Malnutrition, retard de croissance chez les enfants, taux de mortalité infantile élevé... Des décennies de violence et les plus récents bouclages frontaliers dans les Territoires palestiniens ont débouché sur des problèmes de santé majeurs au sein de la population, selon une vaste étude publiée jeudi dans "The Lancet". Ces recherches, présentées par la revue médicale dans un numéro spécial, s'accompagnent d'un éditorial exhortant à un accord de paix pour améliorer la santé des Palestiniens. "La situation sanitaire dans les territoires occupés palestiniens montrent l'urgence de trouver une solution politique", écrit l'ancien président américain Jimmy Carter dans cet éditorial. Quant au rédacteur en chef Richard Horton, il souligne en introduction que "la santé offre une nouvelle voie" pour "un nouveau dialogue en faveur de la paix et de la justice". Mais ce dossier n'est pas du goût d'Israël: Mark Regev, porte-parole du gouvernement, l'a jugé partial. "C'est de la propagande sous couvert de rapport médical", a-t-il lancé. Selon les experts internationaux auteurs de cette étude, la malnutrition est en hausse dans la Bande de Gaza, où elle a conduit à une augmentation du taux de retard de croissance chez les enfants, passé d'environ 8% en 1996 à 13% en 2006. Dans certains endroits du territoire, la malnutrition est si importante que ce taux atteint 30%. Les cinq articles composant le dossier mettent en avant de profondes disparités sanitaires entre les Palestiniens et d'autres populations du Proche-Orient. Dans la Bande de Gaza, le taux de mortalité infantile est estimé à 27 pour 1.000 en 2006, contre près de quatre pour 1.000 en Israël, chiffre comparable à celui de la plupart des pays occidentaux. Après plusieurs décennies d'amélioration, les taux de mortalité infantile dans les Territoires palestiniens ont commencé à stagner dans les années 1990. Et, entre 1990 et 2005, les Territoires présentaient la diminution la plus faible des taux de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans, soit une chute de 2%. Dans le même temps, les taux de mortalité chez les moins de cinq ans chutaient de 70% en Egypte, et de près de 50% en Irak. Pour Mark Regev, la situation en matière de mortalité infantile dans la Bande de Gaza n'a rien à voir avec Israël. Et de montrer du doigt le "régime du Hamas", aux commandes du territoire côtier depuis juin 2007. "Au lieu d'investir dans la santé publique, ils ont investi dans la violence et le conflit", a-t-il accusé, jugeant que l'influence d'Israël était elle bénéfique, nombre de Palestiniens ayant été soignés dans des hôpitaux israéliens. Après l'arrivée au pouvoir du Hamas, Israël a bouclé les points de passage, laissant seulement passer des quantités limitées d'aide et de marchandises. Les spécialistes travaillant dans la région ont déclaré ne pas être surpris par les résultats publiés par le "Lancet". Coordinatrice médicale de Médecins sans frontières (MSF) pour les territoires palestiniens, Cécile Barbou souligne que les trois semaines d'offensive israélienne contre le Hamas qui se sont achevés le 18 janvier ont fait grimper les niveaux de stress au sein de la population. Les chiffres montrent que 1.000 femmes de plus que d'habitude avaient accouché en janvier, des naissances prématurées qu'elle attribue au stress des combats et bombardements. Le Dr Guido Sabatinelli, directeur de la santé à l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), n'est pas optimiste sur les perspectives de paix. L'aide s'est heurtée à des "obstacles accrus" et "les Palestiniens sont complètement dépendants de l'aide humanitaire", note-t-il. "Il est temps pour la communauté internationale d'agir", ajoute-t-il. "Quand je voyage là-bas, je ne vois pas d'espoir dans les yeux des gens".