Il y aura de la tension dans l'air entre Hillary Clinton, William Hague et Alain Juppé, d'un côté, et Sergueï Lavrov, de l'autre. Les chefs de la diplomatie des Etats-Unis, d'Europe et de Russie se réuniront aujourd'hui au siège des Nations unies, à New York, pour célébrer officiellement le Printemps arabe, mais la Syrie devrait dominer les débats qui s'annoncent conflictuels, selon des diplomates. Parmi les ministres des Affaires étrangères présents à cette réunion du Conseil de sécurité de l'ONU figurent l'Américaine Hillary Clinton, le Russe Sergeï Lavrov, le Britannique William Hague, le Français Alain Juppé et l'Allemand Guido Westerwelle. Depuis le début de la crise syrienne, il y a un an, malgré plus de 7500 morts, les 15 membres du Conseil ont été incapables de s'accorder sur une résolution condamnant la répression féroce menée par le régime du président Bachar Al Assad, en raison notamment de l'opposition résolue de la Russie. Une mission de médiation de Kofi Annan, émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe auprès de Damas, entamée samedi, n'a donné pour l'instant aucun résultat tangible. «Al Assad est déterminé à ne pas céder et le fossé se creuse entre la Russie et les Occidentaux», explique un diplomate de haut rang d'un pays membre du Conseil. «La rencontre de Kofi Annan à Damas (avec Bachar Al Assad) n'a semble-t-il mené nulle part. On ne voit pas comment cette réunion (de lundi) peut déboucher sur autre chose que de nouvelles frictions.» Moscou et Pékin, fidèles alliés de Damas, ont par deux fois opposé leur veto à des résolutions du Conseil de sécurité dénonçant la répression en Syrie. Des négociations entamées sur un nouveau texte, proposé notamment par les Etats-Unis, sont au point mort. Hillary Clinton et Sergueï Lavrov auront un entretien bilatéral lundi en marge de la réunion du Conseil. Echaudés par l'intervention militaire en Libye, la Russie et la Chine accusent les Occidentaux de vouloir un changement de régime à Damas. Ils insistent pour que toute résolution mette sur le même plan la répression du régime et les violences des groupes armés d'opposition, ce que les Occidentaux refusent. Le veto russe à l'épreuve Les Occidentaux misaient sur un infléchissement de la position russe après la victoire de Vladimir Poutine à la présidentielle, mais Moscou, un des principaux fournisseurs d'armes à la Syrie, campe sur ses positions. Après avoir rencontré au Caire M. Annan et des responsables arabes, M. Lavrov a affirmé que Moscou «protégeait le droit international» et il a dénoncé une «ingérence grossière» dans les affaires intérieures de la Syrie. La Chine, de son côté, mène ses propres contacts diplomatiques, sur la base d'un plan préconisant notamment des négociations entre régime syrien et opposition. Pékin a chargé un de ses diplomates, Zhang Ming, de faire le tour des capitales arabes et occidentales. Il sera mercredi à Paris, après l'Egypte et l'Arabie Saoudite. «Nous l'écouterons et puis nous rappellerons, si cela est encore nécessaire, notre analyse de la situation et l'importance et l'intérêt qui s'attachent à ce que la Chine évolue sur sa position au Conseil de sécurité», a expliqué le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernard Valero. Certains diplomates au sein du Conseil de sécurité craignent que les dissensions sur la Syrie ne débordent sur d'autres dossiers. «Le risque désormais est que la querelle diplomatique s'étende à d'autres zones comme l'Iran ou le conflit israélo-palestinien», explique l'un d'eux. La réunion d'aujourd'hui sera présidée par William Hague, le Royaume-Uni assurant en mars la présidence tournante du Conseil. Y assisteront aussi les chefs de la diplomatie du Portugal, du Guatemala et du Maroc. Les débats doivent commencer par l'adoption d'une résolution prolongeant le mandat de la mission de l'ONU en Libye. En préambule se tiendra une réunion du Quartette (Etats-Unis, Russie, Union européenne et ONU), qui tente de relancer les négociations israélo-palestiniennes, bloquées depuis septembre 2010. Y participeront Hillary Clinton, Sergueï Lavrov et le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon. La chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, interviendra par vidéoconférence. La dernière réunion formelle du Quartette remonte au 23 septembre 2011 à New York, à l'occasion de l'Assemblée générale de l'ONU.