La crise financière mondiale actuelle est-elle sur le point d'avoir des retombées sur les investissements engagés par les milieux d'affaires du Golfe dans les trois pays du Maghreb (Algérie, Tunisie et Maroc) ? La question mérite d'être posée à partir du moment où plusieurs investisseurs saoudiens, émiratis ou koweitiens semblent tirer graduellement le frein des flux des capitaux qu'ils ont investis dans cette région. L'inquiétude est partie de Tunis depuis quelques mois. En effet, Sama-ECH Tunisia, une société pour l'investissement dans le secteur de l'immobilier en Tunisie, a été créée en 2007 par le groupe émirati Sama Dubaï, en partenariat avec le groupe britannique EC Harris0. La nouvelle société en question devait superviser la construction d'un gigantesque complexe immobilier en Tunisie, mais elle a été dissoute au mois de janvier dernier. Et la nouvelle n'a pas manqué d'affoler les milieux d'affaires tunisiens. D'autant plus que le mégaprojet, baptisé Porte de la Méditerranée, devait engloutir 25 milliards de dollars pour faire émerger une ville nouvelle près de Tunis, et créer 130 000 emplois. L'information, dévoilée par la presse locale, a été confirmée par la major- mondiale de la promotion immobilière, qui n'a pas souhaité apporter d'autres précisions sur la dissolution de sa filiale tunisienne et les raisons du retard du lancement des travaux, initialement prévu en mars 2008. La mise en veilleuse de ladite société en Tunisie est à ajouter au même registre que les groupes arabes ayant déjà annoncé le gel de leurs activités en Algérie pour des raisons liées exclusivement à la santé financière des sociétés mères, plus que jamais rendues vulnérables dans le sillage de la conjoncture mondiale actuelle marquée par une crise latente. Du point de vue des experts et observateurs du marché financier international, en Algérie, où les engagements s'élèvent à près de 20 milliards de dollars, le groupe émirati Emaar aurait déjà mis en veilleuse certains de ses projets de construction de complexes immobiliers, selon la presse algérienne. Une décision suivie, selon la même source, par son compatriote Emirates International Investment Company (EIIC), engagé dans la réalisation du plus grand parc urbain au monde, à Alger, et le saoudien Sidar, qui envisageait d'aménager de nouveaux complexes touristiques sur les côtes algériennes. L'émirati Damac Properties avait été le premier à annoncer, en novembre 2008, le gel de ses projets immobiliers dans les trois pays du Maghreb. En tout cas, même les autorités officielles des pays du Golfe, qui sont les principaux bailleurs de fonds et qui contribuent à booster l'investissement direct étranger dans les pays maghrébins, reconnaissent sans ambages les retombées drastiques de la crise financière mondiale sur les économies arabes du Golfe. C'est le cas du ministre koweitien des Affaires étrangères, cheikh Mohammad Sabah al-Salem al-Sabah, qui a affirmé, récemment, que la crise a coûté aux monarchies pétrolières du Golfe une perte de 2 500 milliards de dollars depuis octobre 2008. La chute des cours du brut et les coupes dans la production décidées par l'Opep ont également considérablement réduit les ambitions des investisseurs arabes. Plusieurs professionnels de l'immobilier estiment, pour leur côté, que les difficultés liées aux exigences de rentabilité et la crise financière actuelle sont à l'origine du gel de la plupart des projets. M. Amani