Aéroport Leopold Sedar Senghor de Dakar. 30 mai 2008. Les joueurs de l'Equipe nationale, qui venaient de perdre le premier match des éliminatoires combinées de la CAN et du Mondial-2010, un match à leur portée, sont déçus. Les uns répondaient aux questions, les autres prenaient des pots, d'autres encore préféraient s'isoler pour écouter de la musique ou lire un livre. Mais un joueur semblait mal à l'aise et à l'écart du groupe : Hameur Bouazza. L'actuel joueur de Birmingham était en discussion avec Boubekeur Cheniouni, le directeur administratif de la FAF devant le guichet des enregistrements du vol de... Paris. Pour certains, Bouazza, qui n'avait joué que 10', n'a pas accepté son statut de remplaçant. Pour d'autres, ce sont les responsables de Fulham, son club à l'époque, qui lui ont mis une pression terrible à cause d'une blessure à l'épaule qu'ils ont jugée grave. C'était la dernière image de Bouazza en sélection. Depuis cette date, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et les Verts se sont qualifiés au 3e tour sans Bouazza. Huit mois après, Saâdane décide de le rappeler, mais en tant qu'invité. Le sélectionneur veut lui donner une chance, mais exige de lui un engagement sans faille pour la sélection. Qu'en pense Bouazza ? Il nous livre ses impressions dans l'entretien qu'il nous a accordé hier. Bouazza:«Cette fois, je m'engage à fond pour les Verts» * Etes-vous au courant que vous êtes rappelé pour le prochain stage de la sélection nationale ? * Oui, j'en ai entendu parler. Vraiment, je suis très, très content de retrouver la sélection. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela me fait plaisir. * Le sélectionneur ne vous a-t-il pas appelé pour vous apprendre la nouvelle ? * Non, il ne m'a pas appelé. D'ailleurs, ni lui ni aucun membre de la FAF ne m'ont appelé jusqu'à cet instant (entretien réalisé hier en début d'après-midi, ndlr). Cela ne m'inquiète pas. Je sais que j'aurai l'occasion de parler au sélectionneur bientôt. * Depuis le match face au Sénégal à Dakar, vous n'êtes plus revenu en sélection. Que s'est-il passé ce jour-là ? * Il ne s'est absolument rien passé. A l'époque, j'avais des problèmes avec mon club, Fulham, et il me fallait les régler en urgence. J'étais donc un peu perturbé, sans plus. Il ne m'est jamais venu à l'idée de lâcher la sélection. * Quel genre de problèmes ? Des pressions ? * Oui, je subissais des pressions à cause d'une blessure qu'ils prenaient comme prétexte pour m'empêcher de rejoindre les Verts. * Mais des journalistes algériens présents sur place ont bien remarqué que vous n'aviez pas apprécié le fait de ne pas avoir été titularisé... * Non, pas du tout. C'était un choix de l'entraîneur et il fallait le respecter. D'ailleurs, je suis entré dans les dix dernières minutes du match sans aucun problème. * Vous étiez quand même en colère, non ? * Plutôt déçu, oui, car tout joueur aime participer à un match, mais pas en colère. * Pourquoi alors n'êtes-vous pas rentré avec le groupe à Alger, puisque vous avez pris un avion pour Paris depuis Dakar ? * Tout simplement parce que j'avais deux jours de repos avant de retourner à Londres et, au lieu de perdre du temps en faisant une escale à Alger, j'ai rejoint directement Paris où est établie ma famille. De là, j'ai appelé le coach pour l'informer des problèmes que j'ai avec Fulham et de la nécessité de me laisser du temps pour les régler. * N'est-ce pas la concurrence qui vous a fait fuir ? * Non, pas du tout. Je suis professionnel et j'évolue dans des clubs professionnels. Donc, accepter la concurrence est une règle naturelle pour moi. * Rabah Saâdane vous a convoqué en tant qu'invité car il veut d'abord discuter avec vous et obtenir un engagement ferme envers la sélection. Ferez-vous cet engagement ? * Oui. J'annonce que je suis totalement engagé pour la sélection, pour les bons et pour les mauvais moments. Je répondrai à toutes les convocations avec beaucoup de plaisir. A présent que je suis bien dans ma tête à Birmingham City, je veux repartir du bon pied en sélection. * Quitte à accepter le statut de remplaçant ? * Oui. Je cravacherai pour gagner ma place, mais si je ne jouerai pas, j'accepterai. Je m'y engage. * En votre absence, la sélection a réussi à franchir la première étape des qualifications. Comment avez-vous vécu cette période ? * Certes, je suis très content et fier de ce qu'a accompli la sélection. En même temps, j'ai un peu mal. Je n'irai pas jusqu'à dire que je suis dégoûté, mais j'ai ressenti de la frustration de ne pas avoir participé à l'aventure. C'est ce qui me motive à prendre part à la seconde étape où je donnerai tout ce que j'ai pour contribuer à la qualification des Verts. * Vous êtes l'un des rares internationaux à ne pas vous être encore exprimé sur la composition du groupe de l'Algérie. Pensez-vous que les qualification à la CAN-2010 et au Mondial-2010 sont jouables ? * Oui, absolument. Nous avons un groupe de qualité qui peut aller loin. Il ne faut pas crier victoire, mais il ne faut pas viser bas non plus. Nous sommes réellement capables de réaliser quelque chose. * Même aller en Coupe du monde ? * Pourquoi pas ? Nous avons des joueurs qui ont gagné en expérience, dont beaucoup évoluent à un haut niveau et qui connaissent la pression. Donc, je pense sincèrement que c'est jouable. * Au début de saison, vous étiez prêté à Charlton où, paradoxalement, vous réalisiez de bonnes prestations alors que l'équipe est en très mauvaise posture... * C'est vrai, mais j'avais déjà connu cela lorsque j'évoluais à Watford, en Premier League. Je joue bien, je marque, mais l'équipe perd. Comme je suis ambitieux, j'ai tout de suite accepté la proposition de Birmingham City durant ce mercato car ce club joue pour l'accession. * Comment vous sentez-vous au sein de votre nouveau club ? * Plutôt bien. J'ai déjà joué deux matches en titulaire, sans avoir été remplacé. J'ai de bonnes sensations dans ce club. * A quel poste évoluez-vous ? * Je joue à gauche, mais j'ai la liberté de bouger sur tout le front de l'attaque. En fait, je joue plutôt derrière les attaquants, mais souvent excentré vers la gauche. * Un dernier mot pour le public algérien ? * Que les supporters au bled sachent qu'il n'a jamais été dans mon intention de laisser tomber la sélection. C'est avec fierté et honneur que je défends les couleurs de mon pays. Je leur promets de ne pas les décevoir. Entretien réalisé par Farid Aït Saâda