Dans un marché mondial très tendu, qui a vu le prix du baril doubler en un an pour frôler les 140 dollars la semaine dernière, des représentants de l'Union européenne et de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) se sont réunis hier à Bruxelles pour leur "dialogue" annuel. Le président de l'Opep, M. Chakib Khelil, était présent, accompagné du secrétaire général de l'organisation, le Libyen Abdallah Al-Badri, ainsi que du vice-président, l'Angolais Desidério da Graça Verissimo da Costa. Face à une Europe qui a mis à profit cette réunion pour exprimer à nouveau ses préoccupations face aux prix élevés du pétrole, l'Opep a, pour sa part, présenté son analyse sur les perspectives mondiales du marché pétrolier. L'Opep est très préoccupée par la hausse des prix du pétrole sur le marché mondial qui réduit considérablement la demande, a annoncé M. Chakib Khelil. "Nous sommes préoccupés par les prix actuels qui réduisent la demande. Pourtant la chute de la demande pourrait réduire les prix", a déclaré M. Khelil à l'issue de sa rencontre avec les représentants de l'UE. L'Opep n'a pas l'intention d'augmenter les volumes d'extraction de pétrole, a-t-il assuré. Selon lui, le marché pétrolier connaît actuellement un équilibre entre l'offre et la demande, et l'organisation possède des réserves pétrolières nécessaires. La hausse des prix du marché peut être provoquée par une crise économique aux Etats-Unis et leur niveau dépendra, notamment, du taux de dollar en juillet prochain. Avant d`entamer la réunion, le président de l'Opep avait indiqué que "l'Opep a déjà fait ce qu`elle peut faire et les prix ne vont pas baisser". Concernant les tensions géopolitiques, notamment celles autour du dossier iranien, M. Khelil a souligné que "l'Opep ne peut pas influencer la situation géopolitique, pourtant si la menace contre un des pays producteurs de pétrole est réelle, le marché réagira". Le secrétaire général de l'organisation, le Libyen Abdallah el-Badri, a pour sa part confirmé que "nous (les membres de l'Opep) ne voulons pas accroître la production". "Il n`y a pas de pénurie", a-t-il jugé. Pourtant, le commissaire européen à l`Energie, Andris Piebalgs avait indiqué qu`il allait réitérer sa demande d`un accroissement de la production pétrolière. "Il n`y a pas de raison de conserver des plafonds de production", avait-t-il commenté, en jugeant que la spéculation sur les marchés ne jouait pas "un rôle majeur" dans la hausse des prix. Premier fournisseur de pétrole de l'Union européenne, l'Opep attribue la hausse des prix à la spéculation financière et à la baisse du dollar. Alors que l'UE cherche à maîtriser l'inflation, au plus haut depuis seize ans, M. Chakib Khelil n'hésite pas à critiquer l'attitude de la BCE, qui fait baisser le dollar en adoptant une politique plus restrictive. Le dialogue entre producteurs et consommateurs, qui s'accentue actuellement, semble buter sur la même problématique du diagnostic. Déjà dimanche, lors d'une réunion internationale à Djeddah (Arabie Saoudite) entre pays producteurs et consommateurs, les producteurs ont estimé que la flambée actuelle des prix résulte de la spéculation, de la faiblesse du dollar et de l'instabilité géopolitique dans certaines régions. Les pays consommateurs, de leur côté, considèrent que le principal problème réside dans l'insuffisance de l'offre. Un débat qui risque encore de se poursuivre puisque les principaux producteurs et consommateurs de pétrole, réunis à Djeddah, devraient tenir une réunion de suivi en octobre à Londres. Selon le ministre indien du Pétrole, Murli Deora, "ceci est le début d'une initiative (...) A Londres en octobre, il y aura une deuxième réunion", a-t-il dit.