Par Faouzia Belkichi L'Organisation mondiale du commerce (OMC) joue son va-tout. Une trentaine de ministres tenteront de redonner vie au Cycle de Doha à Genève, cette semaine, qui risque toutefois bien d'être celle de son enterrement. Symbole de la globalisation, Doha promettait de la prospérité partagée pour tout le monde. Cette notion n'est aujourd'hui plus de mise. Dans le dossier "Agriculture", clé de voûte du Cycle de Doha et source potentielle de revenus supplémentaires pour l'Asie, l'Afrique et l'Amérique du Sud, les grandes puissances s'aménagent toutes sortes d'exceptions pour pouvoir continuer à se protéger contre la concurrence. Pour ce qui est de la libéralisation des marchés des "Produits industriels" et des "Services", elles exigent un maximum d'ouvertures. Washington et Bruxelles peuvent tenir cette posture sans difficulté. Leurs opinions publiques les soutiennent. Les altermondialistes, les syndicalistes et la jeunesse idéaliste n'ont plus besoin de descendre dans la rue pour protester contre la mondialisation. Leurs dirigeants politiques se retrouvent sur la même longueur d'onde. Aux Etats-Unis, en pleine campagne pour la présidentielle, le discours protectionniste est déroutant. L'Europe, dont les entreprises sont conquérantes dans leurs prises de participations à l'étranger, a dressé une liste de champions nationaux à protéger. Elle reprend le discours lié à la préférence communautaire. Des intellectuels, hier grands défenseurs du libre-échange, retournent leur veste. Pour l'Américain Paul Samuelson, la globalisation favorise les pays émergents sur le dos des travailleurs américains. Larry Summers, connu comme le "Mr Globalization" de l'administration Clinton, milite désormais pour l'application des normes sociales et environnementales pour freiner le commerce mondial. Telle est l'ambiance générale dans laquelle l'OMC et son directeur, Pascal Lamy, font le pari de sauver le Cycle de Doha cette semaine à Genève. Semaine périlleuse, donc.