Le Canada risque de faire face à une grave crise alimentaire. Contrairement à ce qui se passe dans les pays du tiers-monde, où la crise a été induite par la hausse des prix des produits de base, la crise qui risque de sévir au Canada est due à la listériose qui y sévit depuis un mois. La listériose est une maladie d'origine alimentaire, qui peut entraîner une forte fièvre, des maux de tête violents, une raideur de la nuque et des nausées. C'est une maladie infectieuse souvent mortelle pour les jeunes enfants, les personnes âgées ou celles dont le système immunitaire est affaibli à l'instar de la femme enceinte, avec un délai d'incubation pouvant aller jusqu'à huit semaines. Actuellement, sur les 26 cas de listériose confirmés au Canada, douze ont entraîné la mort dans des conditions encore à l'étude et 29 cas suspects supplémentaires ont été recensés. L'aggravation soudaine du bilan de 4 à 12 morts lundi est due en partie au fait que les autorités ont modifié leur méthode de calcul et comptent désormais les décès dans lesquels la bactérie listéria aurait joué un rôle. Dans six de ces décès signalés dans la province d'Ontario, il a été établi que la listériose était une "cause sous-jacente du décès ou y avait contribué". Dans les autres cas, le rôle exact du listéria est encore à l'étude. Les autorités sanitaires n'ont toutefois donné aucune précision sur l'identité ou même l'âge des victimes. Vingt-neuf cas suspects supplémentaires, dont 13 en Ontario et 10 au Québec, ont d'autre part été recensés. Plusieurs provinces canadiennes sont touchées, dont le Québec. Ce premier bilan justifie les craintes exprimées par la presse et a conduit l'Agence d'inspection des aliments du pays, l'ACIA, a publier des listes de produits qui pourraient être contaminés par la bactérie " listeria monocytogène " incluant des produits de grande consommation, notamment des sandwiches préparés dans plusieurs provinces, afin de mettre en garde les consommateurs à risque.Les pouvoirs publics ont réagi et le Premier ministre canadien s'est déclaré vivement préoccupé ; en insistant lors d'une conférence de presse, sur la nécessité de réformer le système d'inspection des aliments. Cependant, seul l'autocontrôle au sein des usines est efficace, par l'analyse sur place des prélèvements effectués tout au long du cycle de production, à l'arrivée des matières premières et sur les produits finis avant leur sortie d'usine. Les produits stérilisés doivent être classés " indisponibles " pendant une période d'incubation, variable selon les produits, avant d'être mis dans le circuit commercial, après d'ultimes analyses. Un problème particulier se pose au sujet des produits frais, à base de viande, dont le délai de péremption est trop court, pour les soumettre à une période d'incubation, ce qui oblige les industriels à faire effectuer les prélèvements pour contrôle bactériologique chez les revendeurs. Les premiers cas de listériose avaient été signalés fin juillet à Toronto, mais la crise a éclaté la semaine dernière lorsque la compagnie Maple Leaf a annoncé le rappel de certains produits et la fermeture temporaire d'une de ses usines. La semaine dernière, les autorités sanitaires ont confirmé l'existence d'un lien entre les produits fabriqués dans cette usine et la souche de la listeria monocytogène. Maple Leaf, l'un des principaux producteurs de produits de viande emballée, a alors élargi son rappel aux quelque 220 produits fabriqués dans l'usine infectée, une mesure dont il estime le coût à au moins 20 millions de dollars. Un expert cité par le National Post a évoqué la possibilité que la bactérie ait muté. Il a estimé que les systèmes de contrôle de la nourriture étaient insuffisants. "On surveille à peine 2% de ce qu'on mange", a fait valoir un autre expert cité par La Presse.