La Commission européenne a proposé mercredi d'instaurer un système plus centralisé de surveillance des agences de notation de crédit (ANC) à l'échelle de l'Union, avec des amendes à la clef pour celles qui n'expliqueraient pas la dégradation des notes d'entreprises ou de dettes souveraines. L'exécutif européen souhaite que la nouvelle Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) soit investie de pouvoirs de surveillance exclusifs sur les ANC enregistrées dans l'UE ainsi que sur les filiales européennes d'agences bien connues telles que Fitch, Moody's et Standard & Poor's. "L'AEMF aurait le pouvoir de demander des informations, d'ouvrir des enquêtes et de procéder à des inspections sur place." Les agences, qui évaluent et notent la solvabilité d'entreprises, Etats et produits financiers complexes, sont accusées d'avoir contribué à la crise financière de 2008 par leur manque de transparence, et en sous-estimant la probabilité que les émetteurs de certains instruments financiers complexes ne puissent pas honorer leurs dettes. Le président de l'exécutif européen, José Manuel Barroso, a ajouté que l'UE envisageait de créer sa propre agence de notation. "Est-ce normal qu'il n'y ait que trois" agences, toutes américaines, qui attribuent des notes "sur une question aussi sensible", a-t-il lancé, en parlant de l'évaluation de la dette souveraine. La Commission européenne souhaite aussi une réforme du gouvernement d'entreprise dans les établissements financiers, afin de renforcer la surveillance exercée par le conseil d'administration et les actionnaires sur les dirigeants, et d'éviter que ces derniers ne prennent des risques excessifs en cédant au "court-termisme". Ces réformes s'inscrivent dans le cadre des efforts de la Commission pour prévenir de nouvelles crises financières et renforcer le système financier en Europe, afin que les gouvernements des Vingt-Sept ne soient pas à nouveau obligés d'injecter des centaines de milliards d'euros dans des plans de sauvetage qui font exploser la dette publique et les obligent ensuite à sabrer dans les dépenses. Les suggestions de la Commission seront débattues par les chefs d'Etat et de gouvernement au prochain Conseil européen, le 17 juin, et présentées, en même temps que ses propositions sur les fonds de résolution des défaillances bancaires, lors du sommet du G-20 qui se déroulera à Toronto les 26 et 27 juin. Notons que l'investisseur américain, actionnaire de Moody's, s'exprimait mercredi devant la commission américaine d'enquête sur les causes de la crise financière. Il pointe surtout la responsabilité des banques. Le gourou de l'investissement aux Etats-Unis s'exprimait hier devant la commission chargée d'enquêter sur les causes de la crise financière de 2008. Pour lui, les dirigeants de Moody's, agence de notation dont son fonds d'investissement Berkshire Hathaway détient 13% du capital, ont seulement été victimes d'"une illusion de masse". Warren Buffett estime qu'ils ont commis la même erreur que le reste du pays. Plusieurs établissements de notation sont pointées du doigt pour n'avoir pas attiré l'attention sur les risques de certains produits financiers, reliés aux crédits hypothécaires, alors que le marché immobilier commençait à chuter outre-Atlantique. Des ex-salariés de Moody's assurent avoir reçu des pressions hiérarchiques qui ont formé une "population d'analystes dociles" au sein de l'agence. Warren Buffett a en revanche fustigé les institutions financières qui ont contraint Washington de procéder à des injections du capital. Les dirigeants de ces établissements "devraient partir, ruinés", a-t-il asséné. La réforme du secteur financier voulue par Barack Obama, qui cherche à imposer davantage de contraintes règlementaires, vise à éviter qu'un nouveau scénario de crise ne se répète. R.I.