Depuis le début de l'événement du mois du patrimoine, chaque contrée célèbre ce rendez-vous à sa façon avec tout de même un dénominateur commun, celui de montrer les richesses d'un patrimoine matériel et immatériel bien de chez nous. Le musée Cirta de Constantine a proposé une expo inédite "Splendeurs d'Algérie", qui selon la responsable de cet espace serait un "véritable repère historique". S'exprimant à l'occasion d'un "jumelage" organisé avec le musée Dinet de Bousaâda (M'sila), Chadia Khelfallah a ajouté que les dimensions ethnographique et architecturale reproduites par des mains de maîtres se prêtent à une véritable étude morpho-sociologique du paysage culturel algérien entre la fin du 19e et le début du 20e siècle. Une atmosphère qui a transformé, comme par enchantement, l'espace d'un vernissage, la galerie d'expositions du musée national Cirta en espace réservé à la contemplation, à la méditation. Rassemblés en une osmose de couleurs, contrastant par la diversité des thèmes et captivant par un assemblage de techniques artistiques, les trente tableaux qui constituent la "scénographie" de ce prolongement culturel entre deux institutions muséales de l'Est du pays, dévoilent d'authentiques chefs-d'œuvre d'où, a expliqué Khalfallah, l'émergence de cette idée de célébrer, ne serait-ce que l'espace d'une exposition, une sensibilité d'artistes épris des splendeurs naturelles d'un pays altier, fort d'un brassage de civilisations séculaires, nonobstant le dénuement de pans entiers du peuple, cultivé par le joug colonial. Un état que l'œil scrutateur d'artistes de renommée, à l'instar de Bachir Yelles, Ahmed Ben Slimane, Mylon, Jean Gazada, Crettol Duval, J.J.François Bell, Sadek Amin Khodja, et l'oeuvre passionnée de la cité du bonheur d'Etienne Dinet, ont révélé au yeux du monde. Différentes, originales, vivantes, éclatantes, sensibles et parfois sensuelles, les toiles d'orientalistes et d'artistes locaux sont livrées à l'admiration du public de la ville des ponts jusqu'au 16 mai. "Du village de Mechounèche et d'El Kantara (Biskra), de Bousaâda (M'sila), à Annaba, en passant par Constantine et la Casbah d'Alger, chaque toile représente une station unique, chaque oeuvre est criante d'Histoire", a souligné Zoghbi Smati, président du Syndicat national des chercheurs permanents, émerveillé par la qualité des reproductions, relevant, en amateur d'art contemporain, que cela n'a en rien altéré la qualité visuelle des peintures. Saluant la programmation de cette exposition pour cette "kermesse du patrimoine national", qu'il a comparée à l'exposition de Lucie, icône du Panaf 2009, M. Zoghbi a tenu à faire part de "la nécessité d'insérer des témoignages de notre patrimoine dans les programmes culturels". Une pratique qui, selon Ahmed Bouzidi, directeur de wilaya de l'énergie et des mines, lui-même amateur d'art, gagnerait à être cultivée pour les générations à venir sans toutefois que le "marketing" n'empiète sur la sacralité millénaire que représente un patrimoine universel. "De tout l'empire colonial de la France, l'Algérie est le joyau le plus pur et la terre de prédilection des artistes et des rêveurs", a commenté Mohamed Amairi, auteur et cadre à la Sonelgaz, saisi par une splendeur qui s'étale au bout des doigts. L'observation de "croissons 2", un des chefs-d'œuvre incontournables d'Etienne-Nasreddine Dinet, est un autre grand moment de la visite de l'exposition. Elle révèle l'âme éthérée de l'artiste phare de la cité du bonheur, suscitant toujours autant de débats et d'empressement. Un acte de maîtrise signé d'un déferlement de sensations, de maturité et de pudeur. Une station où le visiteur averti peut suspecter les traits de l'auteur dans une déclinaison de temps où les yeux, miroir de l'âme, peuvent transmettre l'humilité et l'ingénuité dans une pause de bédouin dans l'expectative, d'un espoir ou d'un rêve ou encore..