Selon Kamal Benkoussa, qui est Partner chez GH Trading LLP - Londres, le monde s'apprête à connaître une période très difficile, deux ans après la crise des subprimes qui a secoué les marchés financiers. En effet, depuis que le poids de la dette des Etats est devenu un véritable risque pour les pays occidentaux, ils sont aujourd'hui confrontés à un véritable dilemme : réduire leurs dépenses budgétaires ou au contraire accroître significativement leurs déficits afin de soutenir leurs économies. Pour cet expert, le risque d'une spirale déflationniste "à la japonaise", qui plongerait pour les dix prochaines années une grande partie des économies dans une crise généralisée, est devenu réalité. Dans ce contexte, l'expert a démontré que le secteur privé est le premier à subir les conséquences de l'explosion d'une bulle financière, en raison de la dévaluation de ses actifs (biens immobiliers, actifs financiers, etc.). Par conséquent, les entreprises privilégient le remboursement de leur dette à l'investissement. De leur côté, les ménages préfèrent épargner plus afin de parer à toute éventualité. Tous les schémas classiques de relance par l'investissement et/ou la consommation deviennent alors inefficaces. Lorsque le privé n'investit plus et que les ménages réduisent leur consommation pour épargner plus, l'activité économique ralentit considérablement. Ce phénomène est plus communément connu par les financiers sous le nom de crise de la balance des paiements. En effet, le secteur privé fortement endetté n'emprunte plus et les banques n'osent plus lui prêter de l'argent. Ainsi, les 100$ épargnés en banque par le ménage ne sont ni prêtés par cette banque, ni empruntés par le secteur privé, ils restent en banque et sortent totalement du circuit monétaire de création de richesse, précise l'expert. De ce fait, la réduction de l'investissement et la baisse du revenu des ménages contractent alors fortement la demande domestique et accélèrent la chute du prix des actifs (biens immobiliers, biens de consommation, actifs financiers, etc.) initialement provoquée par l'explosion de la bulle financière. Ce que le chercheur qualifie de déflation. Pour autant, l'expert a rappelé que ce phénomène a pu effectivement être observé lors de la crise que le Japon a connu au début des années 90. Selon toujours Richard C. Koo, l'entreprise endettée subirait une décote de son action de la part des agences de notation, ce qui la fragiliserait davantage et d'autre part, la banque qui lui a octroyé des prêts risquerait de perdre sa ligne de crédit (nécessaire à son fonctionnement) obtenue auprès de la Banque centrale. Cette opacité autour du comportement des différents agents économiques (secteur privé et bancaire) engendre malheureusement la mise en œuvre de mauvaises politiques de relance de la part des dirigeants, indique l'expert. Ainsi, les conclusions de Richard C. Koo pointent du doigt les politiques économiques standards en période de crise de la balance des paiements et surtout l'incapacité de certains organismes dits "spécialistes" (Banques centrales, FMI, OCDE, etc.) à comprendre la logique inhérente aux comportements économiques, poursuit l'expert. Le Japon arrêta finalement son plan d'austérité par la mise en place d'une politique de stimulus fiscal de 315 trilliards de Yen (2.9 trilliards de $) et évita ainsi un effondrement de son PIB de 2000 trilliards de Yen (18.4 trilliards de $), malgré une vive condamnation de la part des agences de notation et du FMI. En effet, en dépit de l'augmentation de sa dette, elle a permit au Japon de maintenir son PIB au-dessus des niveaux d'avant crise (1990) et ce, malgré une chute de 87% des prix de l'immobilier, argumente l'expert. C'est ainsi que l'expert démontre que la réduction des déficits budgétaires par la mise en place de plans d'austérité, risquent de connaître le même sort que le Japon des années 90. En d'autres termes, une déflation. L'expert appuie son analyse par l'indicateur économique l'indice américain ISM (indicateur d'expansion ou de contraction de l'activité économique) qui montre que dans les six prochains mois, l'activité économique devait passer sous la barre symbolique des 50. Les Etats-Unis passeraient, alors, en récession. De même, le Baltic Dry (coût du fret maritime) qui est un indicateur économique fortement corrélé à l'évolution du commerce international et qui rend compte de l'expansion ou de la contraction de l'activité économique globale, a perdu près de 60% de sa valeur au cours des deux derniers mois, ré-indique l'expert qui avertit que c'est un signal très inquiétant d'un ralentissement économique à l'échelle planétaire. Au risque de subir une déflation à la japonaise, l'auteur préconise, au contraire, de prendre note de l'expérience récente de la Grèce et assainir sa dette budgétaire afin de garder la confiance des marchés financiers et des investisseurs acheteurs de bons du Trésor. Le monde est plus que jamais divisé entre les pro-stimuli fiscaux invoquant l'expérience japonaise et les pro-austérité désespérés de mettre fin à cette course effrénée à l'endettement, conclut l'expert en démontrant qu'il n y a pas une seule et unique solution.