Docteur Abderrahmane MEBTOUL, Expert International Economiste Professeur d'Université en management stratégique 2ème partie et fin Un séminaire s'est tenu le 11 janvier 2009 à Alger sur la gestion des grands projets. Certains intervenants ont fortement insisté sur l'opacité de l'octroi des marchés publics qui absorbent l'essentiel de la dépense publique. Dans ces mêmes colonnes, j'ai attiré l'attention depuis des mois sur l'urgence de la lutte contre la mauvaise gestion et de la rationalisation des choix budgétaires, objet de cette contribution. Dans ce cadre, les travaux d'analyse, des coûts/avan-tages sociaux, les techniques américaines du Planning programming budgetary system (PPBS) ou françaises, technique de la rationalisation des choix budgétaires reposant sur la décomposition des dépenses publiques par objectifs aux moindres coûts, sont d'un apport appréciable pour les audits sur les services collectifs afin de tester de leur efficience. Il s'agit au sein de sous-sections compartimentées de définir une fonction-objectif permettant d'atteindre l'optimum sous réserves de contraintes tant internes qu'externes. La mise en œuvre de ces instruments de mesure traduit la volonté de faire le pont entre la micro et la macro- économie d'une part, d'autre part de lier les mécanismes macro-économiques et macro- sociaux permis- grâce à l'analyse systémique, le modèle étant ouvert et non fermé du fait de l'environnement mondial turbulent et variable. La gestion des services collectifs, l'amélioration de leur efficience dépend en grande partie de la mise en place des mécanismes globaux de régulation selon une vision cohérente, datée dans le temps, tant dans le domaine politique, institutionnel, économique que social. Les services collectifs doivent être gérés selon des normes fiables, étant souhaitable dans ce cadre de l'adoption de l'obligation de la loi de règlements budgétaires pour pouvoir permettre à l'APN de contrôler l'affectation et l'efficacité des deniers. A ce titre, il convient de se poser la question de l'efficacité des transferts sociaux qui ont atteint 463 milliards de dinars en 2005, plus de 586 en 2006, 677 en 2007 et 1.000 milliards de dinars pour la Loi de finances 2010, souvent mal gérés et mal ciblés, qui ne s'adressent pas toujours aux plus démunis. Comme l'atteste le rapport du 04 octobre 2009 du PNUD où l'Algérie vient d'être rétrogradée à propos de l'indice du développement humain beaucoup plus fiable que le PNB par tête d'habitant, de la 100ème place en 2008 à la 104ème place. Il semble bien qu'à travers la Loi de finances 2010, l'on ne cerne pas clairement les liens entre les perspectives futures de l'économie algérienne et les mécanismes de redistribution devant assurer la cohésion sociale, donnant l'impression d'une redistribution passive de la rente des hydrocarbures sans vision stratégique, bien qu'existe certaines dispositions encourageant l'entreprise. Dans ce cadre, de la faiblesse de la vision stratégique globale, le système algérien tant salarial que celui de la protection sociale est diffus , et la situation actuelle, plus personne ne sait qui paye et qui reçoit, ne connaissant ni le circuit des redistributions entre classes d'âge, entre générations et encore moins bien les redistributions entre niveaux de revenus ou de patrimoine. Or, le principe tant de l'efficacité économique et donc motiver au travail, que de justice sociale (les économistes parleront d'équité) pour éviter le divorce Etat/citoyens exige que l'on résolve correctement ces problèmes fondamentaux devant reposer sur des mécanismes transparents. En résumé, la gestion des services collectifs et de l'administration, la lutte contre la mauvaise gestion et la corruption renvoie à la question de bonne gouvernance, de démocratie, de la rationalisation de l'Etat dans ses choix en tant qu'identité de la représentation collective (1). Cela n'est pas une question de lois vision bureaucratique et d'une culture dépassée, l'expérience en Algérie montrant clairement que les pratiques sociales quotidiennement contredisent le juridisme. Il est utile de rappeler que le Président de la République lors de l'année judiciaire le 28 octobre 2009 se donne pour objectif de combattre la corruption, la bureaucratie, dévalorisant le couple intelligence/ travail sur le quel doit reposer tout développement fiable et donc d'asseoir un Etat de droit. Ce rêve si cher à tous les Algériens sera t-il réalisé ? Car, il ne s'agit pas de créer des commissions sans lendemain puisque l'Algérie avait déjà un observatoire de lutte contre la corruption sous la présidence de Liamine ZEROUAL, qui n'a jamais fonctionné, et se pose la question quel est le rôle de la Cour des Comptes, institution dépendant de la Présidence de la République selon la Constitution, de l'Inspection Générale des Finances, étant paradoxal qu'elle dépende d'un ministre pouvant être juge et partie et des commissions parlementaires. Aussi, s'agit-il de s'attaquer à l'essence de ce mal qui ronge le corps social qui est la bureaucratie paralysante qui envahit tout le corps social, en fait impliquant la refonte de l'Etat. C'est que la lutte contre la mauvaise gestion et cette corruption qui se généralise tendant à être socialisée, implique avant tout une moralisation de la pratique des structures de l'Etat eux mêmes au plus haut niveau, niveau de dépenses en contradiction avec les pratiques sociales malgré des discours moralisateurs, avec cette montée de la paupérisation qui crée une névrose collective. Car c'est seulement quand l'Etat est droit est qu'il peut devenir un Etat de droit. Quant à l'Etat de droit, ce n'est pas un Etat fonctionnaire qui gère un consensus de conjoncture ou une duplicité provisoire, mais un Etat fonctionnel qui fonde son autorité à partir d'une certaine philosophie du droit d'une part, d'autre part par une assimilation consciente des besoins présents de la communauté et d'une vision future de ses perspectives. La manière dont sont gérés les services collectifs et l'administration, alors que l'on s'appesantit souvent sur la gestion uniquement des entreprises publiques ayant à leur disposition une fraction importante du budget de l'Etat, la gestion de ces segments contredit les règles élémentaires de ce que les économistes font rentrer dans le cadre de l'économie publique. S'il faille éviter les règlements de comptes inutiles et qu'une personne est innocente jusqu'à preuve du contraire, (présomption d'innocence), pourtant comment croire aux discours, mobiliser les citoyens au moment où certains responsables au plus haut niveau ou leurs proches sont impliqués ou supposés impliqués dans les scandales financiers. Peuvent-ils avoir l'autorité morale auprès tant de leurs collaborateurs que de la population algérienne? Docteur Abderrahmane MEBTOUL, Professeur d'Université Expert International Ex Directeur des Etudes Economiques et Premier Conseiller à la Cour des Comptes NB- Pour ce sujet : - Article du Docteur Abderrahmaqne Mebtoul : «urgence de la rationalisation des choix budgétaires en Algérie » Quotidien d'Oran et El Watan février 1996. - L'ouvrage collectif pluridisciplinaire « Enjeux et défis de l'Algérie 2004/2009-Etat de droit- bonne gouvernance et économie de marché » ouvrage collectif pluridisciplinaire sur ce thème sous la direction de Abderrahmane Mebtoul (2 tomes 500 pages) paru à Casbah Editions (Alger-2005) avec la participation des professeurs Bouchama Chouam,(économiste) Mohamed Tayebi (sociologue- anthropologue ), des politologues Youcef Ikhleff et Mohamed Sabri . -« Le terrorisme bureaucratique et la corruption sont les obstacles principaux au frein à l'investissement porteur en Algérie » -Interview de A. Mebtoul au quotidien économique et financier français Les Echos (août 2008)