L'Iran a fait état hier de nouvelles avancées dans son programme nucléaire contesté, à la veille de l'ouverture de discussions sur ces activités avec les Occidentaux. Le vice-président Ali Akbar Salehi, par ailleurs chef de l'Organisation de l'énergie atomique de l'Iran, a affirmé que Téhéran avait produit pour la première fois du concentré d'uranium, donnant ainsi à Téhéran un moyen de contourner les sanctions de l'ONU interdisant l'importation de cet élément. Cette annonce témoigne de la détermination de Téhéran à maîtriser la technologie nucléaire sans aide extérieure, à la veille même d'une rencontre de haut niveau à Genève entre une délégation iranienne et des représentants de l'Union européenne. La Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères, Catherine Ashton, conduira la délégation européenne tandis que le secrétaire du Conseil de sécurité nationale, Saïd Jalili doit prendre la tête de la délégation iranienne. Les services de Mme Ashton ont précisé qu'elle interviendrait lundi et mardi "au nom" du Groupe des Six, qui réunit les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies (Etats-Unis, Chine, Russie, France, Grande-Bretagne) et l'Allemagne. Ali Akbar Salehi a déclaré à la télévision d'Etat que du concentré d'uranium (yellowcake) avait été produit à la mine de Gachin dans le sud de l'Iran et acheminé dans l'usine d'Ispahan afin d'être retraité. Il n'a pas fourni de précisions sur la quantité de concentré d'uranium transféré à Ispahan mais a déclaré que les acheminements se poursuivraient de façon continue. Il a aussi souligné que cela signifiait que les Occidentaux ne pourraient pas stopper le programme nucléaire iranien. Jusqu'à présent, l'Iran a développé son programme d'enrichissement d'uranium à partir de quelque 600 tonnes de yellowcake achetées à l'Afrique du sud dans les années 70, avant la révolution islamique de 1979. L'exportation de yellowcake vers l'Iran est interdite depuis 2006 par les sanctions de l'ONU contre le programme nucléaire iranien, et certains experts occidentaux espéraient que l'Iran épuiserait ses stocks avant de parvenir à en produire. Début 2009, une étude de l'Institut international pour la science et la sécurité estimait que Téhéran avait consommé 75% de ses réserves. "L'Iran est désormais autosuffisant pour l'ensemble de la chaîne de production de combustible" nucléaire, depuis la production de minerai jusqu'à celle de combustible nucléaire, a affirmé M. Salehi. "Cela va renforcer notre position aux négociations" nucléaires avec les grandes puissances, qui doivent reprendre lundi à Genève après un an d'interruption, a-t-il ajouté. L'enrichissement d'uranium est au coeur du conflit opposant depuis plusieurs années l'Iran à la communauté internationale, qui soupçonne Téhéran de chercher, malgré ses dénégations, à se doter de l'arme atomique sous couvert de son programme nucléaire civil. Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a réaffirmé samedi que le "droit inaliénable" de l'Iran à enrichir de l'uranium, reconnu par les traités internationaux, n'était "pas négociable". Résistant à plusieurs condamnations par l'ONU, à des sanctions économiques internationales sévères, et à des pressions multiples incluant plusieurs attentats contre ses scientifiques nucléaires, Téhéran a déjà produit plus de trois tonnes d'uranium faiblement enrichi (3,5%) et plus de 33 kilos d'uranium enrichi à 20%, selon l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). L'uranium doit être enrichi à plus de 90% pour pouvoir être utilisé dans une bombe atomique. L'Iran affirme avoir besoin de produire de l'uranium enrichi notamment pour alimenter un réacteur de recherche nucléaire à Téhéran, et accuse les puissances nucléaires de chercher à préserver un "monopole" scientifique et technique.