Soraya Zekalmi : encore un nom qui ne vous dit rien! Parions que dans pas longtemps ce nom remplira vos oreilles ! Sans vous faire attendre, présentons la : elle est jeune, algérienne, belle, même très belle et elle chante…..Rien de plus banal diriez-vous ! Mais ce qui n'est pas banal, c'est qu'elle chante en indou. Mieux, elle vient même de parapher son premier album, "Darsthan" littéralement " vison du divan " à compte d'auteur. Soutenue par le centre Wallonie-Bruxelles Musiques, une institution qui travaille à faire connaître des artistes belges hors de leurs frontières, l'artiste est sans doute ce qui a de plus réussi dans une époque mondialiste. Dans l'antiquité, on sait que romains et grecs ont longtemps voyagé de l'Europe jusqu'en Asie. Les arabes, bien plus tard, leur ont emboité le pas pour sillonner la route de la soie convoitant ainsi la précieuse matière servant à habiller notables et khalifes. Au 21ème siècle, Soraya Zekalmi née en Algérie et vivant en Belgique s'y est rendue non pas pour chercher fortune ou savoir artisanal pour fabriquer dans sa PME, des étoffes en soie pour riches, mais elle y est allée pour toute autre chose. Bref rappel : il faut savoir que la musique indienne a des liens historiques avec la musique arabe surtout la musique andalouse, transmise par des conquistadors arabes entre le 9ème et 16ème siècle. Il existe même de petites communautés indiennes qui sont d'origine arabe et de confession musulmane. Celles-ci se sont formées à l'époque de la découverte de la Route de la soie, par des conquistadors qui ont épousé des indiennes et qui se sont définitivement établies en Inde. Ce lien certes fort, Soraya Zekalmi le rappelle de façon épatante à travers la musique qui a longtemps voyagé avant elle, et qu'elle continue de faire voyager à travers les concerts qu'elle compte animer et l'album qu'elle a signé et dont on peut écouter quelques extraits sur le Net. Mais comment a-t-elle choisi de chanter dans cette langue plutôt que dans l'autre ? En 1994 alors que la chanteuse se rendait en Inde qu'elle découvre pour la première fois ce pays en même temps que sa musique, à l'occasion d'une initiation spirituelle. Sur le champ, elle eut un coup de foudre pathétique pour ces mélodies qui ne lui étaient pas étrangères parce que si proches des mélodies arabes qu'elle chantait avant cela. C'est alors que Soraya Zekalmi va entreprendre un profond apprentissage, notamment auprès de Dhruba Ghosh, l'un des maîtres du sarangi, ce violon indien traditionnel, qui lui enseigne la musique classique de l'Inde du Nord - la région de l'Inde où l'influence musulmane est la plus importante. Elle a appris la langue ourdou et c'est dans cette langue qu'elle chante la tradition indienne classique. Un album transatlantique "Darshan ", son premier opus est un terme religieux de l'Inde qui signifie " vision du divin " ou "être en présence de la divinité ". Le Darshan est un moment où le dévot est en contact visuel avec l'idôle d'un dieu, un avatar, un maître spirituel vivant ou la représentation d'un maître défunt. Cela semble s'apparenter d'ailleurs avec l'Ahellil, un autre genre musical du sud algérien, où des confréries évoquent Dieu par des chants sacrés, du crépuscule jusqu'au petit matin. "Darshan " s'ouvre par quelques "doum takata - takata doum takata ...." scandés par une voix masculine, typiques de la musique indienne, avant que le chant de Soraya ne s'élève, dans cette langue qu'elle a apprise. Ik-pyaar", diffuse une infinie sérénité : la sagesse indienne, mise en musique ?... Et quand Soraya chante en arabe classique un Mouwashah, poème musical de l'époque classique andalouse ("Moushah"), la pièce vient s'insérer aussi harmonieusement qu'une pièce de soie dorée le serait sur un caftan marocain : car le rythme du morceau, lent et qui évoque une longue avancée au rythme de la marche dans le désert (celui du Rajasthan est redoutable !), pourrait tout aussi bien être arabe qu'indien... Soraya Zekalmi pourrait se définir avant tout comme un patchwork des influences du monde. Affectée dans son enfance par le déchirement de sa culture, elle se construit par son engagement social dans des associations de jeunes immigrés et par le biais de la musique et du chant traditionnel arabes. "Darshan" est le lien entre la musique profane et les chants extatiques dévotionnels indiens! "Darshan" est un album de témoignages du voyage de Soraya Zekalmi, itinérant entre l'inde et le proche-orient. Parions qu'un jour, c'est elle qui sera invitée à chanter pour célébrer des accords diplomatiques, entre l'Algérie et l'Inde.