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Mesbah comme vous ne l'avez jamais connu
Publié dans Le Buteur le 20 - 02 - 2012

«Le professionnel que je suis a commencé par être… marchand de légumes»
«Allah, l'Algérie et mon père !»
En l'espace d'une année, Djamel Mesbah est sorti de l'ombre vers la lumière. D'abord en obtenant une place de titulaire au sein de la sélection nationale, ensuite en s'illustrant au sein de son ancien club, l'US Lecce, et enfin en s'engageant à l'AC Milan pour ce qui est le transfert le plus important d'un joueur algérien vers un club du gotha européen. Ces dernières semaines, il s'est illustré à chaque fois que son entraîneur à Milan, Massimiliano Allegri, lui a fait confiance. Ceux qui ne le connaissaient pas bien commencent à découvrir le talent sportif de ce joueur, mais très peu de gens savent qu'il a trimé et galéré dans sa vie avant d'en arriver là. Pour les lecteurs du Buteur et d'El Heddaf, et surtout pour l'ensemble de la jeunesse algérienne, Djamel Mesbah retrace son cheminement dans la vie fait de hauts et de bas, où il a chuté à plusieurs reprises tout en sachant comment se relever et repartir aussitôt, sous les conseils de celui qui est tout pour lui : son père.
«Mon père était éboueur à la mairie d'Annecy»
«Ceux qui croient que je suis né avec une cuillère d'argent dans la bouche se trompent. Je suis issu d'une famille très modeste. Mes parents ont émigré pour vivre en France alors que j'étais enfant. Mon père a travaillé comme éboueur à la mairie d'Annecy alors que ma mère est femme au foyer. Mon père a vraiment trimé pour nous élever, moi et mes deux grandes sœurs, dans la dignité et dans le respect de nos valeurs spirituelles. Il s'est beaucoup privé pour nous.»
«L'une de mes sœurs est psychologue, l'autre est enseignante d'anglais et d'espagnol»
«Aujourd'hui, ma plus grande fierté est de voir mes parents, mon père surtout, fiers de leurs enfants. Tout son labeur, toutes ses privations, toutes les insomnies qu'il a dû avoir à réfléchir à la manière de nous procurer les outils de notre réussite, tout cela a trouvé sa récompense puisqu'aujourd'hui, ses trois enfants ont socialement réussi. En plus de moi qui suis footballeur professionnel et, de surcroît international algérien, mes deux sœurs sont psychologue pour l'une et enseignante d'anglais et d'espagnol pour l'autre. El hamdoullah.»
«Mon père n'est pas une star, mais c'est mon idole, mon modèle, mon exemple»
«En général, les enfants sont influencés par des amis, des idoles, des enseignants à l'école, au lycée ou à la fac, des voisins… Moi, il y a une seule personne qui m'a influencé : mon père. J'avais des amis, mais c'est mon père qui était tout. Je ne sais pas si c'est parce que j'étais le garçon unique de la famille, mais nous avions des rapports très étroits. Je le consultais sur tout et ses conseils ont toujours été précieux. Mon éducation, c'est lui. Bien sûr, il y a aussi ma mère (qui peut se passer de la tendresse de sa maman ?), mais mon père a été mon idole à moi, mon modèle, mon exemple. Pourtant, ce n'était pas une star. C'était un éboueur qui gagnait sa vie à la sueur de son front et qui irradiait, au sein de notre famille, une chaleur humaine et des valeurs ancestrales qui ont fait qu'il était pour moi plus qu'un père, un repère. Pour moi, il y a Allah, l'Algérie et mon père.»
«Je me suis fait de l'argent de poche en travaillant, pas en volant»
«Du fait du revenu modeste de mon père, je me suis vu dans l'obligation, adolescent, à travailler un peu pour me faire de l'argent de poche. J'étais donc marchand de fruits et légumes au marché d'Annecy. Je m'occupais d'un étal avec un cousin, Hamid. J'ai fait ça de longs mois, en dehors des cours à l'école et des entraînements. Eh oui : le footballeur professionnel de l'AC Milan qui est là en face de vous a été marchand de légumes ! Je ne le regrette pas. Ça m'a permis de gagner un peu d'argent de poche à la sueur de mon front, par le labeur, et non pas par le vol et par des moyens détournés. C'est aussi un legs de mon père : travailler honnêtement et gagner sa vie honnêtement.»
«J'ai même travaillé dans une blanchisserie !»
«Je n'ai pas été uniquement marchand de fruits et légumes. J'ai même travaillé durant deux mois dans une blanchisserie. C'est dire que j'ai fait de petits boulots durant mon adolescence. Pourtant, c'était l'âge ingrat où la pauvreté pousse certains à recourir à d'autres méthodes peu recommandables pour se faire un peu d'argent, mais mon père m'a appris une chose : il n'y a pas de sot métier. Il faut juste travailler et, le soir, remercier Allah de ce qu'on a gagné. Ce sont des valeurs avec lesquelles j'ai grandi. C'est pour ça que j'ai autant d'admiration et de reconnaissance pour mon père.»
«Refusé une première fois par Annecy-le-Vieux, j'ai pleuré à chaudes larmes sans que mes parents le sachent»
«Comme beaucoup d'enfants, j'ai commencé à jouer au football dans la rue. C'est devenu une passion pour moi et j'ai voulu intégrer le centre de formation d'un club. Mes parents ne s'y connaissent pas trop au football car ils avaient d'autres soucis, mais mon père avait vu que c'était une passion pour moi et il m'a donc autorisé m'inscrire dans une école de football. La première fois que je m'étais adressé au club de la ville, l'US Annecy-le-Vieux, on m'avait dit que c'était complet au niveau de la structure de formation. Je vais vous faire une confidence : en rentrant à la maison, je suis parti dans ma chambre et j'ai pleuré à chaudes larmes, comme un gosse. A ce jour, mes parents ne savent pas que j'ai pleuré ce jour-là. Je le révèle aujourd'hui pour la première fois. L'année d'après, je suis reparti et on m'avait accepté.»
«Mon père a fait des heures supplémentaires pour me payer sport-études»
«Avec le temps, je m'intéressais au football de manière passionnée. D'ailleurs, même mon père avait su, par ceux qui suivaient mes matches de jeunes, que j'avais du potentiel et que je pouvais aller loin dans le football. Alors, il consacrait une partie du budget familial, pourtant modeste, à m'acheter le minimum nécessaire en matière d'équipements. Il faisait beaucoup de sacrifices pour que je réussisse dans le football. D'ailleurs, il a dû faire des heures supplémentaires dans son travail pour financer l'option sport-études que j'avais choisi dans mon cursus scolaire. Les petits boulots que j'ai faits m'ont aidé aussi.»
«J'ai concilié football et études jusqu'au lycée, puis j'ai dû choisir»
«Depuis notre tendre enfance, mes parents insistaient avec nous, leurs enfants, sur un point : les études. N'ayant pas eu la chance, eux, de faire des études poussées, ça leur tenait à cœur que nous réussissions dans la vie et que nous ayons un statut social respectable. J'ai adhéré pleinement à ce principe et j'étais plutôt bon dans mes études. Je suis arrivé jusqu'en classe première au lycée. Cependant, au moment où la proposition du centre de formation du FC Servette de Genève s'était présentée, il fallait choisir : ou le football, ou les études. Mon père a fait confiance à mon potentiel et ne m'a pas bloqué. C'était un coup risqué, car j'aurais pu ne pas devenir professionnel et perdre ainsi sur les deux tableaux, mais El Hamdoullah, ça a marché.»
«Au moment où le Barça m'avait invité pour des essais, je m'étais blessé»
«Au Servette, j'ai obtenu mon premier contrat et mes premiers salaires. J'ai pu à mon tour aider financièrement mes parents. Après les bas d'une adolescence difficile sur le plan social, c'était le temps des hauts. Cependant, même après des hauts, il y a eu quelquefois des bas. Par exemple, j'ai souffert de blessures récurrentes durant mes premières années de professionnel. L'une de ces blessures, survenue au moment où le FC Barcelone, ayant eu vent de mes performances au Servette de Genève, m'avait invité pour des essais, m'a peut-être coûté de jouer au Barça. Certes, il n'y avait pas eu d'offre concrète, mais j'aurais aimé effectuer ces essais en étant en possession de mes moyens.»
«A Bâle, nouvelle blessure et retour au bas de l'échelle»
«Alors que ma carrière était bien lancée au FC Servette de Genève, j'ai été recruté par le FC Bâle qui, à l'époque, était le champion de Suisse en titre et auteur, quelques mois plus tôt, d'un parcours fabuleux en Ligue des champions. Malheureusement, une nouvelle blessure grave a freiné mon élan. Encore des bas ! Cela m'a obligé une nouvelle fois à revenir presqu'au bas de l'échelle en étant prêté au FC Lorient, puis en signant au FC Aarau pour me relancer. Il m'avait fallu deux ans pour revenir à mon meilleur niveau et susciter de nouveau l'intérêt des autres clubs.»
«A Lucerne, on m'avait préféré un joueur de deuxième division»
«J'ai été recruté par le FC Lucerne, un club qui nourrissait de grandes ambitions en ayant effectué un bon recrutement. Malheureusement pour l'entraîneur en place, ça n'avait pas marché et il a été limogé. Celui qui l'a remplacé, Sforza, ne m'a pas fait confiance, à tel point qu'il me préférait un joueur venu de… deuxième division. Toujours est-il que, fidèle à mon éducation et à ma ligne de conduite, j'ai continué à travailler sans discuter les choix de l'entraîneur. C'est là qu'est survenue l'offre de prêt d'Avellino. J'ai tout de suite accepté pour avoir du temps de jeu et aussi parce que j'ai toujours rêvé de jouer en Italie.»
«Je n'ai pas été payé 8 mois à Avellino, au moment où ma femme a accouché de mon premier enfant»
«Je pensais que c'était, pour moi, la fin de toutes les galères. Eh bien, non ! Si tout s'est très bien passé sur le plan sportif avec Avellino, il en était autrement sur le plan financier puisque j'étais resté 8 mois sans être payé puisque le club était en faillite. Vous vous imaginez, 8 mois sans salaires ! Le plus dur est que c'est survenu alors que ma femme a accouché de mon premier enfant. Avoir un heureux événement alors que, financièrement, j'étais en difficulté, ça m'avait vraiment marqué. Si je m'en suis sorti à cette époque, c'était grâce au soutien de mes amis, de mes sœurs et des frères de ma femme. Lorsque j'ai signé à Lecce un peu plus tard, j'ai pu voir le bout du tunnel.»
«Je dis aux jeunes Algériens : travaillez, attendez votre chance et ne renoncez jamais»
«Le cheminement de ma vie a été cahoteux, mais fait dans la dignité. C'est la première leçon que j'en retiens. Bien sûr, ma carrière est loin d'être terminée et elle connaîtra certainement d'autres péripéties, mais si j'en parle aujourd'hui, c'est surtout pour sensibiliser la jeunesse algérienne sur un point que j'estime important : on peut changer sa vie par le travail, le labeur et la patience. Beaucoup qui auraient été à ma place lorsque j'étais adolescent auraient peut-être abandonné, renoncé, abdiqué, mais j'ai toujours continué à croire en nos valeurs, celles que m'a transmises mon papa. Mon message aux jeunes Algériens : il faut travailler en silence, attendre sa chance et la saisir. Il ne faut surtout pas désespérer à la première difficulté car il faut se dire qu'après la pluie vient toujours le beau temps.»
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Algérien depuis toujours, «Français» pour le football à 19 ans
Ceux qui pourraient penser que la relation entre Djamel Mesbah et l'Algérie a commencé en mai 2010, à l'occasion de sa première convocation chez les Verts pour aller en Coupe du monde, se trompent. Il n'a pas attendu ses 26 ans pour connaître l'Algérie. D'ailleurs, précision importante : il est né en Algérie, plus précisément dans la commune de Zighoud-Youcef, dans la wilaya de Constantine, d'un père originaire d'El Harrouch (Skikda) et d'une mère originaire de Aïn Bouziane (Skikda). Cela à l'adresse de ceux qui croient que tous ceux qui grandissent ou vivent en Europe n'ont aucun lien avec leur pays d'origine.
«Il ne me demandait qu'une seule chose : le maillot de l'Algérie»
Le rapport de Mesbah à l'Algérie ne s'arrête pas à un acte de naissance enregistré à l'état civil de Zighoud-Youcef. Des témoignages unanimes recueillis parmi ses proches attestent que, depuis qu'il était enfant, il ne ratait aucune occasion d'afficher ostensiblement son algérianité. Son ami Mohand Boucherai est formel : «J'ai toujours vécu entre la Suisse et l'Algérie et, à chaque fois que je me rendais au bled, Djamel me demandait une seule chose : que je lui ramène un maillot de la sélection nationale. Ça date de l'époque où le football algérien vivait sa période de crise, à la fin des années 90 et au début des années 2000.»
Ses copains arboraient «10 Pelé», lui mettait «11 Madjer»
Le maillot algérien était le vêtement prisé que Mesbah arborait quand il était enfant. Dans les matches de quartier, il le portait presque toujours. Lui-même se souvient que durant les années 90, dans l'euphorie du sacre de l'Olympique de Marseille en Ligue des champions, ses copains de quartier arboraient des tee-shirts blancs (ils n'avaient pas les moyens de s'acheter de vrais maillots) sur lesquels étaient floqués 10 Pelé», référence à Abedi Pelé. «Moi, sur mon tee-shirt blanc, il était inscrit «11 Madjer». Je n'avais jamais vu Madjer jouer, mais on m'avait tellement parlé de lui que c'était un modèle naturel pour moi sans que je le connaisse», se souvient-il. Même à l'école, il n'hésitait pas arborer le maillot de l'Algérie. «Pour moi, il n'y avait rien de plus normal. Même vivant en France, j'étais algérien.»
Une finale de 1000m cross avec le maillot algérien
Ce que les Algériens ne savent pas, c'est qu'avant d'être footballeur, Djamel Mesbah faisait du cross. Il avait dès sa tendre enfance des prédispositions pour courir dans une manière peut-être de se défouler. «Je me rappelle avoir participé une fois à la finale du championnat de France de cross du 1000m. Eh bien, j'ai été le seul des concurrents à avoir fait la course en étant vêtu du maillot de l'Algérie», nous lance-t-il avec un rire amusé, non sans afficher une fierté légitime. En somme, le maillot algérien a de tout temps fait partie de la «garde-robe» du défenseur algérien de l'AC Milan et ce n'est donc pas en mai 2010, à Crans-Montana, qu'il l'a découvert.
«En 1996, après le but contre l'Afrique du Sud, j'étais aussitôt descendu dans la rue»
Quant au drapeau algérien, n'en parlons pas ! Il en a toujours un dans son armoire. Quand l'Algérie jouait (du temps où il n'était pas international), il était affiché ostentatoirement dans le quartier. Dans son quartier à Annecy, on le surnommait «l'Algérien», tant il ne parlait que de l'Algérie. Il a même une anecdote à ce sujet : «Lors de la CAN-96, l'Algérie avait affronté l'Afrique du Sud en quart de finale. Les Sud-Africains avaient ouvert le score, mais dès que les Algériens avaient égalisé, j'étais sorti aussitôt dans le quartier, drapeau algérien à la main, en criant tout seul «One, two, three ! Viva l'Algérie ! Or, j'ai vu que j'étais le seul à crier et à faire la fête. Vous savez pourquoi ? Parce qu'au moment où j'étais sorti de la maison pour aller afficher ma joie dans la rue, l'Afrique du Sud avait ajouté un deuxième but. En l'apprenant, je m'étais tu, j'ai baissé la tête et suis remonté chez moi à pas lourds, comme si c'était moi qui avais perdu.»
Supporter d'Auxerre… pour Saïb et Tasfaout
Ce rapport passionnel à l'Algérie l'avait même poussé à faire, au milieu des années 90, ce qu'il n'avait jamais voulu faire auparavant : devenir supporter d'un club français. Ce club, c'était l'AJ Auxerre où évoluaient les deux internationaux algériens Moussa Saïb et Abdelhafid Tasfaout. «Quand Auxerre jouait, c'était comme si c'était l'Algérie qui jouait. J'étais anxieux avant chaque match. Je regardais avec peut-être plus de ferveur que les supporters auxerrois ! Quand Auxerre a remporté le doublé championnat-Coupe de France en 1996, je ne vous dis pas la joie que ça m'avait procurée. Pour moi, c'était la réussite de Saïb et Tasfaout, donc de l'Algérie.»
Mexès le sait, Tasfaout aussi
A l'AC Milan, il a trouvé quelqu'un à qui évoquer cet épisode : Philippe Mexès, formé à l'AJ Auxerre. «Je lui ai dit que j'ai été supporter de ce club à un certain moment et je lui ai expliqué pourquoi», dit-il avec le sourire. De plus, quelle ne fut son émotion lorsque, à l'été 2010, il a rencontré Abdelhafid Tasfaout qui venait d'être nommé manager général de la sélection nationale en remplacement de Walid Sadi ! Il avait retrouvé une part de son enfance, celle qui avait été bercée par la vision de tout ce qui peut représenter l'Algérie.
«Son père s'est fait Français pour qu'il puisse continuer sa carrière»
Puisqu'il est si profondément algérien, quelle est donc sa relation avec la France, le pays qui l'a vu passer son enfance et son adolescence ? De simples papiers afin de pouvoir poursuivre sa carrière de footballeur. Son ami Mohand témoigne : «Deux ans après son intégration au centre de formation du Servette de Genève, il avait les qualités pour être pris dans le groupe professionnel. Seulement, il avait les papiers algériens et, donc, était considéré comme un joueur étranger. Or, le club avait déjà engagé le maximum d'étrangers autorisé par la réglementation. Djamel ne pouvait donc pas jouer et allait peut-être se retrouver à la rue. C'est là que son père a fait un sacrifice : il a entrepris les démarches pour obtenir la nationalité française afin que son fils soit lui aussi considéré comme français et, par conséquent, comme joueur communautaire non concerné par le quota de joueurs étrangers. Je dis que c'est un sacrifice car son papa, pas amour-propre, n'avait jamais, jusque-là, voulu devenir Français. S'il l'a fait, c'est pour son fils. Donc, ce n'est qu'à 19 ans que Djamel est devenu français. C'est aussi à partir de là que sa carrière a véritablement démarré.» En somme, c'est juste une question de forme car, pour le fond, son nationalisme était au Vert depuis sa tendre enfance. Mesbah n'est donc pas un Algérien de la dernière heure, loin de là.
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«Un Algérien à 200 % avec un passeport français»
Cette anecdote nous a été racontée par Mohand Boucheraï, un ami de Djamel Mesbah à qui il avait tenu compagnie à Milan durant ses deux premières semaines dans cette ville. «Un jour, nous étions en train de déjeuner à Milanello. A la table voisine, il y avait Antonio Cassano, Maxi Lopez, Pato et deux physiothérapeutes de l'équipe. Cassano, connu comme étant le boute-en-train du groupe, a commencé à chambrer gentiment Djamel. L'un des physiothérapeutes lui a dit : ‘'Au fait, il parle français. Il est donc français.'' Cassano l'a alors rectifié : ‘'Non, il n'est pas français. Il est franco-algérien.'' Djamel a alors souri et leur a dit : ‘'Vous avez tout faux. Savez-vous ce que je suis ? Un Algérien à 200 %, mais avec un passeport français.'' Pato lui a alors dit : ‘'Tu es donc un Algérien de vrai ? C'est bien.'' Quand j'ai entendu cela, j'ai été très ému. «Algérien», «200 %», «passeport français», chaque mot choisi était vraiment fort. Il avait vraiment trouvé la phrase juste pour dire ce qu'il est, ce qu'il sent être. Je n'étais qu'un invité à cette table, mais j'avais ressenti une très grande fierté.»
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Demain, vous retrouverez la seconde partie du reportage consacré à Djamel Mesbah
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