Depuis des années, ONG, militants et élus écologistes alertent en Europe et dans le monde sur la question de la raréfaction du thon rouge due notamment à l'explosion de la consommation de sushis. Ainsi, alors que doit se tenir en 2010 une réunion de la CITES, organisme mondial qui classe les espèces protégées, la commission européenne, qui défend au sein de la CITES le mandat que lui donne l'Union européenne, a le 22 septembre dernier été obligée de reculer sur l'inscription du thon rouge sur la liste des espèces non-pêchable. Alors qu'elle avait, sans doute maladroitement, annoncé son souhait de défendre une position visant à l'interdiction de la commercialisation de l'espèce, la Commission européenne s'est rendue compte qu'elle n'avait pas de majorité et a donc décidé de ne pas passer aux votes des Etats. En avril 2009, le WWF rend publique une enquête inédite annonçant la disparition du thon rouge en 2012 si les gestionnaires et les décideurs continuent d'ignorer les avertissements de la communauté scientifique. L'ONG exhorte les gouvernements à la fermeture de cette pêcherie. En deux décennies à peine, la population de thon rouge (Thunnus Thynnus) de Méditerranée a chuté de 80% alors que ce poisson emblématique était pêché depuis l'Antiquité. Au milieu des années 1990, à une pêche relativement proportionnée, destinée à la consommation locale, est venue s'ajouter la pratique de l'engraissage en cage. Ces poissons sont presque exclusivement destinés au marché japonais où ils sont consommés sous la forme de sashimis. Une activité extrêmement lucrative qui a provoqué une véritable ruée vers l'or aux effets catastrophiques. Aujourd'hui, chaque année, le niveau annuel des captures dépasse outrageusement celui recommandé par les scientifiques. A ce rythme là, le stock risque bel et bien de s'effondrer à très court terme sans manquer d'entraîner, dans sa chute, la mort d'une activité millénaire. Néanmoins, les gouvernements de l'UE étaient appelés à se prononcer sur une proposition visant à interdire la commercialisation du thon rouge. Un projet ambitieux, courageux même, porté par Stavros Dimas et Joe Bord, respectivement commissaires de l'Environnement et de la Pêche et des Affaires maritimes. Bruxelles proposait de coparrainer une proposition de Monaco d'inscrire le thon rouge, pêché surtout en Méditerranée, sur l'annexe I de la Convention de l'ONU sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (Cites), à titre provisoire, en attendant les prochaines évaluations scientifiques de l'état des stocks de thon. Mais lors du tour de table, de nombreux Etats ont estimé qu'il était "prématuré pour l'UE de coparrainer cette proposition" et qu'il fallait attendre "de nouvelles études scientifiques". Ce sont, en fait, les pays riverains de la Méditerranée, l'Espagne, l'Italie, la France, mais aussi la Grèce, Malte et Chypre, qui se sont prononcés contre, privilégiant des intérêts économiques à court terme. En conséquence, la proposition n'a pas obtenu la majorité qualifiée qui était requise. Les Etats membres peuvent toujours revoir leurs positions en mars 2010, où la Convention se réunit pour prendre une décision finale. Espérons que d'ici là, les Etats membres de l'UE qui sont le plus responsables de l'épuisement des stocks de thon rouge. Prendront conscience du danger qui la disparition de ce poisson. Dalila T.