Les chances de voir républicains et démocrates aboutir à un compromis sur la refonte du système fiscal américain, la réduction des dépenses de l'Etat et une réforme de la protection sociale, semblent s'amenuiser. L'annonce d'une amélioration soudaine des perspectives de déficit public au cours de la prochaine décennie a réduit la pression sur les élus. De plus, une série de scandales - mettant notamment en cause l'Internal Revenue Service (IRS), le fisc américain, et les mesures de protection de la représentation diplomatique à Benghazi attaquée en septembre dernier - détournent l'attention du Congrès et de la Maison blanche. "Les deux parties ont durci leurs positions et la lassitude semble avoir pris le dessus en matière budgétaire", souligne le républicain Steve Bell, du Bipartisan Policy Center. Ces chiffres "ont éteint le feu dans le camp des alarmistes", a déclaré Jared Bernstein, membre du Center on Budget and Policy Priorities et ancien conseiller économique du vice-président démocrate Joe Biden. "Les chances que le Congrès fasse quelque chose d'utile, qui étaient déjà minces, le sont encore plus", a-t-il ajouté. "Il est probable qu'à la Maison blanche, on soit davantage préoccupé par l'IRS." La presse a accusé la semaine dernière l'IRS d'avoir ciblé ces dernières années des groupes conservateurs, comme les "Tea Party", en matière de contrôle des demandes d'exonérations fiscales. Le Congressional Budget Office (CBO), un organe non-partisan du Congrès, a revu en forte baisse la semaine dernière sa prévision de déficit pour 2013, estimant qu'il atteindrait 4% du PIB américain, soit la moitié du déficit enregistré en 2009. Et il estime qu'il sera ramené à 2,1% d'ici 2014-2015 sur la base des prévisions actuelles de croissance. Toutefois, le rapport indique que le déficit américain se creusera à nouveau en 2016, puis continuera d'augmenter, avec des conséquences graves sur l'économie américaine et une montée en puissance du risque de crise budgétaire.
Une occasion qui ne se représentera pas de sitôt Les parlementaires semblaient avoir pris en compte cette nouvelle dynamique budgétaire avant la publication du rapport du CBO. Aucun effort n'a été fait pour réduire l'écart entre les projets de budget votés en mars par le Sénat à majorité démocrate et la Chambre des représentants à majorité républicaine. Aucune commission mixte n'a ainsi été constituée pour tenter de trouver un compromis entre les importantes réductions de dépenses proposées par les républicains et les quelque 1.000 milliards de dollars d'augmentations d'impôts prévues dans la version démocrate. Et toute tentative de Barack Obama pour détourner l'attention des scandales vers un accord budgétaire pourrait rencontrer une forte résistance de la part d'élus républicains qui ne veulent pas lui concéder une victoire avant les élections de mi-mandat de 2014. De leur côté, les partisans d'Obama estiment que l'amélioration de la situation budgétaire justifie leur refus d'accepter une forte réduction des dépenses fédérales. Pour certains, l'impasse budgétaire devenue désormais moins menaçante est une bonne nouvelle. Le recul de l'incertitude à Washington a ainsi contribué à porter Wall Street à des records. Mais la bataille autour du plafond de la dette, tout en pesant sur les marchés financiers, a été l'aiguillon qui a permis d'imposer une augmentation de la fiscalité sur les plus riches en janvier et des baisses de dépenses budgétaires automatiques, dites de "séquestre", en vigueur actuellement. Les augmentations d'impôts et le "séquestre", ainsi que l'amélioration de la conjoncture économique, sont en grande partie à l'origine de l'amélioration des perspectives budgétaires, a précisé le CBO dans son rapport publié mardi. De leur côté, les élus républicains les plus orthodoxes en matière budgétaire craignent de laisser passer l'occasion de réformer en profondeur des programmes de protection sociale tels que Medicare, l'assurance maladie des personnes âgées. "Ce n'est pas parce que le patient va mieux pendant quelque temps qu'il ne faut rien faire", souligne Tom Cole, représentant républicain de l'Oklahoma à la Chambre et membre de la commission du budget et des crédits. "Ce sera beaucoup plus difficile en 2014, il semble que ce soit le bon moment pour agir", dit-il, évoquant les élections de mi-mandat.