Arsenal, Emmanuel Adebayor. Excusez du peu ! Mais la pression qui a pesé sur les épaules des Marocains a été plus forte que le rêve de rattraper les points perdus contre le Gabon puis contre le Cameroun, même si ce dernier aurait été bon à prendre s'il n'avait pas été précédé d'une humiliante et surprenante défaite à domicile. Un penalty raté par manque de confiance Les Marocains, qui espéraient aller la tête haute en Afrique du Sud, après le rappel d'une armada de joueurs talentueux venus des grands clubs européens, se sont vite rendu compte que la chance n'était pas de leur côté. En effet, le penalty raté en première mi-temps par l'excellent El Hamdaoui, qui n'a pas fait mieux que de tirer dans les décors, a mis les Marocains dans une situation de doute extrême. Et rien ne semblait s'arranger à mesure que le temps s'égrenait. A la mi-temps, l'on pensait que Roger Lemerre allait trouver le remède pour repositionner ses joueurs et surtout leur insuffler cette rage de vaincre qui semblait avoir déguerpi. Les Marocains auraient dû se secouer d'eux-mêmes après l'incroyable occasion ratée par les Togolais avant la pause. Le public a réclamé le retour de Badou Zaki Mais les paroles qui pouvaient fouetter les Lions de l'Atlas n'étaient sans doute pas dans le lexique de l'entraîneur français, imperturbable sur sa ligne, mais surtout perdu dans des calculs qui s'avéreront totalement faux et stériles. Le public du stade Moulay Abdallah de Rabat, qu'on a préféré à celui de Casablanca pour sa réputation soft, a vite déchanté et a commencé à scander le rappel de Badou Zaki à la place de Lemerre. Pis, le match nul (0-0) annonçait sa fin inchangée avec une telle certitude que les supporters, très peu nombreux que d'habitude par ailleurs (plusieurs tribunes étaient quasiment vides), s'étaient carrément retournés contre leur équipe nationale, applaudissant les Togolais, plus confiants, et sifflant leurs joueurs complètement égarés et dépités par ce qu'ils enduraient chez eux. Les carottes sont cuites pour le Mondial Les carottes sont apparemment cuites pour l'équipe du Maroc qui va maintenant se repositionner pour une place à la CAN-2010 qui, elle aussi, est loin d'être acquise devant le Gabon, le Togo et le Cameroun. Et pourtant, les Marocains étaient archisûrs que leur équipe était techniquement supérieure à ses adversaires dans cette poule A. Entre Hadji, El Hamdaoui, Chamakh, Zemama, Zerka, Regragui et tant d'autres bons joueurs encore, Lemerre n'avait que l'embarras du choix. Et c'est justement cela qui lui a fait défaut, lui qui n'a jamais su défendre son projet sans avoir recours à l'agressivité qui le caractérise et qui a fini par lui valoir les désapprobations des joueurs et des journalistes. «Lemerre est passé à côté de son sujet pour un demi-million de dirhams mensuel sur le dos du contribuable» Les médias marocains ont tout de suite dirigé leurs critiques vers la même cible : Roger Lemerre. Ils ont dès lors commencé à tirer à boulets rouges sur le Français, lui imputant sur ce coup-là la responsabilité totale de l'échec. «Lemerre et ses hommes sont passés à côté de leur match. Aucune construction, aucune cohésion et surtout aucune intelligence tactique. Il n'y avait que la présence amorphe de celui qui coûte un demi-million de dirhams par mois et bien d'autres avantages au contribuable marocain», écrit Al Mounatkhab sur son site Internet. «Lemerre est loin du grand stratège qu'il veut paraître» Les médias marocains se déchaînent encore sur le sélectionneur national : «Alors que tout le monde attendait un sursaut d'orgueil de Lemerre, ce dernier allait encore une fois très mal négocier sa sortie et se montrer aussi stérile et inactif que lors du premier match face aux Panthères du Gabon. Il faut dire que le technicien français, qui a surtout marqué les deux derniers stages de l'équipe nationale par ses coups de colère, ses interdictions à outrance d'approcher l'équipe nationale et son amateurisme dans la gestion des affaires de l'équipe nationale, est loin d'être le grand stratège qu'il voudrait bien nous en donner l'air.» «Ces puanteurs qui se dégagent de la gestion du football marocain» On reproche également à Lemerre dans ce match nul au «goût de défaite» d'avoir tenté l'incompris en remplaçant Zemama (le meilleur des Marocains) par Regragui à quelques minutes de la fin. «Drôle de stratégie offensive, en tout cas sans succès, qui montre les limites du staff national et met le doigt sur les plaies béantes qui rongent notre football et qui nous mettent face aux puanteurs qui se dégagent de sa gestion… Pour quand le réveil ?», se demandent les journalistes marocains qui vont sans doute pousser jusqu'au limogeage de Roger Lemerre. Ce dernier partira sans doute avec un bon pactole se reposer dans un autre pays arabe, à défaut de trouver preneur en Europe, là où son échec a été largement consommé. Lemerre reprocherait à Chamakh de n'avoir pas pu faire comme Karim Ziani Le Bordelais Marouane Chamakh a déclaré forfait avant le match contre le Cameroun. Il n'a pas pris part non plus à celui de samedi dernier en raison d'un problème aux adducteurs. L'attaquant marocain s'était présenté au stage de préparation qui a précédé le match contre le Togo pour remettre le dossier médical que lui a délivré le médecin des Girondins et s'excuser de ne pas faire partie du groupe, mais Roger Lemerre a intimé l'ordre aux portiers de ne pas laisser entrer son joueur sur le lieu du stage. Les médias marocains en avaient fait tout un plat, surtout après avoir aperçu le joueur tout sourire dans la tribune de Rolland-Garros en train d'applaudir Federer. Chamakh s'est tout de suite défendu d'avoir fait l'impasse sur le match sous prétexte de se préserver en vue de la saison prochaine et de négociations en cours avec de grands clubs européens. Il a rejeté les accusations contre le sélectionneur et les membres de la Fédération qui lui reprochaient de ne pas avoir fait comme l'Algérien Karim Ziani qui s'est fait opérer des adducteurs afin d'être prêt pour les matches de la sélection de son pays. * Chamakh : «Lemerre et les autres auraient pu me soutenir ou dire la vérité à tout le moins» Le torchon brûlait depuis quelques jours déjà entre Lemerre et Chamakh. N'ayant pas sa langue dans la poche, ce dernier l'a ouvertement révélé aux médias : «Je me suis présenté à Paris et c'est là que je devais remettre le certificat, mais on m'a dit de ne pas passer. J'ai donc profité de ma journée sur Paris. Ils savaient très bien que j'étais blessé. Je suis un peu déçu car ils auraient pu éteindre l'étincelle, et puis ça a pris une ampleur énorme alors que la Fédération était au courant bien avant. De l'administrateur au sélectionneur, tout le monde était au courant. Je suis un peu déçu car ils auraient pu me soutenir ou dire la vérité à tout le moins.» Voilà en clair les raisons qui ont fait que de si grands joueurs et un aussi grand entraîneur n'ont pu paraître plus qu'une équipe très moyenne. Nacym Djender