Le marché du transport aérien entre la France et les trois pays du Maghreb central suscite l'intérêt de plus en plus de compagnies aériennes. C'est le cas notamment d'Air Arabia, qui avec ses 110.000 passagers transportés entre Casablanca et trois villes françaises en neuf mois d'existence, entend bousculer l'horizon des transporteurs aériens exploitant les lignes très prisées entre la France et le Maghreb. Dans ce sens, le P-DG de la compagnie Adel Ali, a indiqué récemment au cours d'une conférence de presse à Paris que l'objectif "est d'augmenter nos fréquences et que les vols hebdomadaires deviennent des dessertes quotidiennes". Sa filiale marocaine, issue d'un partenariat avec Regional airlines (première compagnie privée au Maroc) et la banque d'affaires bahreïnie Ithmar Bank, propose actuellement treize vols hebdomadaires entre Casablanca et Paris, Lyon et Marseille avec des airbus A320. Fin mars, elle en comptera 16 avec le lancement de Montpellier et espère atteindre 20 à 25 vols à la fin de l'année. M. Ali, qui est "prêt à saisir toutes les opportunités" pour gagner de nouvelles parts de marché, envisage en outre de développer des liaisons avec Marrakech et assure qu'il sera là si le ciel tunisien venait à s'ouvrir également. Cette montée en puissance d'Air Arabia chamboule la donne sur le segment France-Maghreb concurrentiel mais à fort potentiel de croissance. Le trafic passagers y a doublé entre 1999 et 2008, pour atteindre environ 11 millions de passagers dont 4,5 pour le Maroc, 3,75 pour la Tunisie et 2,5 pour l'Algérie, selon des statistiques de l'Enac (Ecole nationale de l'aviation civile). Liens historiques, ces pays, francophones, attirent à la fois une clientèle communautaire, des voyageurs d'affaires et des touristes. Une compagnie traditionnelle comme Royal Air Maroc a ainsi enregistré l'année dernière 1,94 million de passagers entre la France et le Maroc avec 16 vols quotidiens. "Sur chaque destination, nous sommes désormais au minimum quatre exploitants", résume Lionel Guérin, PDG de la compagnie transavia.com, filiale à bas coûts d'Air France-KLM qui dessert le Maroc et la Tunisie. "Pour l'instant, ils ne sont pas directement en concurrence avec nous. Ils ne se sont pas mis sur les mêmes lignes. Ceci dit, je regarde leur développement avec un oeil attentif. C'est un acteur de plus, donc de la concurrence en plus", dit-il. Ce transporteur est jugé d'autant plus "sérieux" que sa flotte (21 airbus A320) est neuve et amenée à augmenter fortement (44 autres appareils en commandes dont 6 livrés cette année et 8 en 2011). "Nous verrons bien comment les cartes seront redistribuées. Nous sommes une grosse compagnie, très présente des deux côtés des lignes et nous avons toutes les armes pour résister à la venue d'un nouveau concurrent", estime pourtant Fabrice Bacchetta, directeur général France d'easyJet, principal concurrent. L'an passé, easyJet a transporté environ 100.000 personnes entre Paris et Marrakech. Et selon le dirigeant, l'arrivée d'Air Arabia n'a rien changé à sa stratégie sur le Maroc. "Si d'autres pays du Maghreb rejoignent le ciel ouvert européen, eh bien on s'y intéressera", assure-t-il. Troisième compagnie française en termes de passagers transportés (1,7 million), Aigle Azur a dû, elle, se résoudre à réduire drastiquement son activité sur le Maroc face à cette concurrence agressive passant de deux vols quotidiens il y a un an et demi à deux vols hebdomadaires aujourd'hui. Le transporteur, spécialiste de l'Algérie, s'est repositionné sur le Mali et le Portugal. Il réalise toutefois encore la moitié de son chiffre d'affaires avec le Maghreb (environ 150 millions d'euros). "Nous sommes une compagnie privée, familiale. (...) Le low cost, ce n'est pas notre métier", résume Meziane Idjerouidène, le directeur général.