Les révélations de WikiLeaks sur les cas de mauvais traitements couverts ou commis par l'armée américaine en Irak place Washington dans une très mauvaise posture par rapport à ses alliés. "Nous pouvons déplorer la manière dont ces fuites ont eu lieu mais je pense que la nature des allégations faites est extraordinairement sérieuse", a déclaré le vice-Premier ministre britannique Nick Clegg, dimanche dans une interview à la télévision BBC One. "Leur lecture est affligeante et elles sont très graves. Je suppose que l'administration américaine voudra fournir sa propre réponse. Il ne nous appartient pas de leur dire comment le faire", a-t-il ajouté. "Tout ce qui laisse à penser que des règles de base de la guerre, des conflits et du combat, ont été violées ou que de la torture a pu être de quelque manière que ce soit tolérée est extrêmement grave et doit être examiné", a poursuivi Nicl Clegg. "Les gens voudront entendre une réponse à ce qui se trouve être de très, très graves allégations, d'une nature que (...) tout le monde trouve très choquante", a-t-il insisté. "Nous pouvons déplorer la manière dont ces fuites ont eu lieu mais je pense que la nature des allégations est extraordinairement sérieuse", a déclaré le vice-premier ministre britannique Nick Clegg, dimanche dans une interview à la chaîne de télévision BBC One. "Leur lecture est affligeante et elles sont très graves. Je suppose que l'administration américaine voudra fournir sa propre réponse. Il ne nous appartient pas de leur dire comment le faire", a ajouté M. Clegg, connu pour son opposition à l'engagement de Londres dans la guerre en Irak, qu'il avait déjà qualifiée d'"illégale". Un hélicoptère de l'armée britannique était sur le point d'arrêter en 2005 le Jordanien Abou Moussab Al-Zarkaoui, chef d'Al-Qaida en Irak tué en 2006, mais a dû faire demi-tour car il manquait de carburant, indique un document publié par WikiLeaks, selon une analyse de The Observer. Le 17 mars 2005 en début d'après-midi, les services de renseignement britanniques basés à Bassorah localisent Al-Zarkaoui, dont la tête était alors mise à prix 25 millions de dollars, voyageant sur une route proche de la ville. Un hélicoptère Lynx surveille la zone pendant 15 minutes mais, après avoir épuisé ses réserves de carburant, doit retourner à sa base. "De ce fait, la zone intéressante a été sans surveillance pendant 20 à 30 minutes", ajoute le document confidentiel de l'armée américaine analysé par l'hebdomadaire britannique. Un bataillon arrive sur zone mais, faute d'appui aérien, ne peut qu'effectuer des recherches au hasard, qui restent vaines. "A 22 h 14, les recherches sont interrompues", conclut le rapport d'incident. Abou Moussab Al-Zarkaoui sera tué quinze mois plus tard, en juin 2006, par une frappe américaine. Les 400 000 rapports d'incidents rendus publics par WikiLeaks, écrits de janvier 2004 à fin 2009 par des soldats américains, relatent de nombreux cas de torture par les forces irakiennes, ainsi que "plus de 300 cas de torture commis par les forces de la coalition", selon le fondateur du site, Julian Assange. Plusieurs journaux, dont Le Monde, ont eu accès à ces documents avant leur mise en ligne pour en analyser la teneur. Le Monde s'est ainsi penché sur l'évolution du nombre de victimes du conflit, sur les civils morts à des checkpoints, ou encore sur la pratique de la torture par les policiers irakiens. Vendredi, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton avait condamné "la diffusion de toute information (...) faisant peser un risque sur la vie des soldats et des civils des Etats-Unis et de leurs alliés". Les ministères britannique et australien de la défense ont également dénoncé un danger pour les troupes sur le terrain. Le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture, Manfred Nowak, a néanmoins appelé le président américain Barack Obama à lancer une enquête. "Je me serais attendu à ce que [ce genre d'enquête] soit lancée depuis déjà longtemps, car le président Obama est arrivé au pouvoir en promettant le changement... Barack Obama a l'obligation de traiter les cas passés", a-t-il estimé samedi sur la BBC. Amnesty International a elle aussi appelé Washington à lancer une enquête, évoquant "une grave violation du droit international" quand les forces américaines ont remis "des milliers de détenus aux forces irakiennes tout en sachant qu'elles continuaient à torturer". L'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch a demandé que "l'Irak poursuive les responsables de tortures et d'autres crimes" et que "les Etats-Unis enquêtent". Washington a cependant opposé une fin de non recevoir à ces appels. Interrogé par la BBC, le porte-parole de l'armée américaine, le colonel Dave Lapan, a dit n'avoir pas l'intention d'ouvrir une enquête, affirmant que, en matière de mauvais traitements par des Irakiens, le rôle des soldats américains était "d'observer et d'établir un rapport" à leurs supérieurs chargés de le transmettre aux autorités irakiennes. Il s'agit là d'une "pratique habituelle" de la communauté internationale. En Irak, les partisans du premier ministre, Nouri Al-Maliki, ont eux aussi minimisé la portée des révélations de WikiLeaks : "Il s'agit d'une campagne médiatique contre l'Etat et le processus politique", a par exemple affirmé le député Hassan Al-Sinaïd, un proche du premier ministre qui tente de se maintenir au pouvoir pour un second mandat.