Le Mouvement d'émancipation du delta du Niger (Mend), qui a déclenché il y a un mois une nouvelle " guerre du pétrole " dans le sud du Nigeria, menace de saboter le projet de gazoduc transsaharien, dont l'accord intergouvernemental a été signé vendredi entre le Nigeria, le Niger et l'Algérie. Selon un communiqué émanant de ce mouvement de rébellion, "tout argent placé dans ce projet sera jeté par les fenêtres, car nous ferons en sorte qu'il subisse un sort identique à celui que subissent aujourd'hui les autres gazoducs", a affirmé un courrier un courriel du Mend en référence à ses sabotages des installations pétrolières et gazières du sud du pays. "Dans les prochaines 72 heures, l'opération Hurricane Piper Alpha sera renforcée en une opération Hurricane Moses", avertit également le Mend, à propos de sa " guerre du pétrole " lancée dans le delta du Niger. Dans son courriel, le Mend accuse également les forces armées d'avoir enlevé un chef tribal, Isaac Thikan, un opposant au régime, et de le retenir prisonnier depuis le 24 juin dans le sud du pays. Depuis son apparition, début 2006, le Mend a multiplié les attaques, enlèvements d'expatriés et sabotages sur terre et sur mer. La production de brut du Nigeria a chuté de près d'un tiers et plafonne actuellement à 1,8 million de baril/jour contre 2,6 mbj trois ans plus tôt. Ce climat d'insécurité a poussé la plupart des multinationales à évacuer du delta du Niger, l'essentiel des personnels expatriés et leurs familles. Personne ne sait exactement qui se cache derrière ce groupe qui se présente comme le champion de la cause ijaw, une ethnie de 14 millions de personnes. Le Mend, qui opère dans une zone extrêmement difficile à sécuriser, essentiellement des marécages et des criques, présente ses hommes comme des "combattants de la liberté" qui ne veulent "pas tuer leurs frères militaires". Ses ennemis: le gouvernement fédéral et les compagnies pétrolières étrangères, notamment Chevron, Shell et Agip. En effet, le Mend s'est attaqué aux multinationales activant dans le Delta du Niger, les accusant d'exploiter les richesses du pays, alors que les populations n'en profitent pas. Aujourd'hui, il s'attaque au TSGP, un projet pourtant intégré dans le cadre du Nepad, eu égard à ses retombées économiques dans les pays de transit et leur voisinage. En effet, le centre et le nord nigérians, comme le Grand Sud algérien, régions dépourvues d'infrastructures gazières, bénéficieront grâce au TSGP de l'approvisionnement en gaz, tandis que le Niger, pays de transit, et les pays limitrophes tels que le Mali et le Burkina Faso, pourront tirer profit de la proximité de cette source d'énergie. Il est à noter que le Nigeria, le Niger et l'Algérie ont signé, vendredi, un accord donnant le coup d'envoi à un projet de gazoduc à travers le Sahara à destination de l'Europe, pour un montant estimé à 10 milliards de dollars. Ce futur gazoduc devrait partir du delta du Niger, la zone de production de pétrole et de gaz au Sud du Nigeria, et parcourir plus de 4 000 kilomètres à travers le Niger et l'Algérie pour alimenter l'Europe en gaz à partir de 2015. Yazid Idir