Les ministres des Finances des pays du Forum économique Asie-Pacifique (Apec) ont affirmé vouloir contenir les déséquilibres des échanges, contre lesquels les Etats-Unis ont renoncé à fixer un objectif chiffré à quelques jours du sommet du G20. Les représentants des 21 pays de l'Apec, parmi lesquels figurent les trois premières puissances économiques mondiales (Etats-Unis, Chine et Japon), se sont réunis vendredi soir et samedi à Kyoto (Japon). Ils ont affirmé dans un communiqué commun qu'ils tenteraient "de réduire les déséquilibres excessifs et de maintenir les déséquilibres des comptes courants à des niveaux soutenables". Le texte ne fait pas référence à un objectif chiffré et le secrétaire américain au Trésor, Timothy Geithner, a annoncé qu'il n'en proposerait aucun lors du sommet des pays riches et émergents du G20, les 11 et 12 novembre à Séoul. M. Geithner avait suggéré auparavant de limiter à 4% du produit intérieur brut les excédents ou déficits de la balance des comptes courants des pays du G20, mais cette idée suscitait une forte opposition, notamment de la Chine et de l'Allemagne, les deux principales puissances exportatrices, et même du Japon, proche allié des Etats-Unis. "Ce n'est pas quelque chose que vous pouvez réduire facilement à un simple chiffre", a reconnu M. Geithner. "Ce n'est pas souhaitable, pas nécessaire et c'est improbable pour l'instant". Les Etats-Unis et la Chine ont mis en sourdine samedi leurs critiques au sujet de leurs politiques économiques respectives mais Pékin n'a pas caché son inquiétude face à la nouvelle phase d'"assouplissement quantitatif" de la politique monétaire décidée par la Réserve fédérale américaine. La modération a dominé les discours tenus après deux jours de réunion des ministres des Finances des pays du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (APEC) au Japon. Etats-Unis et Chine ont apporté leur soutien à la volonté des pays industrialisés et émergents du G20 d'éviter un cycle de dévaluations compétitives et d'être vigilants face aux mouvements erratiques des taux des change. La décision de la Fed annoncée mercredi d'injecter 600 milliards de dollars dans l'économie américaine en rachetant des titres du Trésor pour soutenir la reprise a cristallisé les critiques, Washington étant accusée de jouer le cavalier seul au risque de provoquer des secousses dans l'économie mondiale. Pourtant, le vice-ministre chinois des Finances, Wang Jun, a apporté samedi un soutien mesuré au programme d'"assouplissement quantitatif". "Renforcer l'économie américaine jouera un rôle important dans la reprise économique mondiale", a-t-il dit. Il a toutefois ajouté: "En même temps, cette politique d'assouplissement quantitatif a déjà suscité l'inquiétude des nations émergentes, et nous continuerons de suivre attentivement son application." Et Wang, sans citer directement les Etats-Unis, a mis en garde les grandes économies contre les risques d'émissions monétaires excessives. Le communiqué de l'Apec met d'ailleurs en garde contre un "volume important" de capitaux affluant dans les pays émergents d'Asie, qui pourrait provoquer la naissance de bulles financières. A ce sujet, le ministre thaïlandais des Finances, Korn Chatikavanij, a prévenu que ce flot allait grossir avec la dernière mesure d'assouplissement monétaire de la banque centrale américaine, qui a décidé mercredi d'injecter 600 milliards de dollars dans le circuit financier pour soutenir la reprise. Provoqué par la faiblesse des taux d'intérêt dans les pays développés et par la confiance des investisseurs en l'Asie, ce flux a déjà provoqué une montée de 10 à 15% de la valeur des monnaies de la région par rapport à leur niveau d'avant la crise financière, selon la Banque Mondiale. Reprenant les termes du communiqué adopté par les ministres des Finances et banquiers centraux des pays du G20 le 23 octobre, les représentants de l'Apec se sont engagés en outre à "éviter les dévaluations compétitives des monnaies", alors que le risque d'une "guerre des devises" plane sur l'économie mondiale. "Du côté des taux de changes, nous essayons de construire un cadre de coopération qui pourrait aider à apaiser la tension et réduire les pressions que vous voyez sur les marchés mondiaux", a précisé M. Geithner. Cette rencontre des ministres de l'APEC, dans l'ancienne cité impériale de Kyoto, a eu lieu au terme d'une semaine durant laquelle la politique monétaire américaine et la proposition de Washington de fixer un seuil aux déséquilibres commerciaux et économiques ont suscité des critiques croissantes d'un certain nombre de pays, dont la Chine et l'Allemagne, les deux principales puissances exportatrices de la planète. Vendredi, un autre pays émergent, le Brésil, s'était ému de la décision de la Fed. Henrique Meirelles, gouverneur de la banque centrale, avait jugé que cette injection massive de liquidités risquait de créer des bulles spéculatives dans d'autres parties du monde. Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a estimé quant à lui que la politique monétaire américaine n'avait "pas de sens".