Le dossier a été excessivement politisé. Il n'est pas souvent appréhendé sous l'angle de l'indispensable amélioration du climat d'affaires en Algérie. La presse a annoncé entre autres un investissement en Algérie de 28, puis 50 milliards de dollars émanant du groupe émirati Emaar. Pour l'heure, cet engagement verbal est resté au stade des intentions. Il prévoyait l'aménagement de la baie d'Alger, une cité de la santé à Staouéli, la rénovation de la gare de l'Agha, des investissements immobiliers à la cité technologique de Sidi Abdallah, des infrastructures touristiques dans le complexe Colonel-Abbès non loin de Zéralda. Aucun accord ferme n'a été jusqu'à présent signé allant dans le sens de la concrétisation de ces projets ambitieux d'Emaar en Algérie. Selon différentes sources, Emaar se serait retiré en raison des pertes enregistrées sur le marché immobilier de Dubaï, conséquence de la crise financière mondiale. À noter que le contexte actuel n'est guère favorable. “Globalement le Moyen-Orient a été très sérieusement touché par la crise financière mondiale. Les fonds souverains des pays du Golfe sont pour l'instant assez touchés. Leurs investissements sont concentrés principalement dans l'immobilier. Ils ont donc pâti de la crise de l'immobilier dans le monde. Du reste, les banques au Moyen-Orient qui accompagnent les investisseurs arabes ont été touchées également par la crise. La tendance aujourd'hui est à un ralentissement des investissements des pays du Golfe dans la région. La ressource financière est moins disponible. Là où elle est disponible, elle s'investit dans des projets très rentables”, nous explique un expert financier international. Effet collatéral, la banque émiratie Essalem, une filiale du groupe Emaar, va-t-elle jeter elle aussi l'éponge ? En tout état de cause, cette banque à l'instar de la maison mère basée à Dubaï entretient un halo de mystère sur ses projets en Algérie. En revanche, la société émiratie EEIC, dont le siège est basé dans l'Emirat d'Abu Dhabi beaucoup moins touché par la crise financière mondiale que Dubaï, semble respecter ses engagements. Toute une campagne publicitaire affiche la présence effective de la société émiratie sur le terrain. Son plus grand projet jusqu'à présent est le parc Dounya, le futur poumon de la capitale. S'étendant sur 670 hectares, dont une grande partie sera boisée, dans les Grands-Vents situés à quelques encablures d'Ouled Fayet, il comprend des hôtels, un hôpital et une école internationale. D'un coût de 5 milliards de dollars, le projet compte également un terrain de golf, un centre équestre, un jardin botanique, de nombreux sentiers de promenade à pied ou à vélo. Autres projets d'EEIC : une ferme laitière de 10 000 vaches à Tiaret, conçue pour être la plus importante d'Afrique (un investissement de 200 millions de dollars), un hôtel de grand standing (investissement de 200 millions de dollars) à Moretti, une usine de câbles électriques (un investissement de 70 millions de dollars). Au demeurant, “le dossier a été excessivement politisé. On a mis en avant les investissements arabes en Algérie pour reprocher aux entreprises européennes leur timide ou faible implication dans le pays. On a également reproché à des investisseurs de ne pas joindre le geste à la parole alors que leurs projets ont buté sur des contraintes administratives ou des problèmes de foncier. Il convient de se demander pourquoi nombre de sociétés du Moyen-Orient ont investi en Tunisie et au Maroc et pas en Algérie», lance le même expert. Une question donc d'amélioration du climat d'affaires en Algérie. Le contexte était pourtant favorable. Depuis le 11 septembre, on a enregistré une grande volonté de la part des pays du Golfe d'investir dans les pays arabes. L'Egypte, le Maroc et la Tunisie ont réussi à drainer la plus grosse part. Quant à l'Algérie, entre 2000 et 2006, l'Andi a enregistré 6 milliards de dollars d'investissements arabes. En 2007, 5 milliards de dollars d'investissements arabes étaient à l'étude. L'investissement arabe en Algérie se concentre dans les télécommunications avec deux acteurs importants du marché de la téléphonie mobile Djezzy et Nedjma (respectivement l'Egypte et le Qatar), les banques (prédominance des banques arabes), l'immobilier (d'affaires et de tourisme), le transport maritime, les matériaux de construction (participations dans des cimenteries…) La population, qui entend parler depuis des années de dizaines de milliards de dollars d'investissements arabes, lasse des échos d'investisseurs en train de “vendre du vent”, attend du concret, veut surtout voir un impact de ces investissements sur ses conditions de vie. K. R.