Synthèse R.A. Les troubles de jeudi et vendredi ont connu une accalmie dans plusieurs zones à « haute tension ». Il a été toutefois enregistré une persistance dans certaines régions, cependant avec moins d'intensité. A Alger, un retour au calme a été observé à travers l'ensemble des quartiers d'Alger, notamment à Bab El Oued et à Mohamed Belouizdad (ex- Belcourt) qui ont été jeudi le théâtre de troubles marqués par des scènes de pillage et de vandalisme de biens publics et privés. A l'est du pays, samedi a été également une journée de calme. Les citoyens vaquaient normalement à leurs occupations, malgré l'apparition de quelques foyers de tension, rapidement maîtrisés par les forces de l'ordre. Par contre, à Annaba Centre, des tentatives d'émeute ont été constatées près du marché Hattab, conduisant à la fermeture des commerces avant que les policiers n'interviennent pour disperser de jeunes manifestants au moyen de grenades lacrymogènes. A Tébessa (cité Zaouïa), El Tarf, Aïn Beida (DOum El Bouaghi) et Ksar Belezma (Batna), des troubles très localisés ont éclaté dans l'après-midi de samedi, occasionnant des dommages à des structures publiques, à l'exemple du siège de la daïra, du lycée Ababsa, du bureau de poste de la route de Sedrata et du centre culturel Emir Khaled à Aïn Beida. A l'ouest du pays, El Bahia et les communes avoisinantes ont enregistré également des foyers de tension, maîtrisés par les forces de l'ordre. Même situation dans la wilaya de Tlemcen et d'Aïn Témouchent où la protesta a duré pendant quelques heures dans la soirée de samedi. Dans la wilaya de Chlef, le calme est revenu samedi à Chettia après les affrontements enregistrés jeudi et, à un degré moindre, vendredi soir au niveau de cette localité entre les services de l'ordre et des jeunes manifestants. Au sud, des troubles ont caractérisés samedi après-midi les wilayas d'Ouargla et de Laghouat où les manifestants ont saccagé plusieurs édifices publics. A Ouargla, des troubles ont débuté au niveau de la localité d'Aïn Beida, dans le flanc sud du chef-lieu de wilaya, avant de se propager au centre-ville où des édifices publics ont été incendiés. Le mouvement de protestation a aussi repris samedi après-midi au centre-ville de Tizi-Ouzou, après le calme de la matinée. Des citoyens se sont opposés aux pilleurs et aux casseurs Signalons que les premiers à condamner les actes de vandalismes ayant caractérisé les manifestations contre la hausse des prix, ont bien été les citoyens. Dans plusieurs endroits, des citoyens ont repoussé des tentatives d'incursion de groupes de jeunes qui s'apprêtaient à commettre des actes de pillage et de vandalisme. A Alger, des groupes de délinquants ont été empêchés de commettre des actes de pillage et de vandalisme par des citoyens qui se sont mobilisés pour les repousser énergiquement. Ainsi, des individus munis d'armes blanches, étrangers au quartier de Bologhine et voulant s'attaquer vendredi soir à un magasin d'appareils électroménagers, ont été chassés par des jeunes de ce même quartier. Le même sens civique a été également constaté à Bab El Oued où des habitants se sont mobilisés pour protéger les biens privés et publics du pillage. A El Biar, sur les hauteurs d'Alger, des jeunes sont intervenus pour empêcher des délinquants de vandaliser un magasin de prêt-à-porter. A Oran, dans la commune de Sidi Chahmi, des citoyens ont empêché des manifestants de s'en prendre à l'agence CNAS. Même constat à travers plusieurs quartiers de la ville d'Oran ayant connu des foyers de tension, à l'exemple de haï Daya (Petit Lac), Es Seddikia et El Hamri. « Nous sommes pour une manifestation pacifique car la hausse des prix nous touche tous, mais il n y a pas de place aux casseurs parmi nous. Nous refusons que la manifestation de notre malaise soit exploitée par des forces occultes». A crié une femme à El Hamri. La classe politique appelle au calme et exprime sa préoccupation La classe politique algérienne a, dans son ensemble, appelé samedi au calme et exprimé sa «préoccupation» face aux protestations qui se sont déroulées dans des villes et localités du pays, tout en condamnant les actes de violence et de vandalisme. Le Rassemblement national démocratique (RND) a ainsi fait part de ses «profonds regrets» et de son «indignation» et dénoncé les «provocations de certains lobbies de la spéculation» qui profitent de la situation «en manipulant les jeunes et en se jouant du pouvoir d'achat des citoyens pour préserver leurs intérêts». Le porte-parole de ce parti, M. Miloud Chorfi, a appelé les jeunes à «la raison, à la clairvoyance et à la vigilance». Il a mis en garde, en outre, «les auteurs de ces manipulations contre les graves répercussions de leurs agissements». De son coté, le Mouvement de la Société pour la Paix (MSP) a appelé le gouvernement, les partenaires sociaux et les associations de protection du consommateur à «atténuer les tensions sociales» à travers des mesures urgentes dont «le plafonnement des prix» des produits de large consommation. Déplorant la destruction des biens publics et privés, le MSP a appelé au «calme et à la retenue tout en privilégiant un large dialogue social». Le parti du Front de libération nationale (FLN) a dénoncé, quant à lui, «toutes formes de vandalisme, de pillage et de banditisme qui ont causé des dégâts importants aux infrastructures publiques, aux biens privés et aux intérêts des citoyens». Il a, dans le même temps, reconnu la «justesse» des revendications concernant «la hausse subite de certains produits alimentaires», estimant, cependant, que la protestation «doit se faire de manière pacifique et civique». Le FLN a appelé aussi à combattre «avec la plus grande fermeté» la spéculation, le monopole et la corruption et invité toutes les forces nationales à faire preuve de vigilance afin de «barrer la route à ceux qui cherchent à exploiter ces évènements à des fins qui ne servent ni l'intérêt du pays ni celui des citoyens». le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a estimé, pour sa part, que «ces manifestations qui sont la conséquence d'une inflation débridée, connaissent aussi des raisons plus profondes». Le RCD a relevé que «la fermeture de tout espace d'expression et d'organisation autonomes ne laisse que l'émeute et la rue comme moyen et place pour la contestation». La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Mme Louisa Hanoune, a plaidé, elle, pour l'ouverture «des canaux de communication et de dialogue avec les jeunes». Le FFS a plaidé pour la prise de «mesures d'ouverture politique» portant sur «la levée de l'état d'urgence, le rétablissement des libertés civiles, l'ouverture du champ médiatique et la garantie des droits d'association et de manifestation», et mis en garde contre les risques de «dérapages violents».