Depuis une année, les troupes théâtrales se penchent de plus en plus sur l'œuvre populaire de Abdelkader Alloula. A Tlemcen où se déroule la manif de " capitale de la culture islamique 2011 ", la jeune troupe du théâtre régional de Constantine a rendu un hommage posthume au défunt dramaturge à la Maison de la culture qui porte son nom à travers une pièce symbolique, "Lejouad ", (Les généreux).Signée, Tayeb Dehimi du TRC qui a mis à contribution quelques habitués des planches tels Ahcène Benaziez, Aïssa Redaf et Izem Zoubir, et surtout une pléiade de jeunes férus des tréteaux constantinois, cette pièce fut remodelée pour coller à l'actualité du moment. On y retrouvera d'ailleurs certains " tags " qui n'expliquent pas la "Harga " mais qui la dénoncent, d'autres refus sur les décors comme la "hogra " qui gangrène nos administrations. Pièce pour la justice, on y verra, si celle-ci sera à l'affiche du prochain festival national du théâtre professionnel, un Ahcène Benaziez dans le rôle d'Akli aux côtés de Kamel Ferrad, dans le rôle de l'ami Mnouar. Akli, le cuisinier d'un lycée qui fait don de ses ossements à l'établissement qui l'emploie afin que son squelette puisse servir de support didactique à l'enseignante de science. Ahcène Benaziez conduit également le rôle d'un autre généreux: Errebouhi. Un ferronnier dans une commune qui brave les interdits pour venir en aide à des animaux qui mourraient de faim dans un parc zoologique. Il faut savoir que Alloula est connu d'abord pour avoir joué sous la direction de Mustapha Kateb " les enfants de la casbah ", par les pièces comme "Lejouad " et "Arlequin ". Le dramaturge, avait affiné la gageure de parler vrai, considérant l'art comme un "déclencheur de prise de conscience ". C'est donc un théâtre engagé qu'a voulu fonder cet artiste qui puisait l'essentiel de son œuvre dans la tradition du Goual. Puisant dans cette tradition, Abdelkader Alloula a écrit une trilogie El-Agoual (Les Dires) 1980, El-Adjouad (Les Généreux) 1984, El-litham (Le Voile) 1989. Rassemblée sous le titre " Les dires éclatés de 1980 à 1989 " l'omniprésence de la narration est prise en charge par le goual. Des chroniqueurs voient en Abdelkader Alloula " l'artiste complet " qui a tenté de refondre " la structure théâtrale ", toujours à l'écoute tant du public que "des petites gens ", avec comme moyens la simplicité du verbe et le génie populaire, et comme unité de but " théâtraliser les faits " de société. En mars dernier, la ville d'Oran, rendait elle aussi un hommage posthume à Abdelkader Alloula, disparu il y a tout juste 17 ans. Initié par l'Institut de développement des ressources humaines de "haï El-Menzah" (IDRH, Canastel) de concert avec la Fondation Abdelkader éponyme que gère la veuve du défunt, ce rendez-vous commémoratif était une nième occasion d'évoquer non pas l'artiste mais l'homme dans sa dimension humaniste. Universitaires , hommes de culture, anciens compagnons et amis du regretté ont témoigné du parcours artistique de Alloula, de son génie créatif et de son attachement à la société. "C'était un homme de grande carrure, aux sens physique, intellectuel et humain", avait souligné Mohamed Bahloul, le directeur de l'IDRH, pour décrire Alloula dont il garde également l'image d'un être "enraciné dans sa société". L'enseignant-chercheur Mohamed Bensalah a considéré que "l'œuvre d'Alloula est toujours d'actualité". Constamment mobilisé aux côtés des personnes démunies ou affectées par de graves pathologies, l'assistance avait longuement évoqué le côté humaniste de l'artiste. Une table ronde assez riche où les intervenants ont tous été pour la valorisation de l'œuvre de Alloula auprès des jeunes artistes. Pour sa part, Radja, sa veuve a rappelé que sa Fondation a pris plusieurs initiatives dans ce sens qui ont donné lieu à la création d'un Centre de documentation et d'archives théâtrales. Ce centre, domicilié au centre culturel "Segheir Benali" de haï Ibn Sina (ex-Petit Lac) a pour objectif de valoriser le 4e Art algérien, dont le fonds Alloula, tout en encourageant les jeunes troupes théâtrales.
Un humain nommé Alloula Dieu seul sait que Alloula a buté sur des " luttes culturelles " féroces qui l'ont poussé à modeler son approche du théâtre, avec comme pièce-maitresse " Homk Salim ". Les spécialistes assimilent d'ailleurs cette pièce à un manifeste de " messages artistiques et sociaux ", ou encore "Lejouad" et "Arlequin" par lesquelles l'artiste est contre tout faux-semblant. C'est donc un théâtre engagé qu'a voulu fonder cet artiste qui puisait l'essentiel de son œuvre dans la tradition du Goual. Rappelez -vous qu'avant l'existence des portables, c'était dans les souks, qu'on s'informait. Les " diseurs " annonçaient une nouvelle, un événement…etc. Ceux qui entendaient sa voix se dirigeaient vers lui pour mieux écouter. D'emblée, ils formaient un cercle qui s'appelle halqa en arabe. Ce cercle permet ainsi de situer le diseur, qui est appelé officiellement le goual, au centre. Il devient le centripète de la narration. Toujours à l'écoute tant du public que " des petites gens ", avec comme moyens la simplicité du verbe et le génie populaire, et comme unité de but " théâtraliser les faits " de société, Abdelkader Alloula (1939 - 1994) a animé durant plus de trente ans un théâtre en arabe populaire résolument inscrit dans la vie de la cité. Tour à tour acteur, metteur en scène et auteur dramatique, il fut également administrateur de théâtre et directeur de troupe. Né à Ghazaouet, le jeune Alloula s'initie au théâtre amateur au lycée, suit un stage d'art dramatique en France et rejoint le Théâtre national algérien à sa création en 1963. Il faut savoir que pour la manif de Tlemcen, un peu plus d'une dizaine de pièces neuves seront montrées.