L'Union européenne doit décider à l'automne s'il faut l'inscrire sur la liste des espèces les plus menacées. Ce qui reviendrait à interdire sa commercialisation internationale. Et en attendant, l'organisation écologiste WWF fait monter la pression pour que la Commission approuve la mesure. D'après un document interne, Bruxelles a convenu d'interdire immédiatement et d'une manière provisoire le commerce du thon rouge au niveau mondial, ce qui gèlerait la pêche de ce poisson dont les réserves disparaissent. Dans ce contexte, un accord a été trouvé entre les services de l'Environnement de la Commission, qui défendaient une telle démarche au nom de la protection de la biodiversité, et ceux de la pêche, qui doivent tenir compte de l'impact économique pour la profession en Europe. La Commission avait déjà adopté cette décision en août, dans un avis préliminaire, avant de consulter les membres de l'UE pour prendre une décision définitive. Concrètement, l'exécutif européen soutient une proposition de Monaco visant à inscrire le thon rouge, pêché surtout en Méditerranée mais aussi dans l'Atlantique, sur l'Annexe I de la Convention de l'ONU sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES). Cette Annexe I prévoit une interdiction de commercialisation et donc, de facto, empêcherait la pêche de l'espèce. "L'idée n'est pas d'interdire définitivement la pêche, mais de la suspendre pendant deux ans par exemple pour permettre à l'espèce de se reconstituer", a précisé la même source. Cette mesure devrait être adoptée par la majorité des pays européens pour devenir la position de toute l'UE en mars 2010 lors de l'Assemblée générale au Qatar des 175 Etats membres de la CITES. La décision finale leur reviendra. Les autres grands pays de pêche au thon dans l'UE sont l'Italie, la Grèce et l'Espagne. La France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont annoncé qu'ils soutiendraient une interdiction. Un arrêt, même temporaire, du négoce de thon rouge, serait durement ressenti par le Japon, l'un des principaux pays consommateurs de ce poisson utilisé pour les sushis et sashimis. Mais aussi par les Etats-Unis, qui en sont friands. Les opposants à ce moratoire "mettent clairement des intérêts commerciaux de court terme au-dessus de la survie de l'espèce", avertit Greenpeace dans un communiqué qui salue la décision de la Commission. Le WWF s'est aussi réjoui de la position de Bruxelles, dans un communiqué. Il a appelé les pays de l'UE à l'appuyer "dans l'espoir qu'après des décennies de surexploitation, assortie de prises illégales, une pêche bien gérée pourra reprendre en Méditerranée dans les années à venir". Le thon rouge, dit "de l'Atlantique", se rencontre dans toute la zone de l'Atlantique nord et ses mers adjacentes, notamment en Méditerranée, depuis l'Equateur jusqu'au nord de la Norvège, du Golfe du Mexique jusqu'à la mer Noire. D.T.