Le ministre français de l'Agriculture Dominique Bussereau a dénoncé lundi à Bruxelles, la “méthode de travail inacceptable” du commissaire européen au Commerce Peter Mandelson, lors des discussions sur l'OMC qui se sont tenues en marge du forum de Davos. M. Mandelson, qui mène au nom de l'UE les négociations à l'Organisation mondiale du Commerce (OMC), "a fait circuler des textes", s'est livré à "des confidences publiques ou semi-publiques" "sans que les Etats (membres de l'UE) soient au courant": "C'est une méthode de travail tout à fait inacceptable", a déclaré M. Bussereau lors d'une conférence de presse en marge d'une réunion des ministres européens de l'Agriculture. "Il a eu pour le moins un comportement agité à Davos", a-t-il ajouté. Samedi, lors du forum économique mondial de Davos (Suisse), les grands acteurs du commerce mondial (UE, Etats-Unis, grands pays émergents comme l'Inde et le Brésil) ont décidé de relancer au printemps prochain les négociations du cycle de Doha, enlisées depuis juillet 2006. M. Mandelson a réaffirmé à Davos sa disposition à réduire de moitié les droits de douane sur les produits agricoles, alors que la France s'oppose à une baisse de plus de 39%, rappelant les limites du mandat de négociations confié à la Commission. "Toute autre offre serait hors mandat", a insisté M. Bussereau. M. Bussereau a affirmé que souscrire aux propositions du G20 aurait pour conséquence "un effondrement de la production de viande européenne, des effets dramatiques sur les céréales, et en Europe une baisse de 20 à 25% du revenu agricole et la perte de 500.000 emplois dans le secteur agro-alimentaire". Le groupe de pays émergents du G20, qui comprend en fait actuellement 23 pays, regroupe de grands producteurs agricoles comme le Brésil et l'Inde, qui en sont les deux principaux animateurs, ainsi que la Chine, le Pakistan, l'Indonésie, le Chili ou le Mexique. Ils réclament un meilleur accès pour leurs produits agricoles dans les pays riches, tandis que les Etats-Unis et l'Union européenne veulent vendre davantage de produits industriels et de services aux marchés émergents. M. Bussereau s'est par ailleurs défendu de tenir une position électoraliste sur l'agriculture, à l'approche de la présidentielle française au printemps prochain. "Nous ne défendons pas cette position parce que nous sommes en période pré-électorale, mais parce qu'on l'a toujours défendue", a-t-il plaidé, rappelant que la France était "la première puissance agricole européenne, le deuxième exportateur mondial", et que "14% des emplois en France dépendent du secteur agricole". Pour sa part, le président du Brésil, M. Luiz Inacio Lula da Silva, s'est déclaré lundi optimiste sur la relance des négociations du cycle de Doha de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), tout en avertissant qu'un nouvel échec équivaudrait à la perte de crédibilité de l'Organisation. "Je suis plus optimiste au sujet du cycle de Doha, parce qu'il y a une volonté politique que les choses aboutissent", a-t-il déclaré lors de son programme hebdomadaire radiodiffusé "Café avec le président". Si un accord sur le commerce n'intervient pas maintenant, "l'OMC va perdre sa crédibilité, c'est a dire que le gens vont se demander pourquoi elle existe", a-t-il mis en garde. Le président brésilien a souligné l'importance de l'introduction dans les débats au sein de l'OMC du concept de développement. D'après lui, "il ne servirait à rien que les pays riches pensent qu'ils vont aider les pays pauvres en leur donnant un peu d'argent. Non, il vaut bien mieux investir dans des projets de développement des pays plus pauvres". Le Brésil est l'un des principaux animateurs du G20, le groupe des pays émergents revendiquant au sein de l'OMC l'ouverture des marchés agricoles des pays riches. "Je suis convaincu que si nous ne parvenons pas à un accord de commerce permettant l'accès des pays pauvres aux marchés agricoles des pays riches, nous vivrons un siècle de plus en constatant que les pays les plus pauvres s'appauvrissent encore plus".