Le très actif théâtre régional de Béjaïa rendait hommage la semaine dernière avec une pièce inédite, " Le poète comme boxeur ", au keblouti Kateb Yacine. Signée Kheireddine Lardjam et interprétée par Samir El Hakim et Amazigh Kateb, le fils du poète, cette pièce fait écho à son œuvre éponyme que vient d'adapter la compagnie El Adjouad. Beaucoup de monde dans la salle; 22 ans après la mort de l'auteur de Nedjma, ses idéaux connaissent toujours une adhésion sans faille. Pas grand bruit autour de la programmation de cette pièce, et pourtant le théâtre régional de Béjaïa a connu la cohue des grands jours. Le bouche à oreille aurait fonctionné mieux que n'importe quel relais médiatique. Avec pour Interprètes Samir El Hakim et Amazigh Kateb, le metteur en scène Kheireddine Lardjam voulait rendre hommage à l'iconoclaste Kateb Yacine, dont l'écrit " Le poète comme boxeur " n'est pas du tout connue. Le spectacle théâtral du genre montage poétique a été aussi à des moments partagé entre chants de résistants et portrait de l'écrivain...Avec un montage de Samuel Gallet, le spectacle se veut un travail sur les textes du poète comme nous pouvons le lire dans le prospectus: "Travailler sur les textes du poète algérien, faire entendre la voix de celui pour qui la résignation à la réalité officiellement admise et établie fut toujours impossible, venir questionner le rapport que nous entretenons avec lui en ce début du vingt-et-unième siècle, me semblent être des enjeux véritables (...)" Avec "Le poète comme boxeur", Kheireddine Lardjam a travaillé sur la base d'un recueil de textes et d'interviews assemblés par le jeune dramaturge Samuel Gallet. Il faut rappeler que la passionnante relation qu'à eue l'écrivain Kateb Yacine avec les planches a été redécouverte à la faveur d'un Colloque international consacré à l'auteur de " Nedjma" disparu, presque jour pour jour, il y a 22 ans. Ce rendez-vous hautement académique s'était déroulé à Guelma, près de chez lui dans l'Est, du 25 au 28 octobre dernier, une date qui correspondait à l'anniversaire de sa disparition. Il s'agissait tout au long de cette rencontre d'analyser la vision très populaire qu'à eue Kateb Yacine pour un théâtre résolument protestataire et tirant son langage de celui des plus grandes masses. La salle de cinéma de la ville, El Intissar, accueillait pas mal de chercheurs et d'universitaires qui ont livré 16 communications en rapport avec la littérature du Maghreb, selon Ali Abbassi président de l'Association de la promotion du tourisme et des activités culturelles de la wilaya de Guelma, et également responsable de la commission de préparation du colloque. Les chercheurs s'étaient déplacés à partir de plusieurs pays dont la France, la Belgique et l'Autriche. Côté algérien, les invités étaient venus des universités d'Oran, de Sidi Bel-Abbès, de Béjaïa, de Tizi Ouzou, de Skikda et de Guelma. Outre les chercheurs, ce colloque rassemblait des artistes, des cinéastes et des hommes de lettres algériens de renom, dont Rachid Boudjedra qui donnait une conférence sur " l'homme et son œuvre " et Bouziane Benachour qui intervenait sur le thème " Kateb Yacine, ou l'expression vivante de l'être social ". Un film documentaire d'une durée de 70 minutes, réalisé par Djilali Khellas était projeté à l'occasion de cette rencontre, suivi par un autre film réalisé par Brahim Hadj Slimane. Jamais l'œuvre katébienne n'a été aussi revisitée que ces dernières années où les pouvoirs publics ne ratent aucune occasion d'organiser des hommages posthumes à la gloire de l'écrivain. En 2009, une tournée artistique a eu lieu dans pas mal de villes algériennes pour faire découvrir et l'œuvre théâtrale et l'œuvre littéraire de l'iconoclaste keblouti. La dimension intellectuelle et humaine de l'écrivain et poète Kateb Yacine fut d'ailleurs évoquée par le professeur de littérature à l'université d'Annaba, Cheniki qui a retracé l'expérience théâtrale de l'auteur de Nedjma, lequel avait décidé après 1970, d'écrire en arabe dialectal pour "dire le vécu et rompre, ainsi, avec le genre romanesque, en poursuivant son aventure artistique avec la réalisation de pièces, marquées par les jeux poétiques et l'engagement politique".