Selon une récente étude publiée par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), l'augmentation des prix de la plupart des produits alimentaires de base ainsi que l'accélération de la hausse du prix du pétrole se poursuivent. Dans une note complémentaire publiée au début du mois de mars, le représentant du Cirad Nicolas Bricas a estimé qu'"l'évolution récente ne permet malheureusement pas d'être rassuré sur les risques de crise qui continuent d'être élevés voire qui tendent à augmenter ".Le même document fait ressortir le fait que l'évolution des prix des produits alimentaires sur les marchés internationaux durant le mois de février est contrastée. Ainsi, le blé, le soja et le sucre ont vu leur prix commencer à redescendre. A contrario, ceux du maïs , des huiles de palme et de soja continuent leur progression. Le prix du maïs dépasse 700 US$ la tonne, pratiquement équivalent au niveau atteint lors du pic de 2008. Le prix de la viande est également en hausse compte tenu de l'augmentation du prix de l'alimentation animale. Le prix du riz reste relativement stable bien que plusieurs observateurs craignent qu'il suive la tendance des autres produits dans les semaines à venir. Sur le marché de Bangkok, le prix FOB du riz 100% et de la brisure restent stables. Sur le marché de Chicago, le prix tend à monter. La hausse des produits tropicaux d'exportation, café, cacao, coton se poursuit également mais on ignore toujours la part de cette hausse dont bénéficient les producteurs vulnérables. Quelques informations partielles indiquent que la transmission de cette hausse jusqu'aux producteurs reste limitée. Selon le Cirad, le plus inquiétante est l'accélération de la hausse du prix du pétrole qui dépasse désormais le seuil des 115 US$ la tonne. Elle devrait encourager une logique inflationniste sur les autres produits alimentaires. Elle améliore la rentabilité des agro-carburants et contribue à l'augmentation de la demande en maïs et en huiles végétales. Aux USA, l'accroissement de la production de maïs se fait au détriment de celle de blé entraînant une tension sur le marché des céréales. Le prix du pétrole contribue également au prix des intrants et du transport. Après être redescendu en 2009 à son niveau de 2006, le prix du phosphate repart à la hausse depuis 2010 : il a augmenté de 60% en un an. Celui de l'urée a augmenté de 35% sur la même période. Si pour les pays exportateurs la hausse du prix du pétrole compense en partie la hausse des prix des aliments, elle représente une charge supplémentaire pour les pays importateurs. Le dollar se dévalue par rapport à l'euro depuis le début de l'année 2011, atténuant légèrement les factures dans cette devise des pays dont la monnaie est indexée sur l'euro, comme les pays africains de la zone franc. Sur les marchés d'Afrique, d'Asie centrale, d'Amérique Latine et des Caraïbes suivis par Fews Net, les prix des produits de base augmentent moins vite que les prix internationaux du fait de bonnes récoltes dans ces pays (avec bien sûr des exceptions) et d'une relativement faible transmission des prix. Les hausses observées s'expliquent en partie par les variations annuelles classiques. Les prix du sucre et de l'huile importés ont cependant augmenté dans plusieurs pays. En Afrique de l'Ouest, les troubles en Côte d'Ivoire affectent le trafic de marchandise du port d'Abidjan et dans le pays. Une poursuite durable de ces tensions sociales est susceptible de créer des difficultés de ravitaillement à partir du port. Plusieurs facteurs combinés sont mis en avant pour expliquer la hausse des prix internationaux. Selon le Cirad, il s'agit de plusieurs accidents climatiques, au Canada, en Ukraine et en Russie, en Australie et en Argentine se sont traduits par une production moins élevée que celle espérée. Les productions de blé de Russie et d'Australie accusent une forte baisse : de 84 Mt en 2009/10 à 66 Mt en 2010/11 pour ces deux pays. Mais ce sont surtout les exportations de Russie qui sont affectées et peu celles d'Australie. La production mondiale de blé estimée pour 2010/11 chute de 5,4% par rapport à l'année d'avant. Par ailleurs, la crainte et le constat d'une hausse provoquent des réactions de rétention sur le marché, limitations d'exportations et constitutions de stocks, ou des achats importants pour sécuriser des approvisionnements à des coûts encore raisonnables. La crise de 2008 est encore dans tous les esprits. La Russie exportait plus de 18Mt en 2008/09 et 2009/10. Elle n'exportera que 4 Mt en 2010/11.Plusieurs pays, l'Egypte notamment ont acheté massivement des céréales fin 2010 et début 2011 pour se constituer des stocks. Aussi, et bien qu'il soit difficile d'en mesurer l'impact sur les prix, les volumes de contrats sur les marchés à terme ont nettement augmenté depuis 2009 (Figures 11 à 15). Cette augmentation concerne à la fois les contrats commerciaux (provenant d'opérateurs des filières) (Figures 11 et 13) et les contrats purement spéculatifs. D.T.