Le week-end dernier, le Centre culturel français d'Alger, (CCF) rendait un hommage posthume au défunt poète Jean Sénac à travers la projection d'un film qui porte son nom d'Eric Sarner (Fr, 2010). Ami de l'Algérie, pour les indépendances, homme de gauche et humaniste convaincu, Jean Senac est l'un des poètes français qui s'est très tôt engagé contre son pays hégémonique, pour la liberté du peuple algérien. En septembre 2004, lors du 9è Salon du Livre d'Alger, le CCF lui rendait un hommage posthume à travers les "Journées Sénac".Tourné en Tunisie et en Algérie, avec l'acteur Charles Berling, "Le Soleil assassiné " était visible à la 60è Mostra de Venise 2003. Des spectacles dont " Entre soleil et Chardon " dirigé par Jacques Miel, " Jean Sénac, l'enfant désaccordé " mis en scène par Marie-Paule André, des films dont le fameux, " Le Soleil assassiné " d'Abdelkrim Bahloul, " Le Forgeron du soleil " d'Ali Akika " , des photographies d'Yves Jeanmougin prises sur les lieux qui ont marqué la vie du poète et une installation d'Arezki Larbi….. ont été proposés durant plusieurs jours. Pour la circonstance un excellent livre, rassemblant des photos, des textes inédits de son œuvre poétique, des témoignages de ses amis, a été en outre publié. Né en 1926 à Béni-Saf, de père inconnu, le poète Jean Sénac fut également le chroniqueur attentif et l'agitateur infatigable de la vie intellectuelle de son époque. Ami d'Emmanuel Roblès et de Sauveur Galliéro, Jean Sénac est l'auteur d'un grand nombre d'articles sur la littérature et les arts, d'émissions radiophoniques dédiées à la poésie et d'autant de prises de positions publiques. En 1954, année du déclenchement de la guerre d'Algérie, Jean Sénac voit ses poèmes publiés par Albert Camus chez Gallimard, avec une préface de René Char. Demeurant en France durant le conflit, ce compagnon des indépendantistes rompt ensuite avec Camus, à qui il conserve une "profonde et dramatique affection", puis retourne au pays en 1962 et opte pour la nationalité algérienne. Nommé conseiller du ministre de l'Education de la jeune république, Sénac lance une nouvelle émission de radio qui s'intitule, " Le Poète dans la cité ", il ouvre la Galerie 54 avec Mohammed Khadda et publie " La Rose et l'Ortie ". Il connaît la disgrâce après le coup d'Etat de juin 1965 et démissionne de l'Union des Ecrivains Algériens, à la tête de laquelle il avait été porté en 1963 aux côtés de Mouloud Mammeri. Jean Sénac réalise alors une nouvelle émission radiophonique baptisée "Poésie sur tous les fronts" et se remet à publier avec Citoyens de beauté (1967). Auteur d'une Anthologie de la nouvelle poésie algérienne (1971), il n'a jamais cessé de prodiguer ses encouragements à toute une génération de jeunes plumes et de peintres. En 1972, la diffusion de son émission est interrompue par la direction de la chaîne. Jean Sénac alias Yahia El-Ouahrani (Jean l'Oranais), le poète homosexuel qui signait d'un soleil, est mort assassiné le 30 août 1973 à Alger dans des circonstances encore mal élucidées. Au jour de sa mort, dans sa "cave-vigie" du 2 rue Elisée-Reclus (aujourd'hui Omar Amimour), sa naturalisation n'avait toujours pas abouti. Plus de trente ans après, sa brutale disparition continue d'alimenter la discussion sur le sort fait aux intellectuels dans le pays et aux promesses non tenues de l'indépendance. En septembre 2003 à Alger, une exposition de la Bibliothèque nationale d'Algérie présentait une part du fonds Jean Sénac, "déposé en exécution de son testament" avait tenu à rappeler l'écrivain et ex-directeur de la B.N Amin Zaoui. En octobre, c'était au tour du festival des Francophonies en Limousin d'accueillir la création de Nous sommes à l'orée d'un univers fabuleux, à partir de textes de ce "clandestin des deux rives", dans une mise en scène d'un natif d'Alger : Hervé Loichemol.