Contrairement à l'an dernier, où le festival de Cannes recevait le très controversé long "Hors la loi " de Rachid Bouchareb, cette année, point d'œuvres pour défendre sur la Croisette les couleurs nationales. Pas d'œuvres certes, mais la coqueluche des algériens, la Biyouna nationale montera le 21 mai prochain, soit deux jours avant la clôture de la plus grande fête du cinéma au monde, les marches rouge du rendez-vous cannois.C'est que la comédienne qui est depuis sa rencontre foudroyante, en l'an 2000, avec son réalisateur Nadir Mokhnéche, est entrée dans le " panthéon " du star system. Pas étonnant de la voir sur toutes les télés du monde à côté d'un Brad Pitt colossale ou d'une Penelope Cruze, impitoyable. C'est que la Biyouna endosse un rôle important dans le film " La source des femmes" du réalisateur roumain établi en France, Radu Mihaileanu. Ce long métrage retenu dans la sélection officielle de la vingtaine de films prévu à Cannes, sera dès le 21 mai prochain à l'affiche de la Croisette. Très attendu, "La source des femmes ", qui sera soumis au jury, fait parti des quatre films français qui seront en lice pour la prestigieuse statuette dorée. En 2007, lorsque Nadir Mokhnéche envoyait son dernier né, "Delice paloma " où Biyouna tenait le premier rôle comme toujours, la sélection cannoise a dit non pour sa participation. La comédienne fut alors très éprouvée : je suis hors de moi. Cannes j'y tenais. Ce refus me rend si triste," avouait-elle à cette époque. Car la comédienne sait que le rendez-vous cannois est plus qu'une carte de visite, et pour les œuvres qui y sont montrées, et pour les acteurs qui montent les marches. 2011, c'est chose faite, Biyouna sera en talon aiguille, en robe paillette, regardant en haut d'un monde où tout peut arriver. Elle sera avec une pléthore de femmes du Maghreb avec lesquelles elle a fait cette formidable aventure signée Radu Mihaileanu. On retrouve dans ce qui semble être un film féministe, de nombreuses comédiennes qui ont fait leur preuve dans d'autres films qui sont allés à Cannes. Il s'agit entre autre de Leïla Bekhti, Hafsia Herzi (présente à La Quinzaine en 2009 avec Le roi de l'évasion et récompensée d'un prix en 2008 pour son rôle dans La Graine et le mulet de Abdellatif Kechiche) et Sabrina Ouazani (qui avait monté les marches l'an passé pour Des hommes et des dieux). Celles-ci constituent d'ailleurs, le jeune trio féminin majeur de cette Source des femmes. A la coécriture et à la musique, on retrouve deux fidèles de Mihaileanu : Alain-Michel Blanc (césarisé pour Va, vis, deviens) et Armand Amar (césarisé pour Le Concert). Le tournage s'est déroulé l'automne dernier, au sud de Marrakech. Ambiance orientale garantie, avec une Biyouna loufoque qu'on verra sur un âne, portable à la main, entrain de chercher " le réseau". dans le rôle de Leila, une femme rebelle, on redécouvre une Leila Bekhti, déjà auréolée d'un César pour Tout ce qui brille. Elle foulera donc pour la deuxième fois les marches pour un film en compétition, trois ans après Un prophète. Elle avait aussi fait partie du casting de Paris, je t'aime, sélectionné à Un Certain Regard en 2006. Enjeu important, depuis son premier long, Trahir, en 1993, Radu Mihaileanu ne cesse de voir les spectateurs affluer de plus en plus nombreux vers ses films. Mais jamais il n'avait eu les honneurs d'une sélection cannoise. " La source des femmes" marque donc une étape majeure pour lui. Entre l'ancien et le moderne Inspiré comme souvent par une histoire vraie, il mettra en scène une jeune femme vivant dans un petit village d'Afrique du Nord qui se rebelle contre la corvée d'eau qu'imposent les hommes à la gente féminine. Et propose à ses congénères de faire la grève de l'amour tant que leurs compagnons ne mettront pas la main à la pâte. Certains critiques voient dores et déjà dans ce long métrage, une redoutable responsabilité de voir un réalisateur Roumain établie en France, se faire l'écho des révoltes qui secouent le monde arabe. Film très actuelle donc qui sans doute glanera, de par sa fraicheur et son engagement pour la justice, un quelconque prix à Cannes. "La source des femmes " dont la sortie internationale est prévue pour le 2 novembre prochain, met en scène des femmes qui malgré tout sont les gardiennes d'un équilibre fragile. Avec ce choix pas si innocent de comédiennes maghrébines ou d'origine maghrébine et d'autres étrangères à la renommée internationale (soit débutante ou espoir du cinéma français et d'autres nettement confirmées), il est évident que le réalisateur voulait redonner la parole aux femmes, et même plus, un lieu magique d'expression d'une révolte, soit-elle fictive dans un univers aussi populaire que le cinéma. Hiam Abbas aux côtés d'une Biyouna burlesque, c'est du jamais vu sur le grand écran. Biyouna nationale qui s'internationale glanera t- elle un prix ? Si oui, sa fortune est faite, si non, le seul fait de monter les marches en participant à la compétition cannoise avec un film aussi pathétique, c'est déjà un trophée en soi.