Le président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi, s'est attaché avant-hier à rassurer les marchés sur les chances de la zone euro de rebondir en fin d'année, et a même laissé entrevoir la possibilité d'une nouvelle baisse de son taux d'intérêt directeur.Malgré des indicateurs d'activité toujours moroses, le sursaut de la croissance attendu au second semestre est toujours d'actualité, selon lui. "Il faut distinguer le court terme du moyen terme. Et à moyen terme, nous continuons de voir un début de reprise graduelle", a dit M. Draghi, lors de sa conférence de presse mensuelle à Francfort. Car si les données chiffrées sont "décevantes", celles sur le moral des investisseurs comme des consommateurs sont positives, a-t-il souligné. Cela n'a pas empêché l'institution monétaire de revoir légèrement à la baisse sa prévision de croissance du Produit intérieur brut (PIB) de la région pour cette année: elle attend désormais une contraction de 0,5%, contre -0,3% pronostiqué en décembre. Une révision toutefois uniquement attribuée à un dernier trimestre 2012 plus mauvais qu'attendu, avec un recul du PIB de 0,6%, et qui ne change pas le sentiment général de la BCE, a-t-il expliqué. Pour soutenir la reprise économique, le conseil des gouverneurs de la BCE est prêt à maintenir sa politique monétaire accommodante autant que nécessaire et à fournir autant de liquidités que réclamées par les banques, a affirmé M. Draghi. Avant-hier, il a même discuté d'une baisse de taux mais "le consensus qui a prévalu a été de laisser les taux inchangés", avec un taux directeur à 0,75%, son plus bas niveau historique auquel il stationne depuis juillet. Mesure de dernier recours Malgré ces propos, Christian Schulz, économiste de la banque Berenberg, considère qu'une future baisse de taux est improbable, surtout si l'économie de la zone euro s'améliore comme anticipée. "Une baisse de taux semble être une mesure de dernier recours", a-t-il estimé. Une opinion partagée par Howard Archer, chef économiste Europe de IHS Global Insight, qui souligne que la fragmentation persistante des marchés du crédit -avec des pays où les taux suivent la courbe dessinée par la BCE, tandis que d'autres en sont loin- limiterait de toute façon la portée d'un nouveau relâchement de la politique monétaire. M. Draghi, a par ailleurs une nouvelle fois rappelé les gouvernements de la région à leur devoir, déclarant que l'essentiel du travail leur incombait pour sortir de la crise et qu'ils se devaient de poursuivre les réformes. Interrogé sur le niveau record du chômage (11,9% de la population active en janvier), il l'a qualifié de "tragédie", en particulier celui des jeunes, avant d'en rejeter la faute sur les législations nationales qui font porter "tout le poids de la flexibilité du travail" sur ces derniers. Quant à la BCE, elle ne peut pas grand-chose sur cette question, d'après lui. Enfin, concernant l'Italie, dont la crise politique a réveillé les inquiétudes d'un retour au premier plan de la crise de la dette, M. Draghi a jugé que les marchés avaient l'air de moins s'en émouvoir que les politiques, et a écarté la possibilité d'une contagion à d'autres pays de la zone euro, contrairement à ce qui s'était passé il y a un an et demi. "Après une certaine nervosité immédiatement après les élections, les marchés sont revenus plus ou moins à leur niveau d'avant", a-t-il déclaré. "Pour l'instant les marchés ont été moins impressionnés que les responsables politiques et vous-mêmes", a-t-il dit à l'intention des journalistes. Le nouveau programme de rachat de dette annoncé en septembre, dont certains estiment que l'Italie -avec des taux d'emprunt en hausse depuis les élections législatives- pourrait bénéficier, il a signifié que les conditions n'avaient pas changé. Pour y prétendre, un Etat doit avoir fait appel à l'aide de ses partenaires et s'être soumis en contrepartie au plan de réformes structurelles et budgétaires qu'ils lui dicteront. Baptisé OMT, ce programme a contribué à mettre un terme à l'envolée des taux de certains pays et à ramener la confiance des investisseurs dans la zone euro, sans même que la BCE n'ait eu besoin pour l'instant de l'activer.Au final, "au lieu d'agir, la stratégie de la BCE semble être l'attente", a estimé Johannes Gareis, économiste de Natixis.