Ottawa, Abdelkader Djebbar Au Nigeria, la Chine a déjà investi 2,3 milliards de dollars dans un champ pétrolier offshore. Après le Soudan, l'Angola, le CongoBrazzaville, le Gabon, le Nigeria et l'Algérie, Pékin s'affaire tous azimuts. Désormais, c'est au Mali que la Chine prospecte. Tout y passe… Même la Mauritanie et le Niger. Le Tchad est également inclus dans la liste des fournisseurs de la Chine. Et le Ghana, nouvel arrivant dans le monde producteur de pétrole, est, d'ores et déjà, sur la ligne de mire. L'Afrique devient son trésor. Mais c'est sans compter avec les États-Unis qui, eux aussi, sont très intéressés par les «entrailles» du continent. Tout laisse croire que les États-Unis et la Chine, respectivement premier et deuxième consommateurs mondiaux, viennent d'engager le sprint final au Ghana à la recherche du trésor du siècle: le pétrole. Et c'est la Chine qui semble prendre une sérieuse option pour remporter le titre, si l'on en juge par les quelques longueurs d'avance qui remontent déjà à quelques années de «coopération bilatérale». L'or noir fait donc courir asiatiques et américains en Afrique et c'est vraisemblablement dans ce cadre, entre autres, qu'il y a lieu d'inscrire la récente visite de Barack Obama au Ghana, le Ghana où la Chine est déjà assez bien implantée grâce au financement de quelques projets dont le principal est la réalisation du barrage de Bui en fournissant 600 millions de dollars pour générer 400 MW d'électricité alors que les États-Unis ont un grand intérêt dans le gazoduc de l'Afrique de l'Ouest dont la réalisation nécessite une enveloppe de 700 millions de dollars. Le Ghana est donc plus jamais un important centre d'intérêt aussi bien pour la Chine que pour les États-Unis. Reste à savoir qui des deux pays remportera le trophée, sachant, d'ores et déjà, que la première phase de la production de pétrole brut du Ghana est estimée à 120.000 barils par jour. Pour l'heure, chacun joue de son charme et aussi du coude-à-coude, comme en témoignent les récentes visites effectuées par les chefs d'États chinois et américain. Aujourd'hui, les enjeux et le potentiel de négociation du Ghana sont d'un tout autre calibre. La Chine fait montre d'une grande volonté d'accroître sa participation à l'infrastructure de construction, les communications et le développement des ressources humaines. «Le Ghana est un partenaire important de la Chine», a confirmé le Premier ministre Wen Jiabao, après une visite en Afrique de l'Ouest. La recherche est maintenant d'identifier des projets de développement que les Chinois peuvent être encouragés à soutenir, l'électrification et l'éducation sont susceptibles d'être des plus importants. Surtout quand on sait que l'électricité est rationnée dans le pays faute de moyens de production. Le séjour au Ghana du président américain n'aura pas seulement valeur de témoignage. Des deux côtés, de lourds intérêts économiques sont en jeu. Si le pays hôte, plombé par une inflation galopante et de forts déficits publics, espère, par cette visite majeure, doper les investissements américains sur son sol, du côté de Washington, les enjeux sont surtout pétroliers.
Dans le but de diversifier leur approvisionnement en or noir, pour l'heure exclusivement dépendant du Moyen-Orient, les États-Unis lorgnent avec insistance sur le Ghana, producteur en plein essor dans la région. A condition, toutefois, que tous les éléments de stabilité soient réunis, ce qui passe par une lutte efficace contre la corruption. «On n'obtient pas d'investissements sans bonne gouvernance», avait alors déclaré Barack Obama qui, sur le terrain ghanéen, avait tenté de contrer l'offensive chinoise sur le continent africain. Les échanges commerciaux entre Pékin et les capitales africaines ont décuplé en dix ans. Ceux-ci pèsent actuellement 107 milliards de dollars et entrent désormais en concurrence avec ceux des partenaires traditionnels de l'Afrique, toujours dominants, dont les États-Unis. Une menace commerciale qui est prise très au sérieux en Occident. Ce qui peut se comprendre: «Quand on se tourne vers les partenaires, la question des conditions - gouvernance, droits de l'homme, corruption - surgit, explique en effet un haut dirigeant africain. Avec les Chinois, il n'y a pratiquement pas de conditions». Au Ghana, Barack Obama n'allait pas en territoire inconnu. Au Ghana, on n'exclut pas, mais bien au contraire, on milite avec insistance en faveur d'un partenariat «gagnant-gagnant». La production pétrolière devrait atteindre 250.000 barils/jour dès 2012 pour un investissement de 5 milliards de dollars, indique-t-on auprès de Kosmos Energy, société chargée d'exploiter le pétrole ghanéen tout en soulignant que les puits de pétrole du Ghana sont de «classe mondiale». L'annonce de la découverte du pétrole au Ghana a été faite officiellement en juin 2007, suite à plusieurs années de prospection. Évidemment, on se réjouit de cette nouvelle, estimant que le pétrole permettra d'accélérer le développement économique du pays. «Déjà, sans pétrole, nous allons très bien», souligne-ton à Accra. «Désormais, avec le pétrole comme coup d'accélérateur, nous allons nous envoler», affirme-t-on. Deuxième producteur mondial de cacao, le Ghana produit de l'or, du bois, de la bauxite et des diamants. Mais selon l'indice de développement de l'ONU, ce pays, où l'eau et l'électricité se font rares, est actuellement 136e sur 177 pays. La population ghanéenne espère que la découverte de pétrole mette un terme aux problèmes énergétiques en permettant l'approvisionnement en brut d'une centrale thermique. «Maintenant, avec une bonne gestion, nous pouvons être aussi riches que les Émirats arabes unis et nous n'aurons plus de crise énergétique». Le Ghana est d'ailleurs régulièrement cité par la communauté internationale comme un modèle en Afrique pour ses progrès en matière d'économie et de démocratie.