La communauté internationale n'est pas suffisamment préoccupée par l'avancée du désert dans les pays du Sud, comme en Algérie. Constat établi jeudi matin par Luc Gnacadja, Secrétaire exécutif de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification, invité de la chaîne III de la radio nationale. " Au Nord, l'image qu'ont les gens du changement climatique ce sont les ours polaires qui vont disparaître. Au Sud, ce sont les vies humaines qui sont en danger du fait de la sécheresse devenue plus longue et de la pluie qui vient d'une façon inattendue. Les États doivent comprendre le coût de l'inaction face à la désertification notamment en Afrique", a-t-il dit. Selon lui, les opinions publiques doivent être informées sur les dangers de la désertification. " Des dangers liés à la sécurité alimentaire, à la disparition des pâturages et à l'instabilité. Dans le monde, 80 % des crises violentes sont concentrées dans les zones arides. Des crises alimentées par la compétition pour accéder aux terres fertiles et à l'eau ", a-t-il souligné. Mettre un dollar dans la sauvegarde des terres dégradées permet, d'après lui, d'améliorer la sécurité alimentaire et de réduire la pauvreté. Aussi, a-t-il insisté sur la mise en valeur des terres qui doit être selon lui une priorité nationale pour les pays africains dans leur lutte contre la désertification. La mise en valeur des terres est un "impératif pour l'Afrique" pour lutter contre la désertification, un phénomène qui touche 41% du Continent et 2 milliards de personnes dans le monde, a déclaré M. Gnacadja lors d'une conférence animée en présence de cadres du secteur agricole et de représentants du corps diplomatique. Le conférencier a plaidé pour une intégration de la mise en valeur des terres dans la politique publique de chaque pays africain touché par ce phénomène. Se référant à des études internationales sur le phénomène de la désertification, M. Gnacadja, a indiqué que l'aridité va entraîner une diminution de la productivité des sols de 15 à 50% d'ici 2050, alors que le cycle de germination des graines sera réduit de 20%, a-t-il averti. Selon lui, la mise en valeur des terres permet, non seulement d'assurer la sécurité alimentaire des populations, mais aussi de réduire la pauvreté. Il a plaidé, dans ce sens, pour l'orientation des investissements des pays africains vers les zones rurales arides où se trouvent 50% du cheptel mondial. "Bien plus que celui effectué dans l'industrie, l'investissement dans la mise en valeur des terres permet de faire sortir plus de personnes de la pauvreté", a-t-il dit. L'expert onusien a regretté, par ailleurs, que les effets des changements climatiques prennent le dessus lors des négociations mondiales sur le climat, au détriment du phénomène de la désertification qui cause, selon lui, "plus de victimes directes que les changements climatiques". Mercredi Luc Gnacadja a estimé que l'Algérie "a été toujours un pays précurseur dans la lutte contre la désertification, puisqu'après le barrage vert, l'Algérie continue de lutter contre ce phénomène à travers un programme national de reboisement". Il a souligné, dans ce sens, l'intégration de la lutte contre la désertification dans les priorités du gouvernement algérien, contrairement à d'autres pays ou cette lutte a souffert d'un faible intérêt. L'Algérie préside le groupe africain dans le cadre de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification jusqu'à 2011. La visite de M.Gnacadja en Algérie rentre dans le cadre de la mise en œuvre de cette Convention et s'inscrit dans l'objectif d'échange d'expériences entre les pays signataires de cette Convention. L'Algérie met à la disposition des pays africains son expérience en matière de lutte contre la désertification qu'elle mène dans le cadre de la politique du renouveau rural, selon des responsables du secteur de l'agriculture. La lutte contre ce phénomène est l'un des programmes de référence de la politique du Renouveau rural à travers la protection des bassins versants, la conservation des écosystèmes naturels, et la mise en valeur des terres agricoles. Le programme de lutte contre la désertification pour 2010-2014, auquel l'Etat va consacrer 10 milliards DA par an, repose sur la protection du barrage vert (360.000 ha) et son extension sur 100.000 ha durant les cinq prochaines années, la protection des nappes alfatières sur 3 millions ha, et la protection et la valorisation des terres de parcours sur 32 millions ha. Le Plan national de reboisement vise à réaliser d'ici 20 ans plus de 1,2 million d'ha, soit 60.000 ha par an, selon la même source. Il est question, à moyen terme, de porter le taux de reboisement à 15 voire 20% d'ici 2014 contre 11% actuellement. En terme d'impact, ce programme va permettre d'arriver d'ici 5 ans à préserver quelque 8 millions d'ha menacés par ce phénomène.