A chaque visite de ministre français du domaine de l'économie le reproche fuse. Les entreprises françaises n'investissent pas assez en Algérie. Qu'en est-il des hommes d'affaires arabes ? En fait il est rare que les questions de journalistes portent un quelconque regret de ne pas les voir investir plus en Algérie. Un peu comme s'il n'y avait pas grand-chose à attendre de ses capitaux-là. Il fut même un temps, lors du premier mandat présidentiel de Abdelaziz Bouteflika, où le reproche inverse leur a été fait : « Ils veulent acheter l'Algérie. » Le bilan des engagements arabes en Algérie n'est pas perçu de la même manière de tous. Pour la technocratie des entreprises, les milieux d'affaires « historiques » tournés vers l'Occident, l'expérience de Orascom, de Wataniya et de Sedar le promoteur immobilier à capitaux saoudiens sont, pour ne citer que les porte-flambeaux des investissements arabes, une « heureuse surprise ». Plusieurs centaines de millions de dollars investis dans les services, une bonne qualité d'image, une dynamique de création d'emplois locaux : ils n'attendaient pas tant des Arabes en affaires. Pour d'autres, ce n'est pas assez. Le président Bouteflika en est. Il a toujours considéré comme un maître atout sa relation quasi filiale avec les cheikhs du Golfe. Il en espérait beaucoup. Or un chiffre l'afflige en particulier : les investissements arabes au Maghreb sont plus importants au Maroc et en Tunisie qu'en Algérie sur la période des six dernières années. Celle qui correspond en gros à l'ère de Bouteflika. Pourquoi ? L'amour-propre présidentiel l'aurait parfois conduit à en faire porter la responsabilité à un sabotage sournois de l'intérieur. Les officiels algériens ne font pas assez pour attirer les investisseurs arabes ? Dans le cas du grand bureau régional d'El Jazira group, c'est le président Bouteflika qui a refusé. Pas assez d'emplois directs créés ? L'attractivité algérienne est déjà suffisamment plombée par un déficit d'image. Elle n'a pas besoin en plus de décision de censure politique pour assombrir le tableau. Les engagements arabes vont monter en puissance dans les mois qui viennent. Peut-être avec un temps d'avance sur les flux de capitaux européens ou asiatiques. Les banques, les services divers, l'hôtellerie et le tourisme, la grande distribution et le divertissement peuvent changer de format si les projets arabes qui sont dans les caisses venaient à se concrétiser. Mais attention, c'est peut-être le moment venu de ne pas faire le pas de trop dans la danse du ventre, longtemps nécessaire pour faire tourner les regards vers l'Algérie. La vigilance à l'égard des mouvements des émirs arabes,citoyenne et bienvenue dans le cas de la protection de l'outarde illégalement traquée, est devenue excessive et douteuse, dans le cas du délit d'initié faussement prêté à Orascom dans l'attribution de la seconde licence GSM, pour laquelle l'Egyptien a déboursé 300 millions d'euros de trop. Un dossier en particulier va dans les semaines qui viennent donner des indications sur la tenue de la négociation algérienne avec les partenaires investisseurs arabes. Il s'agit de la colossale cession de la gestion du port d'Alger. C'est le numéro trois mondial de son métier Dubai World Ports qui est le mieux placé pour devenir le partenaire de l'entreprise du port d'Alger. Cela se fera-t-il après appel d'offres ou en gré à gré ? Il y a un important droit d'entrée à payer sur le premier port du pays amené à doubler son trafic conteneur sur cinq ans. Cadeau aux amis arabes ?