«Pour le Ramadhan, j'ai demandé à mes sœurs de se relayer chez moi pour me préparer à manger» Karim, le public algérien s'attache à vous de plus en plus, le ressentez-vous vraiment ? C'est sûr que ça fait plaisir de voir le public nous soutenir comme il le fait. Ça nous donne des ailes sur le terrain et on n'a plus envie de le décevoir. Déjà qu'on se donnait à fond avant même cette ferveur, alors maintenant avec cet attachement, ça nous donne plus de responsabilités et d'obligations de répondre à l'attente de tous nos supporteurs. C'est vrai que j'ai senti un peu plus de ferveur autour de moi et j'en suis honoré. Quand Matmour a le ballon pendant les matchs de l'EN, on sent qu'il va se passer quelque chose d'intéressant. Vous êtes devenu une sorte de joueur d'utilité publique, tellement vous rassurez les fans des Verts, n'est-ce pas ? (Il rigole franchement) Non, vous exagérez ! (Il rigole encore). C'est vrai que ça fait plaisir de voir que ce que je fais plaît aux supporteurs de l'EN. Moi, j'essaie de donner le meilleur de ce que je sais faire sur le terrain pour honorer le maillot qu'on m'a confié. J'ai toujours à l'esprit que je joue pour tout un peuple et cela me donne encore plus de responsabilités à chaque fois que j'ai le ballon. Parlons un peu de l'ambiance au sein de l'EN. Vous trouvez normal de voir assis d'un côté les locaux et puis de l'autre les «Euros» comme il faudra peut-être les appeler ? Non, je vous assure que ce groupe est très sain. C'est ce qui fait d'ailleurs la force de l'EN. Sincèrement, il y a une très bonne entente entre tous les joueurs. En écoutant les anciens, ils disent tous que l'ambiance est nettement plus saine que par le passé. On rigole tous ensemble et franchement, il n'y a pas de mauvaise personne en équipe nationale. Vous partagez votre chambre avec qui, habituellement ? D'habitude je suis avec Kader (Ghezzal), mais lors du dernier match, j'ai cédé ma place volontiers à Mourad Meghni. Comme ils évoluent tous deux en Italie, c'était plus simple pour Ghezzal de le briefer pour ses débuts en équipe nationale. Mais c'était temporaire, la prochaine fois Mourad va se trouver quelqu'un d'autre ! (Il rigole un bon coup). Non, mais on a nos habitudes avec Kader et on ne veut pas trop les changer. Qu'est-ce qui vous lie autant à Ghezzal ? Non, mais je m'entends aussi avec les autres comme Anthar (Yahia), parce qu'on se voit plus souvent en Allemagne, vu qu'on n'est pas éloignés l'un de l'autre. Avec Kader, on a pris l'habitude de partager la même chambre et je ne vois pas pourquoi on va changer. Il ne faut pas changer les bonnes habitudes comme on dit. Comme celle de jouer et de gagner au stade de Blida ? (Il rigole une fois de plus). On était prêts à venir jouer au stade du 5-Juillet, mais vu que les conditions n'étaient pas meilleures que celles de Blida, il faudra y retourner. Mais franchement, la pelouse du 5-Juillet n'était pas plus pourrie que ça, non ? C'est vrai qu'elle n'était pas trop mal. Mais bon, il fallait garder nos repères, car c'est très important pour les joueurs d'évoluer sur un terrain qu'ils connaissent bien. Aujourd'hui, le plus important c'est de penser à gagner nos prochains matchs dans l'immédiat et se qualifier en Coupe du monde. Le stade du 5-Juillet, on y rejouera à coup sûr un jour ou l'autre. C'est un stade merveilleux qu'on retrouvera avec grand plaisir. Mais pour l'instant, il s'agit de ne rien perturber dans cette équipe, à commencer par les habitudes et les repères pendant les matchs officiels. Ce sont les joueurs qui ont pesé pour ramener tout le monde à Blida ? Non, je crois que c'est la FAF et le coach qui ont décidé de retourner à Blida, après avoir écouté les doléances des cadres de l'équipe. Ils leur ont fait part de leur expérience lorsqu'on change quelques repères dans une équipe en plein dynamique de victoires. Ils ont aussi parlé des sensations qu'on a sur un terrain où on a gagné plusieurs fois et ma foi, je crois que le coach et le président ont bien saisi le message. Mais moi, je fais partie des plus jeunes de l'équipe, ce n'est pas à moi de décider où on va jouer. Ils ont pris cette décision d'un commun accord. Quel serait le pire cauchemar à vivre avec l'EN ? Non, il n'y a pas de cauchemar. On ne redoute pas ce genre de choses. Tout ce que je peux dire au jour d'aujourd'hui, c'est que notre plus grand adversaire c'est nous-mêmes. Et tant qu'on restera concentrés, sans prendre le chou, il n'y a pas de raison pour que ça ne se passe pas bien. Franchement, je ne m'inquiète pas trop. Je crois que le passé nous a servi d'exemple et tant que rien n'est encore acquis, il faut rester extrêmement vigilants. C'est quoi le rêve pour vous en fin de saison ? Ah, ce serait d'avoir fait une bonne CAN, de terminer en haut du classement avec mon club et d'aller en Coupe du monde inch' Allah. Ce serait le rêve parfait. Ne pensez-vous pas que cette saison va être décisive pour votre carrière ? Non, je ne le pense pas, car j'ai appris que dans le football tout peut aller très vite, dans un sens comme dans l'autre. Il suffit juste de continuer de bosser et de se donner à fond à l'entraînement. Mais c'est vrai que l'année 2010 pourrait donner l'élan qu'on espère tous au football algérien. Je crois même que cette année va changer la vie de tous les joueurs algériens et même de tout le football algérien. N'aviez-vous pas eu peur de perdre votre place au sein de l'EN lorsque vous aviez quitté le stage l'an dernier ? En fait, au fond de moi-même, c'était plus une volonté de reculer pour mieux sauter, sans plus. J'étais arrivé à saturation physiquement et je voyais que je ne pouvais plus donner par rapport à ce qu'on attendait de moi. Je crois que j'ai fait une erreur en disant la vérité. C'était quoi cette vérité à ceux qui ne le savent pas encore ? J'avais dit que j'avais des problèmes musculaires et que j'étais arrivé à saturation pour n'avoir pas pris de vacances depuis deux ans. Je sentais que c'était le seul moment possible pour moi de me reposer avant d'entamer les éliminatoires. Je me suis donc préservé pour ne pas m'enfoncer un peu plus et, surtout, pour me donner une chance d'arriver à mon niveau actuel et celui où j'ai envie d'aller. L'EN se renforce à chaque fois par des éléments de valeur. Meghni s'installe, Yebda arrive… Ne craignez-vous pas un peu la concurrence en attaque ? Déjà, la concurrence dans une équipe est un signe de richesse de l'effectif. Plus on a de bons joueurs, mieux l'EN se portera. Personne ne doit craindre la concurrence s'il aime vraiment l'Algérie. L'EN a besoin de tous les bons joueurs pour gagner ses matchs et aller là où on l'espère tous. Moi, je ne pense qu'à travailler pour m'améliorer et me mettre à la disposition de l'EN dans la meilleure des formes. Je sais que je peux apporter beaucoup à cette équipe et chaque joueur est conscient de sa valeur. C'est quoi le secret de votre attachement particulier à votre maman ? (Il rigole). C'est vrai que mes rapports avec ma maman sont très particuliers. Je ne peux pas vous l'expliquer dans les détails, car je n'aime pas trop étaler ma vie privée dans les médias. Mais tout ce que je peux vous dire, c'est que ma mère a fait énormément de sacrifices pour moi. Si je suis ce que je suis aujourd'hui, c'est surtout grâce à elle, ça c'est certain. Et le papa dans cette histoire ? Ah, lui aussi a fait beaucoup pour moi. J'en suis très reconnaissant, il n'y a pas de doute. Mais avec ma mère, c'est un peu spécial, je dois le reconnaître. C'est elle qui m'a soutenu le plus. Il paraît que vos parents ne voulaient pas vous laisser jouer au football avant d'avoir le bac, c'est vrai ça ? Oui, c'est vrai. Pour eux, les études étaient la seule voie possible pour s'en sortir dans la vie. Ils m'ont donc poussé à avoir mon bac sciences avant de me permettre de jouer au foot. Vous avez fait quoi après le bac ? J'ai intégré une école de commerce et j'ai obtenu un diplôme en marketing. C'était lorsque j'étais au centre de formation de Strasbourg. Quel est votre rapport à la religion ? Je suis naturellement Musulman ; j'essaie de faire mes prières comme tout le monde et le reste des obligations qui vont avec. Je voue le plus grand respect à l'Islam, car ça m'a enseigné pas mal de choses dans ma vie. Comment allez-vous vivre le Ramadhan en Allemagne ? Je vais faire venir mes sœurs chez moi pour m'aider pendant le Ramadhan. Elles vont se relayer l'une après l'autre pour me préparer à manger et me tenir compagnie. Sans elles, ce serait très difficile pour moi. Un dernier mot ? Je profite de l'occasion pour souhaiter à tous les Musulmans du monde de passer un bon Ramadhan, particulièrement aux Algériens où qu'ils se trouvent. J'espère aussi retrouver l'Algérie pour d'autres victoires, à commencer par le match du 6 septembre. Entretien réalisé par Nacym Djender