Barack Obama, qui effectue, depuis, hier, sa première visite de chef d'Etat en Afrique, bénéficie sur ce continent d'une bienveillance qui peut aider Washington à y militer pour la bonne gouvernance et la lutte contre le terrorisme tout en veillant à ses intérêts économiques. En sa qualité de premier président noir des Etats-Unis, il est assuré d'être accueilli au Ghana en héros. Mais Washington n'en fait pas moins face à d'autres puissances économiques émergentes en quête de marchés et avides de matières premières. Or, ces pays insistent moins sur la gouvernance que le dirigeant américain ne le fera sans doute au Ghana. "Il ne sera pas facile à Obama de répondre aux espérances parce que la démocratie n'est pas la meilleure qui soit en Afrique", note Vladimir Antwi-Danson, du Centre Legon pour les affaires internationales de l'Université du Ghana. "Il peut réussir s'il (...) veille à ce que les projets d'assistance soient menés à leurs objectifs déclarés, car il existe une profonde bienveillance de la part du continent." Barack Obama, dont le père était né au Kenya, a fait du Ghana la destination de sa première visite présidentielle en Afrique pour des raisons évidentes. Ce pays est cité en exemple en matière de réformes économiques et de gouvernance après avoir connu deux changements de régime par le biais d'élections équitables dont les dernières, tenues en décembre, ont pris le contre-pied des scrutins frauduleux et des putschs militaires observés ailleurs. Le Ghana est aussi en passe de devenir le plus jeune producteur de pétrole d'une région de plus en plus importante pour les Etats-Unis, qui cherchent à diversifier leur approvisionnement énergétique en s'écartant du Moyen-Orient. "La priorité des Etats-Unis en Afrique (...) est le pétrole", note le politologue Babacar Justin Ndiaye à Dakar. "Le Ghana n'est ni le Nigeria, ni l'Angola, et Obama se rend à Accra pour reconnaître la santé politique et la bonne gouvernance du pays." Dans une interview à AllAfrica.com diffusée mardi dernier, Barack Obama insistait sur la nécessité de débarrasser l'Afrique de la corruption et de l'instabilité politique pour y attirer les investissements nécessaires à toute prospérité. "Il est très important que les dirigeants africains endossent des responsabilités et qu'ils soient tenus responsables, déclarait-il. On n'obtient pas d'investissements sans bonne gouvernance. Si des officiels réclament 10, 15 ou 25% de commission, les milieux d'affaires n'investiront pas là." Les Etats-Unis s'inquiètent d'autre part de la sécurité dans le golfe de Guinée, où des attaques d'activistes ont réduit d'un cinquième la production de pétrole du Nigeria. Ils espèrent que le Ghana ne subira pas le même sort que d'autres pays producteurs où les revenus pétroliers ont ouvert la voie aux dictatures, aux troubles sociaux et à la corruption. "Une solide relation bilatérale, une reconnaissance de la longue lutte qu'a livrée le Ghana contre la corruption, ce sera utile", estime Tara O'Connor, du cabinet Africa Risk Consulting. La sécurité est également un sujet de préoccupation majeur des Etats-Unis dans la Corne de l'Afrique, surtout en Somalie où des insurgés islamistes soupçonnés de liens avec Al Qaïda cherchent à prendre le pouvoir et où un contexte d'anarchie a favorisé le développement de la piraterie maritime. "L'Afrique est devenue un terrain de jeu pour terroristes", déclare Vladimir Antwi-Danso. L'extrémisme islamiste sévit aussi dans les Etats du Sahel qui s'étendent au nord du Ghana. Cependant, l'Afrique est loin de dominer le programme de Barack Obama, occupé par la crise financière internationale, l'Irak et l'Afghanistan. Et rares sont ceux qui pensent que sa visite au Ghana y changera grand-chose. La Chine, quant à elle, s'applique à renforcer ses liens avec l'Afrique à la fois sur le plan officiel et sur le terrain économique, en y transférant des liquidités dont ne disposent pas ses concurrents occidentaux dans le contexte actuel. Trois mois après l'investiture d'Obama, le président chinois Hu Jintao a passé cinq jours dans quatre pays africains afin de souligner que l'engagement de Pékin sur le continent n'était pas remis en question par la crise financière. Le président américain passera moins de 24 heures au Ghana. Les échanges commerciaux de la Chine avec l'Afrique ont décuplé en une décennie pour atteindre 107 milliards de dollars en 2008. Ceux des Etats-Unis et du continent représentent encore 140 milliards, selon des statistiques américaines. La Chine représente surtout pour les gouvernements africains une source de financement nouvelle et différente de celle qu'incarnent leurs donateurs occidentaux traditionnels. "Quand on se tourne vers les partenaires traditionnels, la question des conditions surgit.