Le Laos a confirmé, avant-hier, avoir entamé les travaux d'un barrage controversé sur le fleuve Mékong, affirmant que toutes les objections de ses voisins avaient fini par être levées après un an et demi de suspension du projet. Une cérémonie de pose de la première pierre a eu lieu la veille à Xayaburi, dans le nord-ouest du pays, a indiqué le vice-ministre de l'Energie Viraphonh Viravong. Les ambassadeurs du Vietnam et du Cambodge étaient présents, a-t-il ajouté pour insister sur l'accord de ceux qui étaient à l'origine les deux principaux adversaires du barrage. Hanoi et Phnom Penh ont réagi avec prudence, exprimant une certaine confiance sans pour autant donner carte blanche aux Laotiens. S'ils constatent que le projet de construction a des impacts négatifs, nous espérons qu'ils l'arrêteront, a indiqué le ministère des Affaires étrangères à Hanoï. Le Premier ministre cambodgien Hun Sen s'en est pour sa part entretenu avec le président laotien Choummaly Sayasone, avant de donner son accord de principe, selon le site internet du gouvernement. La construction de la centrale hydroélectrique de Xayaburi, projet de 3,8 milliards de dollars mené par le groupe thaïlandais CH Karnchang, suscite les plus vives réserves d'organisations écologistes et a divisé les pays riverains du fleuve pendant des mois. La Commission régionale du Mékong (Vietnam, Cambodge, Thaïlande et Laos) avait suspendu en mai 2011 la construction du barrage, premier d'une série de onze sur la partie inférieure du fleuve. Le Vietnam et le Cambodge craignaient en particulier pour leur stock de poissons et de sédiments. Vientiane a depuis assuré avoir modifié le projet pour répondre à ces inquiétudes. Le quotidien officiel Vientiane Times avait notamment indiqué en juillet que le barrage serait équipé d'un système permettant à 85% des poissons de le franchir. Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a dénoncé une biodiversité du fleuve en grave danger, demandant à la Thaïlande de ne pas fermer les yeux sur le barrage. Le Laos remet en cause l'équilibre d'un des plus grands systèmes fluviaux du monde, a estimé le Dr. Li Lifeng, un responsable de la WWF. Le Laos, dépourvu d'accès à la mer et de tissu industriel, mise sur l'énergie fluviale pour appuyer son développement et rêve de devenir la pile de l'Asie du sud-est. Mais le projet de Xayaburi est devenu un symbole des risques pesant sur le fleuve. Les écologistes affirment que le barrage, d'une capacité de 1.260 mégawatts, serait désastreux pour les 60 millions d'habitants qui dépendent du fleuve pour le transport, l'alimentation et l'économie. Alors que la Thaïlande doit acheter la grande majorité de l'électricité produite par la centrale, des riverains thaïlandais du Mékong ont déposé en août un recours en justice à Bangkok contre sa construction. Aucune décision n'a été annoncée pour l'instant.