Le négociateur européen, Peter Mandelson, juge une entente possible la semaine prochaine à Genève sur le round de Doha, pour autant que Bruxelles obtienne des contreparties. «Tuer les rumeurs!» Interrogée sur sa priorité, avant la rencontre ministérielle de la semaine prochaine à Genève, la commissaire européenne à l'agriculture Marianne Fisher-Boel a, avant tout, réclamé de la sérénité. Les ministres européens chargés des dossiers commerciaux doivent confirmer aujourd'hui à Bruxelles le mandat du négociateur de l'UE Peter Mandelson. Lequel est, depuis plusieurs semaines, dans le collimateur de Nicolas Sarkozy, à qui il a plusieurs fois reproché de «saper» son autorité à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). A en croire Bruxelles, la porte est ouverte pour un accord. «Nous ferons le maximum. A condition bien sûr d'obtenir des contreparties», a promis hier Peter Mandelson. L'Union vient d'accepter pour cela la proposition - mise sur la table par le directeur de l'OMC Pascal Lamy - de réduire de 34% d'ici 2015 ses droits de douane sur les importations de bananes, dénoncés depuis des années comme trop élevés par les pays d'Amérique latine. Cette nouvelle concession agricole, qui heurte en réalité surtout les fournisseurs traditionnels de bananes que sont les pays africains et caraïbes, montre, selon l'UE, que la balle est maintenant dans le camp des grands pays émergents (Chine, Brésil, Inde). A eux d'offrir en échange un accès accru à leurs marchés de biens industriels et de services. Le fait que l'Europe reprenne l'offensive est nouveau. Au printemps, le ton était carrément pessimiste à Bruxelles. Et l'échec du référendum irlandais, dans lequel les inquiétudes des agriculteurs ont pesé, est considéré comme un boulet. Mais deux facteurs ont joué en faveur de Peter Mandelson. Nicolas Sarkozy est bloqué Le premier est l'accession de la France à la présidence semestrielle de l'UE. Les critiques de Nicolas Sarkozy contre le négociateur européen ont amené plusieurs pays «libre-échangistes» à serrer les rangs. Au point que six ministres ont publié une tribune en sa faveur dans la presse. «Sarkozy est bloqué, juge un diplomate. Aller plus loin reviendrait à provoquer les moins protectionnistes de ses pairs.» Le second facteur est le calendrier américain. Si un accord n'intervient pas à l'OMC, affirme Peter Mandelson, la nouvelle loi agricole (Farm Bill) votée par le Congrès - qui prévoit d'importantes subventions - entrera en vigueur. «Or nous n'obtiendrons rien des Etats-Unis sur le plan bilatéral. Nous avons donc besoin de Doha», estime ce dernier. La bagarre au sein de l'UE, n'est toutefois pas terminée. La commission a encore repoussé, hier, les affirmations selon lesquelles un accord à l'OMC conduirait à une diminution de 20% de la production agricole européenne et à la perte de 100000 emplois. Enfin, l'hypothèse d'une intox communautaire destinée à faire porter la responsabilité d'un éventuel échec sur les pays émergents n'est pas exclue. «Nous ne leur demandons pas des concessions à parité, répète Peter Mandelson, mais des efforts équitables»