Docteur Abderrahmane MEBTOUL(1) Expert International Economiste C'est à cette période que naît le Parti le rassemblement national démocratique (R.N.D) dont le fondement du discours est la lutte anti-terroriste , qui raflera presque tous les sièges en 8 mois d'existence tant de l'APN que du Sénat au détriment du Parti FLN et qui provoquera par la suite des protestations interminables et une commission sur la fraude électorale dont les conclusions ne verront jamais le jour. Les parlementaires du fait de la situation sécuritaire de l'époque, auront surtout pour souci de voter pour soi même des rémunérations dépassant 15 fois le SMIG de l'époque alors que la misère se généralise, oubliant naturellement du fait de la généralisation des emplois- rente, qu'un parlementaire aussitôt sa mission terminée retourne à son travail d'origine et qu'une retraite automatique revient à afficher un mépris total pour une population meurtrie. Dans la foulée, la venue de deux chefs de gouvernement dont le premier technicien pratiquera le statut quo et le second l'application des accords du FMI qui aura à son actif le cadre macro-économique stabilisé mais avec des retombées sociales négatives du fait de la douleur de cet ajustement. 3-La période historique de 1999 à 2010 : la rente toujours la rente Ce président démissionne et des élections sont programmées le 08 avril I999 avec l'élection d'un Président qui promet de rétablir l'Algérie sur la scène internationale, de mettre fin à l'effusion de sang et de relancer la croissance économique pour atténuer les tensions sociales qui sera matérialisé plus tard par le référendum sur la réconciliation nationale avec un vote massif en faveur de la paix. Un chef de gouvernement est nommé après plus de 8 mois d'attente mais son mandat sera de courte duré, à peine une année, du fait des conflits de compétences. Un second chef de gouvernement lui succèdera mais qui démissionne, tout en se présentant candidat à la présidence avec comme conséquence une dualité dans les rangs du FLN dont il est tissu. Il est remplacé par le Secrétaire Général du RND. Viennent ensuite les élections du 08 avril 2004 qui sont largement remportées par le précédent Président avec trois chefs de gouvernement successifs : premièrement le secrétaire général du RND qui a été chargé des élections de 2004, puis le secrétaire général du FLN courant 2007, ce Parti avec les élections successives étant devenu majoritaire tant au niveau de l'APN que du Sénat, avec peu de modification dans la composante ministérielle puisque l'ancien chef de gouvernement n'a pu nommer aucun ministre entre mai 2006 et juin 2008, assistant d'ailleurs à la même composante à quelques variantes près depuis 10 années, idem pour les walis et les postes clefs de l'Etat. Puis à nouveau courant 2008 voilà le retour du secrétaire général du RND qui précisons le, sera chargé des élections d'avril 2009. C'est également durant cette période courant novembre 2008 qu'est amendée la constitution, non pas par référendum mais à la majorité des deux chambres, les députes et sénateurs se feront comme leurs prédécesseurs voter un salaire de plus de 300.000 dinars par mois, plus de quatre fois le salaire d'un professeur d'université en fin de carrière. Cet amendement ne limite plus les mandats présidentiels, tout en supprimant le poste de chef de gouvernement en le remplaçant par celui de premier ministre consacrant un régime présidentiel. Dans la foulée l'élection présidentielle s'est tenue le 09 avril 2009 où l'ancien président est réélu pour un nouveau mandat de cinq années (2009/2014) en promettant la création de trois millions d'emplois durant cette période et d'augmenter le pouvoir d'achat des Algériens. Mais fait nouveau, une crise mondiale sans précédent depuis la crise d'octobre 1929 est apparue en octobre 2008. Comme en 1986, courant 2008/2009 différents responsables politiques déclareront à la télévision officielle que la crise ne touche pas l'Algérie du fait de la non connexion avec le système financier mondial, de la non convertibilité du dinar et de l'importance des réserves de change oubliant la chute des cours des hydrocarbures qui représente plus de 98%des recettes en devises et que les dépenses réelles c'est-à-dire le plan de financement est largement tributaire du cours des hydrocarbures. C'est également durant cette période où nous assisterons à deux politiques socio-économiques contradictoires : la période 2000/2004 où existe une volonté de libéralisation du moins à travers les textes juridiques avec l'accord signé pour une zone de libre échange avec l'Europe applicable depuis le 1er septembre 2005, une nouvelle loi sur l'investissement , sur la privatisation , les lois sur l'électricité et le transport du gaz par canalisation et l'amendement de la loi sur les hydrocarbures autorisant l'investissement étranger sans limites. Revirement durant la période 2006/2010 où sous la couverture du patriotisme économique est amendée la loi des hydrocarbures qui postule pour ce segment que la Sonatrach sera majoritaire au moins de 51% tant à l'amont, l'aval que pour les canalisations , la loi de finances complémentaire 2009 avalisée par la loi de finances 2010 où est introduit la préférence nationale avec pour le commerce 70% pour les Algériens et 30% pour les étrangers et pour les autres secteurs 51% pour le national minimum et 49% pour les étrangers y compris pour les nouvelles banques étrangères ainsi que des mesure d'encadrement des transferts de capitaux . Dans ce cadre, le 11 juillet 2010 est adoptée la réglementation des marchés publics, prévoyant la marge de préférence nationale passant de 15% à 25%. En fait c'est le retour au tout Etat gestionnaire, à ne pas confondre avec l'Etat régulateur stratégique en économie de marché, le privé local de la sphère réelle ayant des capacités financières, technologiques et managériales fortement limitées, fortement connecté au secteur public par des relations de clientèles. 4. Urgence d'une gouvernance renouvelée Visibilité, visibilité, cohérence, cohérence, bonne gouvernance, bonne gouvernance, revalorisation du savoir, revalorisation du savoir, moralité, moralité, tels sont les axes fondamentaux du redressement national. C'est que face tant aux mutations mondiales qu'internes à la société algérienne, cette jeunesse "parabolée"; a une autre notion des valeurs de la société. Cela se constate à travers l'éclatement de la cellule familiale, la baisse progressive du poids des tribus, de certaines confréries religieuses et de certaines organisations syndicales, (ces dernières ne mobilisant uniquement pour des revendications sociales et non pour des actions politiques), du fait de discours en déphasage par rapport aux nouvelles réalités mondiales et locales. Notre analyse montre clairement que le fondement du système, de 1962 à 2010, repose sur la rente des hydrocarbures (cours et cotation du dollar). Les politiques socio-économiques ont peu varié à quelques variantes près, sous le slogan continué dans le changement, l'opposition véritable étant marginalisée et les nombreux micros partis insignifiants, souvent instrumentalisés par l'administration se manifestant qu'au moment des échéances électorales en contrepartie d'une fraction de la rente : industries clefs en main entre 1965/1979 , infrastructures clefs en main durant les périodes 1980/2010 et les différents gouvernements successifs ont été toujours animés par l'extraction des hydrocarbures, malgré bon nombres de discours car supposant un changement profond de politique et donc des réaménagements dans les structures du pouvoir existant des liens dialectiques entre la logique rentière et de la sphère informelle en extension que l'on ne combat pas uniquement par des mesures techniques de faibles efficacités existant une relation dialectique entre l'avancée des réformes ou leurs freins selon que le cours en termes réels hausse ou baisse. Les exportations hors hydrocarbures et cela depuis fort longtemps, de moins de 3% du total des recettes devises, 80% de valeur ajoutée composant le produit intérieur brut ( PIB) l'étant directement ou indirectement par le biais de cette rente autant que la fiscalité qui dépasse 70%. Aussi la solution durable passe par une gouvernance renouvelée, et la valorisation du savoir dévalorisée , la récente enquête , inquiétante, l'importante revue américaine Foreign Policy de juillet 2010 précisant que l'élite algérienne est malmenée par les difficultés de la vie, la marginalisation sociale, classant l'Algérie parmi les plus vulnérables au monde avec une note de 8,6 sur 10 pour la disparition et la dispersion de l'élite, s'agissant d'une des notes les plus mauvaises du monde et de conclure : les très bas salaires et l'environnement politique défavorable hypothèquent l'avenir de l'Algérie qui risque de se retrouver sans son intelligentsia pour construire son avenir. Or, ces deux facteurs sont déterminants pour le développement véritable en ce XXIème siècle, tenant compte de la concurrence et de cette mondialisation irréversibles, le principal défi étant la maitrise du temps. En fait réussir la transition implique la refonte de l'Etat. Or comme le rappelle avec justesse Malek Chebel (Interview à El Watan 20 aout 2010) " l'Algérie à l'instar de bon nombre de pays musulmans est en transition et fonctionne entre l'imaginaire de la Oumma et la construction d'un Etat-nation".