Plusieurs hauts responsables de la zone euro ont pris la parole jeudi pour assurer que la zone euro ne risquait pas d'éclater. Plusieurs économistes, surtout au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, évoquent désormais une dislocation de la zone euro, tiraillée par les déficits élevés des pays dits périphériques, en forte perte de compétitivité vis-à-vis de la locomotive allemande. "Il n'y a aucun danger", a dit jeudi Klaus Regling, directeur du Fonds européen de stabilité financière (FESF), au quotidien Bild qui lui a demandé si la zone euro pourrait éclater. "Il n'est pas concevable que l'euro s'effondre." "Bien sûr que la situation est grave", a-t-il ajouté lorsqu'il lui a été demandé de s'exprimer sur les propos de la chancelière Angela Merkel jugeant mardi la situation de l'euro "exceptionnellement grave". Le FESF a été créé cette année après la crise grecque et est censé intervenir au profit des pays de la zone euro qui auraient des difficultés financières. "Aucun pays n'abandonnera l'euro de son plein gré. Pour les plus faibles, cela serait un suicide économique, et d'ailleurs pour les plus forts aussi. L'Europe perdrait la moitié de sa valeur politique sans l'euro", a expliqué Klaus Regling. Il a ajouté que la France et l'Italie n'étaient aucunement en danger et que les autres pays de l'UE ne devaient pas exercer de pressions sur l'Irlande pour qu'elle augmente tel ou tel type d'impôt. "L'Italie a bien traversé la crise et a son déficit public en main. Et la France a la même notation crédit que l'Allemagne", a-t-il dit. La chancelière allemande Angela Merkel s'est déclarée convaincue jeudi que la zone euro surmontera la crise financière ayant conduit la Grèce et l'Irlande à demander une aide internationale. "Je suis plus confiante qu'au printemps quant au fait que l'Union européenne sortira renforcée des défis actuels", a déclaré Mme Merkel qui s'exprimait jeudi devant des dirigeants d'entreprise à Berlin. Elle faisait allusion au plan d'aide de 110 milliards d'euros accordés en mai dernier à la Grèce par l'Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI). L'Irlande a accepté dimanche le principe d'une aide de l'UE et du FMI au prix d'un programme d'austérité quadriennal qu'elle a présenté mercredi. Si ce plan prévoit notamment une hausse de la TVA, il ne touche pas à l'impôt sur les sociétés, dont le taux très bas (12,5%) passe mal auprès des autres pays de l'UE. Le coût d'assurance de la dette irlandaise a continué à grimper jeudi, les marchés restant sceptiques après l'annonce des modalités du plan de rigueur irlandais. La chambre de compensation européenne LCH. Clearnet a relevé jeudi, pour la troisième fois en une quinzaine de jours, ses appels de marge sur les emprunts d'Etat irlandais pour les porter à 45% des positions nettes (contre 30% depuis le 17 novembre), afin de tenir compte de l'écart de rendement entre les obligations souveraines irlandaises et allemandes. Les craintes d'une contagion de la crise irlandaise à la péninsule ibérique continuent à peser sur les marchés. L'euro, notamment, manquait d'élan pour rebondir au-dessus de 1,3335 dollar environ en milieu de journée. Cette peur que le Portugal et peut-être l'Espagne soient contraints d'accepter un plan international similaire à l'aide apportée à la Grèce au printemps et maintenant à l'Irlande provoque une envolée des coûts d'emprunt du Portugal et de l'Espagne. Le ministère portugais des Finances a démenti jeudi une réunion entre le ministre et les dirigeants des quatre plus grandes banques du pays, une information annoncée par le quotidien Diario Economico. Vitor Constancio, vice-président de la Banque centrale européenne et ancien gouverneur de la Banque du Portugal, a réaffirmé de son côté qu'il n'y avait aucun rapport entre l'Irlande et le Portugal. Chaque cas est différent, les secteurs bancaires et financiers irlandais et portugais sont différents, a-t-il martelé, ajoutant qu'il ne se livrerait pas au jeu des pronostics sur la nécessité d'une aide au Portugal. Le Portugal a connu mercredi sa première grève générale depuis 22 ans pour protester contre les mesures d'austérité prévues dans le budget 2011 que le gouvernement espère faire approuver vendredi par le parlement. La Commission européenne a fait savoir qu'aucune discussion n'était engagée concernant une aide financière de l'UE à apporter à d'autres pays. "Les arrières financiers sont assurés, ils sont tous bien alimentés et ils sont prêts à être utilisés si nécessaire et sur demande. Il n'y a pas actuellement de discussions en ce sens", a dit Amadeu Altafaj, porte-parole de la Commission, lors d'un point de presse. Le président de l'Eurogroupe Jean-Claude Juncker a pour sa part réaffirmé qu'il ne craignait pas pour l'euro mais que la position de l'Allemagne suscitait ses inquiétudes. "Je ne suis inquiet ni pour la survie de l'euro ni pour celle de l'Union européenne", a-t-il dit dans un entretien au journal allemand Rheinischer Merkur. "Je crains toutefois que l'Allemagne, le gouvernement fédéral et les autorités locales perdent peu à peu de vue le bien commun européen." R.I.