La production industrielle a fortement augmenté en Chine en novembre, signalant après sept trimestres de ralentissement un rebond de la croissance qui arrive à point nommé pour les nouveaux dirigeants du pays, installés au pouvoir le mois dernier. Avec 10,1% de hausse sur un an, la production de l'industrie chinoise a connu une progression à deux chiffres pour la première fois depuis le mois de mars, selon les chiffres publiés, avant-hier, par le Bureau national des statistiques (BNS). Cet indicateur se redresse constamment depuis le mois d'août, lorsqu'il avait atteint avec 8,9% son plus faible niveau en plus de trois ans. Une reprise de l'activité en novembre avait déjà été esquissée il y a une semaine avec la première expansion de l'activité manufacturière relevée en 13 mois par la banque HSBC. "La tendance à une reprise de la croissance s'est renforcée au quatrième trimestre", a déclaré Sun Junwei, économiste pour la Chine de HSBC, qui prédit un rebond à 8% pour la période octobre - décembre et 8,6% de croissance en 2013. Hausse des ventes de détail La hausse du Produit intérieur brut (PIB) chinois est tombée à 7,4% au troisième trimestre, son niveau le plus faible depuis le premier trimestre 2009. L'accélération en cours de la croissance est confirmée par d'autres indicateurs publiés dimanche. Les ventes de détail, jauge de la consommation des ménages, ont ainsi progressé de 14,9% en novembre sur un an, contre 14,5% en octobre. Enfin, les investissements en capital fixe, qui ont contribué l'an passé pour plus de la moitié à la formation du Produit intérieur brut (PIB), ont augmenté sur les onze premiers mois de l'année de 20,7%, soit exactement au même rythme que pour les dix premiers. "Cet ensemble de chiffres est assez bon, et soutient l'idée d'un rebond de la croissance du PIB", a également réagi Lu Ting, économiste pour la Chine de Bank of Amercia - Merrill Lynch, dans une note d'analyse. Pour soutenir l'activité, la banque centrale chinoise a depuis décembre dernier baissé par trois fois les réserves obligatoires des banques, leur permettant ainsi de prêter davantage, et diminué les taux d'intérêt directeurs en juin et juillet pour encourager les emprunteurs. Hausse des prix Mais afin de ne pas relancer la spirale inflationniste, Pékin s'est abstenu de tout plan de relance de grande envergure. La hausse des prix a rebondi à 2% en rythme annuel le mois dernier, contre 1,7% en octobre, mais l'inflation reste avec 2,7% de hausse sur les onze premiers mois largement en-dessous de la limite des 4% arrêtée en mars par le gouvernement. Et les prix à la production, un indicateur avancé de la pression inflationniste à venir, continuent à baisser, bien qu'à un rythme plus faible qu'auparavant. Les statistiques économiques publiées, avant-hier, sont les premières depuis l'arrivée au pouvoir de nouveaux dirigeants à Pékin à l'occasion du 18e congrès du parti communiste, qui s'est tenu le mois dernier. "La nouvelle direction (chinoise) menée par Xi Jinping, va probablement poursuivre sa politique budgétaire de soutien à l'activité l'an prochain pour assurer une croissance stable", selon Liu Ligang, économiste de la banque australo-néo-zélandaise ANZ. "Le rebond de la croissance va être la priorité numéro un à court terme", selon Mme Sun, qui relève que "la réunion du Bureau politique tenue il y a quelques jours a mis l'accent sur la continuité et la stabilité". Les réformes structurelles de l'économie que le gouvernement veut mettre en œuvre afin d'accorder plus de place à la consommation et le même accès au crédit aux entreprises privées qu'au secteur étatique ne sont pas oubliées, mais elles attendront si nécessaire. "Les dirigeants vont intensifier progressivement leurs efforts de réforme aux cours des prochains trimestres. Mais il n'y aura pas de changements du jour au lendemain", prévient l'économiste de HSBC. "Certains attendaient davantage de mesures de soutien à la croissance de la nouvelle direction, mais c'est improbable", estime pour sa part Ren Xianfang, économiste de IHS Global Insight basé à Pékin, notant que de telles mesures ne fonctionneraient plus désormais pour les secteurs souffrant de surcapacités, comme la sidérurgie ou les fabricants de panneaux solaires. Réduction de l'excédent commercial La Chine a annoncé une importante contraction de son excédent commercial et une hausse très faible de ses exportations en novembre, mais ces mauvais chiffres ne menacent pas le rebond en cours de la croissance dans la deuxième économie mondiale, selon les analystes. L'excédent a diminué de 38,6% pour tomber à 19,6 milliards de dollars, contre 32 milliards de dollars en octobre, ont rapporté les douanes. Les exportations n'ont augmenté que de 2,9% sur un an à 179,4 milliards de dollars et les importations ont affiché une croissance nulle, à 159,8 milliards de dollars. Ces chiffres sont largement en-dessous des attentes des économistes interrogés par l'agence financière Dow Jones, qui avaient prédit une croissance de 9,6% des exportations et de 1,9% des importations, et un excédent commercial de 27,8 milliards de dollars. Pour les onze premiers mois de l'année, le volume du commerce extérieur chinois a augmenté de 5,8%, bien dessous de l'objectif d'environ 10% de croissance affiché par le gouvernement au mois de mars. Les échanges avec l'Union européenne, premier partenaire commercial de Pékin, ont particulièrement souffert et sont en recul de 4,1% pour la période janvier-novembre, tandis que ceux avec les Etats-Unis ont au contraire progressé de 8,2% dans le même temps. Les échanges avec le Japon, sont aussi en baisse, de 2,9%. Les analystes s'attendent à ce que la croissance, tombée au troisième trimestre à 7,4%, son plus bas niveau depuis le 1er trimestre 2009 et en ralentissement pour sept trimestres consécutifs, rebondisse au quatrième trimestre. "Le ralentissement des exportations montre que la demande externe est confrontée à des incertitudes en raison du mur budgétaire aux Etats-Unis", qui risquent d'être soumis à une sévère cure d'austérité si un accord n'est pas trouvé entre démocrates et républicains, a commenté Zhang Zhiwei, économiste chez Nomura basé à Hong Kong. "Toutefois, nous maintenons que la croissance est en route pour rebondir fortement au quatrième trimestre, principalement tirée par des facteurs internes", a ajouté cet analyste. Selon nombre d'économistes, le rebond actuel est largement dû à des travaux d'infrastructure lancés pour donner un fouet à l'activité durant la période transition au sommet du pouvoir en Chine. De nouveaux dirigeants ont pris les rênes du Parti communiste à l'occasion de son congrès en novembre et doivent s'installer à la tête de l'Etat et du gouvernement en mars, ce qui rend encore plus nécessaire le maintien de la stabilité sociale. "Le rebond de l'économie était juste une question de temps, alors que le cycle de déstockage qui a démarré durant le dernier trimestre 2011 touche à sa fin. Mais des facteurs politiques ont apparemment contribué à l'anticiper", a estimé Ren Xianfang, économiste chez IHS Global Insight basée à Pékin. Pour cette analyste, "la croissance extrêmement faible des exportations est un élément de plus prouvant que la reprise est fragile".