Les Egyptiens se sont rendus, hier, aux urnes pour élire le premier président de l'après-Moubarak lors d'un scrutin âprement disputé par un islamiste et une figure de l'ancien régime considérée comme le candidat de l'armée. Le second tour est intervenu alors que le Parlement a été dissous dans un contexte de tourmente politique. Près de 50 millions d'électeurs sont appelés à se rendre aux urnes sur deux jours pour départager le Frère musulman Mohammed Morsi et Ahmad Chafiq, le dernier Premier ministre d'Hosni Moubarak chassé du pouvoir par une révolte populaire en février 2011, arrivés en tête lors du 1er tour fin mai. Les résultats officiels sont attendus le 21 juin. Mesures sécuritaires Beaucoup de Coptes (chrétiens d'Egypte) craignent de ne plus trouver leur place dans une société en majorité musulmane si un islamiste arrive au pouvoir et disent qu'ils vont voter pour M. Chafiq, un général à la retraite qui a axé sa campagne sur la sécurité. Au total, environ 150 000 militaires ont été déployés pour assurer la sécurité des bureaux de vote. Les autorités ont déclaré fériés les deux jours du deuxième tour, afin d'inciter la population à se rendre aux urnes. L'élection a lieu sur fond d'incertitudes politiques, les pouvoirs du futur président n'ayant toujours pas été entièrement définis. Critique Les détracteurs de l'armée l'accusent aussi d'avoir orchestré la décision de la Haute cour constitutionnelle, annoncée jeudi, d'invalider pour un vice dans la loi électorale les résultats des élections législatives remportées par les Frères musulmans. La même cour a aussi permis à M. Chafiq de rester dans la course en invalidant une loi interdisant aux personnalités de l'ancien régime de se présenter à l'élection. Avant-hier, le chef du CSFA, le maréchal Hussein Tantaoui, a formellement signifié par écrit la décision de justice au Parlement dans une lettre et annoncé qu'il "le considère dissous depuis vendredi. Cette mesure a été contestée par les Frères musulmans qui ont réclamé qu'elle soit soumise à référendum. Faible affluence au deuxième jour du scrutin Une faible affluence a été constatée dans les bureaux de vote, hier, deuxième et dernier jour du scrutin présidentiel dans la plupart des provinces égyptiennes, selon les rapports des correspondants des chaînes de télévision locales. Aucune plainte n'a été signalée la nuit dernière au niveau de la cellule mise en place au ministère de l'Intérieur concernant la sécurité des urnes, a indiqué une source sécuritaire. Le scrutin pour la présidentielle en Egypte se déroule sous haute surveillance en vue de préserver la sécurité dans le pays, notamment avec la recrudescence des actes de violence à la veille des élections . Selon des rapports de presse, le dispositif sécuritaire a été renforcé au niveau des centres de vote afin de parer à tout dérapage. Le premier jour du scrutin a été marqué par une faible affluence des électeurs aux bureaux de vote par rapport au premier tour devant l'appel au boycott des "candidats de la révolution". Des tentatives de fraude ont été par ailleurs relevées durant ces élections. Il s'agit de bulletins de vote marqués dont la plupart appartiennent à Mohamed Morsi. D'autres infractions liées à la campagne faite en faveur de candidats devant les bureaux de vote ont été également constatées. Le pouvoir législatif et les finances, ressort de l'armée Le pouvoir législatif et les finances publiques en Egypte après l'élection d'un nouveau président devraient rester du ressort des militaires en l'absence d'un Parlement élu, ont indiqué, hier, des sources militaires. Dans une Déclaration constitutionnelle complémentaire attendue dans les prochaines heures, le Conseil suprême des forces armées (CSFA) au pouvoir devrait s'attribuer de facto "le pouvoir législatif et le contrôle des budgets de l'Etat" en l'absence de Parlement dissous samedi sur ordre de justice, ont précisé les sources. Ces prérogatives, assumées par le CSFA après la chute de Hosni Moubarak en février 2011, avaient été transférées en janvier au Parlement issu des législatives. Ce Parlement a été dissous en application d'un arrêt de la Haute cour constitutionnelle annulant l'élection des députés au motif d'un vice juridique dans le mode de scrutin. La Déclaration constitutionnelle attendue devrait apporter aussi des précisions sur les pouvoirs du futur président issu de l'élection présidentielle.