Il s'agit d'une nouvelle variété de manioc améliorée. Les boutures de ce tubercule qui, en Afrique, rentre dans l'alimentation des hommes, et même du cheptel, a été publiquement présenté hier à Ifon au Nigéria par le professeur Richardson Okechukwu, de l'Institut international pour l'agriculture tropicale (IITA) du Nigéria. Une variante du manioc, non génétiquement modifiée, mais dont le rendement serait accru d'au moins 30%, avec une plus grande résistance aux maladies. C'est l'aboutissement d'un projet conduit par l'IITA en contribution à la lutte contre la crise alimentaire mondiale de 2008, qui a provoqué des "émeutes de la faim" dans le monde. Le Nigeria est le premier producteur mondial de cette denrée, avec quelque 44,6 millions de tonnes en 2008, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), mais cette production reste bien en dessous de la demande nationale réelle. Une bonne nouvelle donc, avant tout pour la production locale. D'autant que des producteurs nigérians qui sont déjà essayé à la culture de cette variété, confirment un accroissement du nombre de pousse. Certains d'entre eux ont constaté au moment de la récolte, que les boutures donnaient six à sept tubercules, contrairement au manioc planté auparavant, qui n'en produisait que deux ou trois. Endimanchés, coiffe traditionnelle Yoruba sur la tête, une centaine d'agriculteurs du sud du Nigeria écoutent attentivement l'exposé d'un professeur d'agronomie lors d'une cérémonie ponctuée par les intermèdes d'un petit orchestre. Face aux pénuries alimentaires, comme celle qui frappe actuellement le Niger, et à une demande largement en hausse, ce sont des propriétés très prometteuses. Le manioc est un aliment essentiel pour des centaines de millions d'Africains qui préparent, avec ses tubercules, des plats traditionnels tels que le "foufou" ou le "gari". Il nourrit aussi le bétail. Mais l'arbuste est également de plus en plus convoité bien au-delà du continent africain par une industrie en plein essor qui l'utilise dans la production d'éthanol, de glucose, d'amidon ou de farine. En réponse à la crise alimentaire mondiale de 2008, avec une flambée des prix des denrées de base provoquant des "émeutes de la faim" à travers le monde, l'IITA a inauguré en 2009 un projet de recherche visant à développer des variétés améliorées, non génétiquement modifiées, et qui sont actuellement distribuées à des cultivateurs dans sept pays d'Afrique. Outre le Nigeria, le Ghana, la Sierra Leone, la Tanzanie, le Malawi, le Mozambique et la République démocratique du Congo participent à ce programme financé par les Etats-Unis et qui touche quelque 400.000 cultivateurs. Bashir Adeyinka Adesiyan, producteur de manioc dans l'Etat d'Osun (sud-ouest du Nigeria), teste les nouvelles boutures depuis un an et ne cache pas son enthousiasme. "Si vous le récoltez maintenant, vous verrez six à sept tubercules, alors que le manioc que nous plantions avant n'en donnait que deux ou trois", dit-il au milieu de ses quelque cinquante hectares. La Thaïlande, qui ne le consomme pas, est le premier exportateur mondial de manioc. Le Nigeria est le premier producteur mondial avec quelque 44,6 millions de tonnes en 2008, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Mais cela ne répond pas pour autant aux besoins du pays le plus peuplé d'Afrique (150 millions d'habitants). "Nous avons d'importantes usines qui consomment jusqu'à 100 à 400 tonnes par jour. Aucune d'entre elle ne tourne à plus de 50% de sa capacité car elles sont en concurrence avec le manioc pour la consommation humaine", explique M. Okechukwu. De plus, des pays qui ne consommaient pas traditionnellement cette plante, comme le Niger ou le Tchad, explique le professeur, se tournent désormais vers cet aliment qu'ils importent de manière informelle via leurs frontières poreuses avec le Nigeria. "Avec les changements climatiques et les sécheresses de plus en plus fréquentes, la demande va augmenter", avertit-il. A cela s'ajoute une demande industrielle croissante à travers le monde. "La Chine achèterait volontiers la quasi-totalité de ce que nous produisons" en Afrique, explique Peter Hartmann, directeur général de l'IITA. Mais selon lui, il est encore trop tôt pour penser aux exportations en dehors du continent africain. "Il faut penser à exporter en Afrique même, car il y a ici largement de quoi occuper et enrichir les producteurs. Mais à long terme, ces autres pays auront toujours des besoins et ce sera alors une véritable opportunité", estime-t-il.