L'aide sans précédent mise en place pour la Grèce sera formellement activée cette semaine par les pays européens, qui espèrent ainsi calmer les inquiétudes de marchés financiers redoutant toujours une contagion à d'autres pays de la zone euro. Signe de la fébrilité persistante des investisseurs, l'euro recule face au dollar lundi matin malgré la décision des pays de la monnaie unique d'accorder à la Grèce une enveloppe de 110 milliards d'euros sur trois ans en échange des 30 milliards d'euros d'économies supplémentaires annoncées par le gouvernement grec. D'après les économistes, si le mécanisme adopté dimanche échouait à convaincre les intervenants sur le marché - et surtout s'il n'était pas avalisé par les différents Parlements européens, au premier chef le Bundestag -, les pays européens pourraient devoir débourser pas loin de 500 milliards d'euros pour venir à la rescousse d'autres pays fragilisés d'un point de vue budgétaire. "Les acteurs du marché ne sont pas totalement convaincus que nous avons là la solution idéale. On peut s'interroger sur la capacité (du gouvernement grec) à maintenir un tel niveau d'austérité sur une période aussi longue", a déclaré Tony Morriss, analyste changes chez ANZ Bank. "Le marché doit digérer un certain nombre de points potentiellement difficile: à court terme, il y a le passage du texte devant les parlements, en particulier en Allemagne. Et est-ce que cela veut dire que les marchés vont maintenant se concentrer sur perspectives budgétaires à long terme de pays comme l'Espagne et l'Italie ?" Au terme de plus de trois heures de réunion et après trois mois d'hésitations, Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe, a déclaré dimanche soir qu'un sommet des dirigeants de la zone euro était convoqué le vendredi 7 mai afin d'avaliser le déblocage des prêts bilatéraux à Athènes. Ce sommet, a-t-il pris le soin de préciser, "ne reviendra pas sur les décisions que nous avons prises". Après une remontée à 1,3359 dollar juste après l'annonce de l'adoption du plan d'aide, l'euro reculait de plus de 0,5% face au dollar dans les premiers échanges lundi, à 1,3237 dollar. "Cette semaine, l'euro pourrait néanmoins terminer en hausse au vu de l'aide sans précédent définie pour la Grèce ce week-end. Mais cette évolution pourrait ne pas durer en raison des inquiétudes persistantes concernant la dette souveraine d'autres pays, la faiblesse de la croissance dans la zone euro et des interrogations sur la capacité de la Grèce à mettre en place les mesures d'austérité", notent les économistes de Overseas Bank (Singapour). Cela fait cinq mois que l'euro perd du terrain face au dollar et, depuis un pic de 1,50 dollar atteint en décembre, la monnaie unique a cédé plus de 12% en raison des craintes pour la stabilité de la zone euro qui agitent les investisseurs depuis l'émergence de la crise budgétaire grecque. Dimanche matin, la Grèce, au bord du gouffre financier, avait annoncé un nouveau plan d'austérité prévoyant une réduction supplémentaire de son déficit budgétaire de 30 milliards d'euros sur trois ans en échange de l'aide de l'Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI). Parmi les mesures d'austérité annoncées par Athènes figurent une hausse de la TVA, qui passera de 21% à 23%, une augmentation de 10% des taxes sur les carburants, l'alcool et le tabac, un gel des salaires et retraites du secteur public et un relèvement de l'âge minimum de départ à la retraite à 60 ans. Angela Merkel et son ministre des Finances Wolfgang Schaüble ont recommandé dimanche l'adoption par l'Allemagne de la loi relative à sa contribution au plan de sauvetage de la Grèce, mais le ministre de l'Economie et d'autres figures politiques se sont montrés plus réservés. La contribution allemande sera de 22 milliards d'euros sur trois ans, a précisé Schaüble lors de la réunion de l'Eurogroupe à Bruxelles, alors que l'aide à Athènes se montera au total à 110 milliards, dont 80 milliards fournis par la zone euro. La chancelière allemande chrétienne-démocrate (CDU) a confirmé que le plan serait examiné lundi en conseil des ministres, ce qui enclenchera le processus législatif qui devrait être bouclé vendredi, deux jours avant une élection en Rhénanie du Nord-Westphalie. "Je vais travailler au programme grec et à son vote", a déclaré Angela Merkel, qualifiant le programme grec de "très ambitieux" et soulignant qu'il était conçu pour le long terme.