La mise en place de cellules de «veille stratégique» dans chaque ministère et dans chaque institution publique en Algérie, un des objectifs du programme du Gouvernement, devra permettre au pays d'ajuster «à temps» ses politiques sectorielles, a indiqué dimanche à Alger le secrétaire d'Etat auprès du premier ministre chargé de la prospective et des statistiques, M. Bachir Messaitfa. La veille stratégique, qui consiste à «collecter et à diffuser en permanence des données de haute valeur contribuant à la prise de décision», permettra à l'Algérie de «détecter les menaces et les opportunités à l'échelle régionale et internationale et évitera au gouvernement de revenir demain sur des décisions prises aujourd'hui», a souligné M. Messaitfa à l'ouverture d'un atelier international sur la veille stratégique institutionnelle, organisé par son département avec le concours de la commission européenne et le programme P3A. «Si nous avions eu un système de veille dans les années 1980, nous aurions pu anticiper la baisse des cours mondiaux de pétrole et prendre les bonnes décisions à l'époque», a-t-il regretté en estimant que l'information économique est aujourd'hui une partie intégrante du capital économique dans le monde. La mise en place d'un tel système permettra dès lors aux institutions algériennes de «saisir les signaux faibles des changements qui s'opèrent dans l'environnement économique, social et culturel et d'ajuster par la suite les politiques publiques sectorielles mise en œuvre», a-t-il argumenté. «Notre objectif est de voir les différents secteurs adopter une approche scientifique en termes de prise de décision, basée sur l'économie du savoir, la bonne gouvernance et sur une information économique fiable», a-t-il dit. Le département de M. Messaita, doté d'une sous-direction de la veille économique, se propose ainsi d'accompagner les autres départements ministériels dans la mise en place de cellules de veille stratégiques au sein de leurs institutions ainsi que dans la formation de leurs cadres, a fait savoir le ministre. Le représentant de l'Association Internationale Francophone d'intelligence économique, Philippe CLERC, a souligné de son côté que la veille stratégique permet à «l'Etat stratège», aux décideurs mais aussi aux chefs d'entreprises de détecter les signes d'alertes précoces annonciateurs d'une transformation, d'une rupture, d'un risque ou d'une occasion». Elle constitue ainsi une «démarche essentielle, un véritable avantage compétitif pour ceux qui la maîtrisent et l'utilisent», et un moyen efficace d'éviter la «surprise stratégique», selon l'expert français. Le modèle de veille stratégique, qui conduit donc à l'intelligence économique, diffère cependant d'un pays à l'autre et d'une région à l'autre, a-t-il fait remarquer. L'Europe du Nord et les Etats-Unis ont développé, selon M. Clerc, des capacités de réflexion stratégique et de prospective axées sur les «problématiques globales» comme le prouvent les multiples scénarii sur l'avenir du monde et les recommandations relatives aux stratégies économiques et sociales. Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) adoptent par contre une approche « développementaliste», qui cherche à garantir la souveraineté et l'influence de ces pays dans leurs zones stratégiques, d'où leurs préoccupations relatives aux grands défis internes de lutte contre la pauvreté, d'élévation du niveau d'éducation et d'accès à la santé. Durant deux jours, l'atelier animé par des experts européens permettra aux participants, des représentants des administrations, de comprendre la manière dont se collecte l'information stratégique en utilisant les outils numériques et l'internet notamment afin d'arriver à maîtriser la «E-veille».