Le médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe Kofi Annan se démenait, avant-hier, pour assurer la tenue de la réunion ministérielle sur la Syrie prévue aujourd'hui à Genève et menacée par des objections russes à son plan de transition politique, ont indiqué des diplomates à l'ONU. Plusieurs ministres des Affaires étrangères, dont ceux des Etats-Unis, de France et du Royaume-Uni, ont menacé de ne pas se rendre à Genève si la réunion risquait de ne pas aboutir à l'adoption de ce plan. De sérieuses menaces pèsent désormais sur la réunion de Genève, a déclaré un diplomate sous couvert d'anonymat. Il est très important que la réunion de Genève aboutisse à un résultat. Nous pensions que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité s'étaient mis d'accord en principe sur le plan de transition, mais les déclarations des Russes depuis 24 heures semblent remettre cela en question, a-t-il ajouté. La Russie, alliée de Damas, a émis des objections au plan de transition politique proposé par M. Annan. Celui-ci prévoit la mise en place d'un gouvernement provisoire d'union nationale dont pourraient être exclus certains responsables du gouvernement syrien actuel. Pour tenter de sauver la réunion ministérielle d'aujourd'hui, Kofi Annan a convoqué pour une réunion préparatoire de hauts fonctionnaires des principales puissances (Russie, Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Chine) et s'est entretenu avec les chefs de la diplomatie de ces cinq pays. Il s'efforce de trouver une solution avec les Russes, a ajouté le même diplomate. La Russie a dans un premier temps donné son accord, explique-t-il. Mais depuis la convocation de la conférence, nous avons l'impression qu'ils reviennent sur leur position, ce qui est très regrettable et pourrait remettre en cause la conférence. Un autre diplomate a estimé que la tenue de la conférence ministérielle dépendait désormais surtout des entretiens prévus vendredi à Saint-Pétersbourg entre les chefs de la diplomatie américaine et russe, Hillary Clinton et Sergueï Lavrov. Il est vraisemblable que Clinton et Lavrov, ne pourront pas se séparer sur un constat d'échec, a-t-il jugé. Le document proposé par Kofi Annan en prévision de Genève précise que le gouvernement de transition pourrait inclure des membres du gouvernement actuel et de l'opposition mais qu'en seraient exclus ceux dont la présence pourrait nuire à la crédibilité de la transition et mettre en danger la stabilité et la réconciliation. Certains diplomates avaient d'abord suggéré que cette clause pourrait impliquer un départ du pouvoir du président Bachar al-Assad et que la Russie n'y serait plus opposée. Mais Sergueï Lavrov a affirmé jeudi que la Russie n'accepterait aucune recette imposée de l'extérieur et qu'il n'y avait pas de projet approuvé pour la conférence de Genève. Pour nous, explique un diplomate occidental, le document Annan doit être le point d'arrivée des discussions à Genève et ne doit pas subir de changement substantiel alors que les Russes le considèrent comme un point de départ. Les Russes font de plus en plus de rétropédalage, ajoute-t-il. Lavrov s'entretient avec Annan par téléphone sur la réunion de Genève Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov s'est entretenu, avant-hier, par téléphone avec l'émissaire de l'ONU Kofi Annan sur la réunion internationale sur la crise en Syrie, prévue aujourd'hui, à Genève, selon un communiqué de son ministère. Durant cette conversation téléphonique les deux hommes ont précisé des aspects organisationnels de la rencontre internationale le 30 juin à Genève sur la régulation de la crise en Syrie, est-il écrit dans le communiqué. Avant cette réunion, M. Lavrov a également rencontré, hier, la Secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton à Saint-Pétersbourg, dans le nord-ouest de la Russie. Annan recommande une série d'étapes pour la transition démocratique Le médiateur international Kofi Annan préconise une série d'étapes claires et irréversibles vers une transition démocratique en Syrie, dont un gouvernement provisoire d'union nationale, dans un document préparé en vue de la réunion d'aujourd'hui. Dans ce document, intitulé directives et principes pour une transition menée par les Syriens, M. Annan souligne qu'il revient au peuple (syrien) de déterminer l'avenir du pays. Il envisage une aide internationale importante en cas d'accord entre pouvoir et opposition sur une transition. Ce document de travail a été soumis aux membres du Groupe d'action sur la Syrie qui se réunissent à Genève samedi, dont les membres permanents du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Russie, Chine, France et Royaume uni), ainsi que la Turquie et des pays membres de la Ligue arabe. Le texte insiste sur la nécessité d'établir des étapes claires et irréversibles dans la transition selon un calendrier précis mais ne fixe pas d'échéance. Parmi les étapes figure la mise en place d'un gouvernement provisoire d'union nationale qui puisse créer un environnement neutre favorable à cette transition. Ce gouvernement, qui exercerait de véritables pouvoirs exécutifs, pourrait inclure des membres du gouvernement actuel, de l'opposition et d'autres groupes non précisés. Mais en seraient exclus ceux dont la présence pourrait nuire à la crédibilité de la transition et mettre en danger la stabilité et la réconciliation, ajoute le texte. Certains diplomates ont suggéré que cette clause pourrait impliquer un départ du pouvoir du président Bachar al-Assad, et que la Russie, fidèle alliée de Damas, n'y serait plus opposée. Toujours selon le document, M. Annan prévoit aussi un dialogue national large et une révision de la constitution et du système judiciaire, dont le résultat serait soumis à référendum populaire. Ensuite, seraient organisées des élections libres, équitables et pluripartites pour les nouvelles institutions et postes ainsi créés. Les femmes doivent être pleinement représentées dans tous les aspects de la transition, note le document. En cas d'accord, les membres du Groupe d'action sont prêts à offrir un important soutien, affirme le texte. Il évoque l'éventualité d'une présence internationale pour fournir une assistance sous mandat de l'ONU et la mise à disposition de fonds importants pour aider à la reconstruction du pays. Explosion près du palais de justice de Damas Une forte explosion a été entendue, avant-hier, à Damas, à proximité d'un marché et du palais de justice, provoquant un nuage de fumée noire qui s'élevait dans le ciel. Au moins trois personnes ont été blessées et une vingtaine de voitures endommagées, a annoncé la télévision publique. D'après la télévision publique, l'explosion s'est produite sur le parking du palais de justice à 13h, près du marché d'Hamidiyeh, très fréquenté par les habitants de la capitale syrienne. Selon des militants, des affrontements ont opposé des soldats et des rebelles dans d'autres régions de Syrie, faisant une douzaine de morts. Certains des combats les plus violents ont eu lieu dans les villes de Deir el-Zour (est), précisait-on de mêmes sources.