L'Union européenne (UE) s'apprête à vivre, aujourd'hui, l'un des psychodrames dont elle a le secret, avec la décision très attendue de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe en Allemagne et les élections aux Pays-Bas où va se jouer une partie du destin d'un continent miné par la crise de la dette. Le premier acte aura lieu en début de matinée (07H00 GMT) à Strasbourg, où le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, doit présenter son troisième "état de l'Union" devant les députés européens. Le chef de l'exécutif européen tracera les grandes lignes de sa politique pour l'année à venir. Deux axes devraient être mis en avant: la mise en place d'une supervision bancaire européenne, et une avancée vers une véritable union politique, suite logique selon M. Barroso, de l'union monétaire qui lie déjà 17 des 27 Etats de l'UE. Face aux eurodéputés conservateurs du PPE réunis en séminaire la semaine dernière à Florence (Italie), M. Barroso, a mis les points sur les "i". "La crise peut mettre en péril la fondation du projet européen lui-même", a-t-il averti. "Parfois, on n'a pas l'impression que nous partageons un destin commun", a-t-il déploré. Il faut faire un pas plus grand "La perte de confiance des citoyens dans l'Europe nous oblige à avoir une réponse politique. Les mois à venir seront décisifs pour faire sortir les Européens d'une situation difficile et pour définir une voie d'avenir", a-t-il souligné. M. Barroso, pourrait plaider en faveur d'une révision des traités européens. "On a accepté l'idée d'une approche étape par étape", a dit M. Barroso, à Florence. Or, a-t-il ajouté, "il y a des moments où il faut faire un pas plus grand. Nous en sommes là". De toute évidence, M. Barroso, devra faire preuve de pédagogie et de conviction. Le groupe du PPE, où siègent notamment les élus français de l'UMP, a demandé à M. Barroso, "des actes et non des paroles", et les libéraux se disent déçus que "très peu de choses aient changé" depuis l'an dernier. Surtout, le discours sur "l'état de l'Union" pourrait ne pas résister à la décision de la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe, attendue vers 08H00 GMT. Les juges allemands doivent rendre leur avis sur le Mécanisme européen de stabilité (MES), décisif pour le sauvetage en cours de la zone euro, et sur le pacte budgétaire. Un rejet empêcherait la ratification du MES, entraînant de facto son naufrage et une incertitude majeure sur l'avenir de la zone euro. La semaine dernière, le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble, s'était dit "sûr" que la haute juridiction "ne bloquera pas ces traités". Mécanisme de sauvetage indispensable Le MES doit à terme remplacer le Fonds européen de stabilité financière (FESF). Doté de 500 milliards d'euros, il doit pouvoir recapitaliser directement les banques et acheter des obligations sur les marchés primaire et secondaire. Ce mécanisme, indispensable en cas de recours à l'aide européenne par l'un des pays de la zone euro, devait entrer en vigueur début juillet et a vu sa mise en œuvre retardée par l'examen des plaintes déposées devant la Cour de Karlsruhe. Enfin, tous les eurodéputés regarderont du côté des Pays-Bas, où auront lieu des législatives anticipées, perçues comme un indicateur de l'exaspération de l'Europe du Nord vis-à-vis de l'UE et de la crise économique. Seul motif de consolation pour l'UE, les pro-européens, libéraux et travaillistes ont réussi à se hisser en tête des sondages qui ont longtemps donné l'avantage à la gauche radicale eurosceptique.