Le procès, tant attendu, du baron du kif surnommé «Largo», la présumée «tête pensante» d'un grand réseau de trafic de drogue et de contrebande de véhicules en provenance d'Europe via le Maroc, qui devait avoir lieu en fin de semaine écoulée, a été reporté par le tribunal criminel d'Oran, à la prochaine session. L'affaire a été renvoyée, sine die, pour des raisons de santé. A côté du mis en cause principal, de son vrai nom B.S. Ahmed, la cinquantaine, poursuivi pour «détention et trafic de drogue et de produits psychotropes, association de malfaiteurs», il y a une autre accusée, l'ex-chef du service de la circulation des véhicules de la wilaya d'Oran, B.Kh, sous contrôle judiciaire, inculpée de «faut et usage de faux dans des documents administratifs». Grièvement malade, l'accusé, était dans l'incapacité de répondre de ses actes devant la justice. Après les formalités d'usage pour la nomination des jurés, le président d'audience appelle l'accusé. Masque vert sur le visage en raison de sa maladie infectieuse et contagieuse, la tuberculose vraisemblablement, «Largo» peine à se relever. La silhouette longiligne de plus de deux mètres met bien du temps pour rallier la barre. Tête baissée, jambes écartées, il s'appuie avec ses longs bras sur le bois. Crâne bossué, yeux mi-clos, visage, ou du moins sa partie non voilée par le masque, épouvantablement balafré…Bref, un faciès de rêve pour les criminologues! D'entrée de jeu, l'avocat de la défense demande le report du procès car «mon client est atteint d'une grave maladie et se trouve dans l'incapacité totale d'être jugé aujourd'hui. Moi-même je n'ai pas pu lors des visites que je lui ai rendues à la maison d'arrêt en tirer grand-chose. Donc, moi-même, je ne suis pas prêt pour plaider ce dossier aujourd'hui». Demande accordée par le tribunal au bout d'une courte séance de délibération. Filé par la brigade «anti-stup», Largo, présenté par les services de sécurité comme un caïd du kif dans la région Ouest et au-delà, tomba dans le filet le 29 septembre 2007, à Oran. La perquisition de son domicile se solda par la découverte d'un demi-quintal de résine soigneusement enfouie dans un cachot muré. Sans compter sur les diverses méthodes policières pour amener l'accusé à cracher le morceau, il aura fallu des chiens renifleurs et le «flair» des flics expérimentés dans ce genre d'affaires pour déceler la drogue emmurée. Ce n'est pas tout, les policiers ont également trouvé une mallette «magique» pleine de faux documents (permis de conduire, cartes grises, passeports) et toute une panoplie de cachets et de griffes contrefaits, de la wilaya d'Oran pour la plupart, ainsi qu'une somme de 197.000 DA. Ainsi, la police -parvint-elle à la dernière pièce lui permettant de reconstituer le puzzle- d'un grand réseau de trafic de drogue et de véhicules volés ou provenant d'Espagne par la contrebande via le Maroc et le port d'Oran. En effet, selon le dossier d'enquête transmis à la justice, pas moins de 10 véhicules ont été saisis en possession de ce groupe criminel, dont une Mercedes, BMW, Peugeot 407 et Laguna, avec de fausses cartes grises. C'est Largo lui-même qui contrefaisait le numéro de chassie en effaçant l'original et en frappant à sa place un faux. D'autres membres du réseau, au nombre de 10, ont été jugés en août 2008 et condamnés entre 10 et 12 ans de réclusion par le tribunal criminel d'Oran. Notons enfin que plusieurs témoins sont cités dans cette affaire qui n'a pas encore livré tous ses secrets…Dossier à suivre !