La course au pouvoir est désormais ouverte en Egypte. Elle l'est plus encore depuis la « journée du départ », ce vendredi à l'occasion d'une des plus grandes manifestations contre le régime en place depuis presque trois décennies. Et plus encore depuis que le chef de la Maison Blanche s'est déclaré prêt à bousculer un peu plus le départ de Hosni. Le tout dernier arrivé sur la pré-liste des candidatures n'est autre que le secrétaire général de la Ligue arabe. Celui que l'occident qualifie d'ores et déjà de " fringant et populaire " Amr Moussa qui tente un retour sur la scène politique de son pays à l'occasion des manifestations anti-Moubarak, en n'excluant pas de jouer un rôle dans une transition tout comme El Baradei. Profitant de la contestation sans précédent contre le régime d'Hosni Moubarak, M. Moussa, dont le mandat s'achève dans deux mois, n'a pas exclu ce vendredi de se porter candidat à la présidence. "Je suis à la disposition de mon pays bien sûr. Mais on va voir les développements politiques. Je suis prêt à servir comme un citoyen qui a le droit d'être candidat", a-t-il déclaré. Interrogé sur une possible candidature à la présidentielle, il a répondu: "Pourquoi dire non?", en n'écartant pas non plus la possibilité d'intégrer un éventuel gouvernement de transition. Le secrétaire général de la Ligue arabe a aussi déclaré le 1er février appuyer "les jeunes qui manifestent et leurs revendications". Tous les candidats qui n'ont pas caché leur disposition et leurs vœux les plus chers de défendre la patrie parlent et martèlent sans cesse " la Patrie avant tout en passant d'une ère révolue à une ère capable de prendre en charge les causes de la mal-vie pour des solutions durables au profit du peuple égyptien dans sa globalité en combattant la corruption, en développant la lutte contre le chômage et surtout la dignité. Si El Baradei semble assez proche de Barack Obama en personne comte tenu de son rôle au sein de l'AIEA, Amr Moussa, qui vient de s'afficher ouvertement ce vendredi au sein des manifestants qui réclament le départ immédiat de Hosni Moubarak, se positionne à l'autre extrême. Colère et frustration Vif d'esprit, toujours très dynamique et doté d'un solide sens de l'humour, ce diplomate chevronné qui apprécie les médias doit notamment sa popularité en Egypte à ses prises de position critiques à l'égard d'Israël et des Etats-Unis. Mais ce sont précisément ces positions qui pourraient ne pas lui valoir le soutien des Occidentaux. En janvier, lors d'un sommet économique arabe à Charm el-Cheikh qui se tenait quelques jours après la fuite du président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali sous pression populaire, M. Moussa avait appelé à répondre à "la colère et la frustration sans précédent" de la population dans le monde arabe. Son appel, tranchant avec la réserve des dirigeants arabes qui craignaient une contagion, avait rencontré un écho positif dans l'opinion publique arabe. "L'âme arabe est brisée par la pauvreté, le chômage et le recul des indices de développement", avait-il lancé. Ce vendredi, à son arrivée place Ettahrir pour parler aux manifestants, certains d'entre eux criaient: "Allez Moussa, prends les choses en main". La course à la présidence en Egypte semble donc ouverte en attendant le retrait pur et simple de celui qui a usé le pouvoir et son peuple. Entre temps, les Frères musulmans, eux non plus, ne sont pas restés dans l'ombre. Dès les premières manifestations, ils se sont affichés comme pour se ressourcer de leur petite vie et ont même failli récupérer le mouvement de protestation à l'image de ce qui s'est passé dans certains pays musulmans. De son côté, Mohammed Badie, le chef des Frères musulmans, a déclaré ce vendredi qu'il était prêt au dialogue avec le vice-président Omar Souleimane mais après le départ du président Hosni Moubarak. M. Badie, interrogé sur la chaîne de télévision satellitaire du Qatar Al-Jazira, a aussi appelé à "une période transitoire que dirigera le vice-président avec un plein mandat". C'est la première fois que la confrérie islamiste s'exprime publiquement depuis le début de la contestation populaire contre le régime de M. Moubarak le 25 janvier. "Nous sommes pour le dialogue avec quiconque veut mener des réformes dans le pays, après le départ de cet injuste, ce corrompu et ce tyran", a déclaré M. Badie, en référence à M. Moubarak. "Une seule revendication. Qu'elle soit satisfaite et nous nous engagerons ensuite dans le dialogue", a-t-il ajouté, en réponse à une question sur la disposition des Frères musulmans à engager le dialogue avec M. Souleimane. Le départ de M. Moubarak après 29 ans au pouvoir "est une revendication de tout le peuple. Qu'il parte aujourd'hui. Qu'il ne reste pas une heure de plus. Que ce régime corrompu parte aujourd'hui", a dit M. Badie, ajoutant qu'"il y aura ensuite une période transitoire que dirigera le vice-président avec un plein mandat". Le pouvoir égyptien a, à de multiples reprises, accusé la confrérie de chercher à tirer profit des manifestations qui se déroulent à travers le pays, agitant le spectre d'une prise de pouvoir par les islamistes. Officiellement bannis de la sphère politique, les Frères musulmans sont tolérés dans les faits en Egypte, où ils disposent d'influents réseaux d'aide sociale.