Soixante-sept ans après, la ville d'Hiroshima dans le sud-ouest du Japon s'est recueillie, hier, à la mémoire des victimes du premier bombardement nucléaire de l'histoire. Quelque 50 000 personnes, parmi lesquelles des survivants, proches des victimes, membres du gouvernement japonais et délégués de 70 pays, se sont rassemblés au Mémorial de la Paix, sur le lieu de l'explosion. Une cloche a sonné et une minute de silence a été observée, hier matin. C'est l'heure exacte à laquelle le bombardier B-29 américain Enola Gay a largué le 6 août 1945 sur Hiroshima une bombe atomique, d'un pouvoir de destruction équivalent à environ 15 000 tonnes de TNT. L'explosion, qui détruisit la majeure partie de la ville, fit près de 140 000 morts. Trois jours plus tard, le 9 août, la ville de Nagasaki (sud-ouest) était à son tour visée par un bombardement nucléaire, qui fit 80 000 morts et fut suivi par la capitulation du Japon. "La civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie". La réaction d'Albert Camus dans l'éditorial de Combat au lendemain du bombardement atomique d'Hiroshima témoigne du choc produit par cet événement dans le monde entier. Clifton Truman Daniel, petit-fils du président américain Harry Truman qui ordonna les bombardements, était présent à la cérémonie. S'exprimant par la suite lors d'une conférence de presse, il n'a pas souhaité commenter les décisions prises par son grand-père. "Je viens deux générations plus tard", a expliqué Clifton Truman Daniel, 55 ans. "Il est maintenant de ma responsabilité de faire mon possible pour que nous n'utilisions plus jamais des armes nucléaires", a-t-il ajouté, cité par les médias nippons. Le gouvernement américain était de son côté représenté à la cérémonie par l'ambassadeur des Etats-Unis, John Roos. Cette commémoration intervient dans un Japon encore traumatisé par la catastrophe à la centrale nucléaire de Fukushima, consécutive au séisme et au tsunami du 11 mars 2011. Le maire d'Hiroshima, Kazumi Matsui, a réaffirmé son engagement à oeuvrer en faveur d'un monde sans armes nucléaires. Il a souligné l'importance du souvenir, alors que l'âge moyen des rescapés d'Hiroshima est de 78 ans. Et l'accident de Fukushima, a-t-il ajouté, illustre les dangers de l'atome, y compris pour un usage civil et pacifique. Naoto Kan plaide à nouveau pour sortir du nucléaire Le Premier ministre japonais Naoto Kan a réitéré son engagement à œuvrer à une société sans énergie nucléaire, lors des commémorations du bombardement atomique d'Hiroshima, marquées cette année du sceau de la catastrophe nucléaire de Fukushima. "L'accident de grande ampleur, et qui se poursuit, a causé des fuites radioactives, déclenchant de graves inquiétudes au Japon mais aussi dans le reste du monde", a déclaré M. Kan lors d'une cérémonie dans le Parc de la paix d'Hiroshima. Je réduirai la dépendance du Japon envers l'énergie nucléaire, avec pour objectif la création d'une société qui ne dépendra pas de l'énergie nucléaire", a-t-il ajouté. "Nous ne devons jamais oublier la calamité nucléaire qui a attaqué Hiroshima il y a 67 ans. Nous ne devons jamais permettre qu'une chose pareille se reproduise", a encore dit M. Kan. Un site internet recueille les témoignages des survivants A l'occasion de ce 67e anniversaire, un nouveau site Internet qui présente des témoignages inédits de Japonais qui ont survécu à la bombe atomique et qui vivent aujourd'hui sur le continent américain est mis en ligne. Le Secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, s'est engagé à contribuer à la conservation et à la diffusion des témoignages de survivants de la bombe atomique, connus en langue nippone sous le nom de " Hibakusha ", afin de s'assurer que leurs récits seront disponibles pour les générations à venir. C'est en 2010, lors de sa visite au Japon, alors qu'il était le premier Secrétaire général de l'Onu à participer à des cérémonies pour la paix à Hiroshima et Nagasaki, que Ban Ki-moon s'est engagé à forger des partenariats avec des organisations en vue de préserver les paroles des témoins. Quatre jours de jeûne en souvenir Plusieurs associations antinucléaires organisent quatre jours de jeûne dans la capitale française Paris la semaine prochaine, entre le 6 août, anniversaire du bombardement d'Hiroshima en 1945, et le 9 août, celui de l'attaque contre Nagasaki, pour demander l'abolition des armes nucléaires. Environ 70 personnes sont inscrites à l'étape parisienne de ce jeûne international organisé chaque année aux dates anniversaires des bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki qui ont tué quelque 200 000 personnes en 1945. L'opération a démarré, hier, à 08H15 au Mur pour la Paix, sur le Champ de Mars. Sortir du nucléaire, collectif de 900 associations, rappelle que seulement neuf pays disposent d'arsenaux nucléaires: les cinq reconnus comme détenteurs dans le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) Russie, Etats-Unis, France, Royaume-Uni et Chine, ainsi que la Corée du Nord, l'Inde, le Pakistan et Israël. Aujourd'hui, 20 000 bombes nucléaires sont toujours en activité, dont 2 000 en état d'alerte.